droit d'asile
Question de :
M. Christian Philip
Rhône (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 9 octobre 2002
SITUATION DES SANS-PAPIERS
M. le président. La parole est à M. Christian Philip, pour le groupe UMP.
M. Christian Philip. Ma question s'adressera à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, mais, avant de la poser, je voudrais, d'un mot, revenir sur les événements douloureux de cette dernière fin de semaine : l'attentat contre le maire de Paris, le crime raciste de Dunkerque ou la jeune fille brûlée vive. Je voudrais d'un mot, monsieur le ministre, rendre hommage aux forces de police qui ont su très rapidement arrêter les auteurs de ces actes inqualifiables. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Ma question porte sur un problème douloureux, celui des sans-papiers.
Je ne veux pas polémiquer, mais, en raison d'une gestion que je dois qualifier d'irresponsable, vous héritez, monsieur le ministre, d'une situation difficile. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) On a laissé se développer une procédure qui laisse trop souvent de trop nombreuses personnes sans réponse.
M. Christian Bataille. La question !
M. Christian Philip. Sans réponse pour ne pas dire non, sans réponse pour ne pas assumer les régularisations. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. François Lamy. On en reparlera !
M. Christian Philip. La réforme annoncée des procédures d'asile constitue déjà un premier pas. (« C'est vrai ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Mais je crois qu'il faut encore se poser deux questions.
M. Julien Dray. Il faut régulariser !
M. Christian Philip. D'une part, monsieur le ministre, quels moyens entendez-vous mettre en oeuvre pour renforcer le contrôle de l'immigration illégale à nos frontières - sans quoi nous n'avancerons jamais ? Ne faut-il pas élaborer une procédure au niveau européen ?
D'autre part, quel délai vous donnez-vous, quel délai donnez-vous aux préfets pour répondre au cas par cas à tous ces sans-papiers ? Ce sera l'honneur de ce gouvernement de leur donner une réponse, contrairement à ce qui a été fait tout au long des dernières années. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - « C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, la question des sans-papiers est incontestablement l'un des sujets les plus difficiles que la société française a à affronter. Sans doute avons-nous eu grand tort, les uns comme les autres, de ne pas définir clairement, franchement, sans hyprocrisie et sans outrance, la politique de l'immigration pour la France à l'horizon des vingt années qui viennent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Je reconnais bien volontiers que la responsabilité est collective, elle concerne tout le monde.
Il nous faut refuser deux outrances. Si le Gouvernement n'accepte pas, je vous le confirme avec la plus grande détermination, de régularisations globales, parce que celles-ci n'ont jamais résolu le problème et entretiennent un climat d'exaspération qui nourrit la xénophobie (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), il a clairement indiqué, en plein accord avec le Premier ministre, que des régularisations interviendraient, au cas par cas. Les hommes et les femmes qui connaissent aujourd'hui des situations dramatiques ne doivent pas être traités comme des ballots de marchandises, ce sont des êtres humains, et ceux qui se trouvent dans cette situation impossible auront des papiers.
M. Philippe Briand. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je pense notamment à tous ceux qui ne sont ni expulsables ni régularisables. Ceux-là nous avons tout intérêt à les sortir de la clandestinité pour permettre leur intégration. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) C'est cela le refus des outrances.
Maintenant, l'avenir, comment se présente-t-il ?
L'avenir, premièrement, c'est la réforme du droit d'asile. Par exemple, dans le seul département du Val-de-Marne, nous en parlions avec le ministre des affaires étrangères, 500 demandes d'asile politique ont été déposées en provenance de ressortissants roumains. Pourtant, à ma connaissance, la Roumanie est un pays démocratique. C'est un détournement manifeste des procédures, (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) et je souhaite que la réforme prévoie une procédure simplifiée dans ces cas-là, c'est-à-dire quand un demandeur d'asile politique vient d'une démocratie.
M. Claude Goasguen. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La France doit accueillir la détresse du monde, non les faux demandeurs d'asile. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Deuxièmement, il faut mettre en oeuvre une politique d'immigration européenne. Nous avons aboli les frontières entre nous, mais nous ne sommes pas prêts à garantir les frontières extérieures de l'Europe. Il faut une politique européenne d'immigration avec sans doute, à terme, une police européenne de l'immigration. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Troisièmement, il faut lutter contre les filières.
Quatrièmement, il faut que les reconduites soient effectives. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.) Quand un tribunal décide qu'un étranger n'a pas à résider sur le sol français, sa décision doit être exécutée. Sinon, nous ne sommes plus dans un Etat de droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
A l'avenir il y aura donc deux catégories d'étrangers : ceux qui ont vocation à s'intégrer à la société française, que nous devons accueillir en respectant leur dignité et la plénitude de leurs droits, et ceux qui n'ont pas vocation à s'intégrer à la société française, qui seront reconduits chez eux, avec une grande politique du développement et de la coopération. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Christian Philip
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 9 octobre 2002