Question au Gouvernement n° 346 :
mariage

12e Législature

Question de : Mme Françoise de Panafieu
Paris (16e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Question posée en séance, et publiée le 30 janvier 2003

MARIAGES BLANCS

M. le président. La parole est à Mme Françoise de Panafieu, pour le groupe UMP.
Mme Françoise de Panafieu. Ma question s'adresse au ministre de la justice, garde des sceaux.
La recrudescence des mariages blancs a pris, ces dernières semaines, des proportions impressionnantes. Le phénomène est général. Samedi dernier, sur onze mariages célébrés dans le 17e arrondissement, dont je suis le maire, cinq concernaient des couples dont l'un des deux conjoints étaient en situation irrégulière.
Mme Martine Billard. Et alors ? Ce ne sont pas des mariages blancs pour autant !
Mme Françoise de Panafieu. Que dire de ces situations extrêmes où les futurs époux ne peuvent se comprendre, faute de parler la même langue ? Au total, pour l'année 2002, sur 871 mariages que mes adjoints et moi-même avons été amenés à célébrer, 190 posaient problème.
Des causes multiples expliquent cette tendance à la hausse, mais le problème existe depuis des années. Depuis la suppression, en 1981, de l'autorisation donnée par le préfet pour le mariage des étrangers, aucune règle n'est venue combler un vide qui a été très vite mis à profit par les filières de l'immigration clandestine. Car le certificat de mariage est un document précieux pour obtenir des cartes de séjour et la nationalité française.
M. Yves Nicolin. En effet !
Mme Françoise de Panafieu. Bien sûr, nos services administratifs municipaux font le maximum, transmettant au Parquet tous les dossiers sur lesquels une infraction pénale de séjour irrégulier est constatée ; mais les services de la justice sont débordés. Or, derrière ces pratiques se cachent des situations inhumaines, souvent dramatiques, des manipulations, des pressions, des menaces exercées en vue d'obtenir un consentement forcé. Il suffit de lire les dénonciations de tiers pour s'en convaincre.
Aussi, monsieur le ministre, quelles dispositions comptez-vous prendre pour faire cesser ces odieuses pratiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, nous sommes, là encore, devant la nécessité de faire respecter le droit.
Mme Martine Billard. Et l'amour ? (Rires et exclamations sur de nombreux bancs.)
M. Yves Cochet. Très juste !
M. le président. L'amour n'est pas en question !
M. le garde des sceaux. Je comprends le souci des maires, officiers d'état civil, qui peuvent avoir le sentiment d'être complices d'une situation qu'il pressentent comme irrégulière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) D'où la nécessité de leur fournir une réponse différente de celle qui existe actuellement.
M. Yves Nicolin. Très bien !
M. le garde des sceaux. Sur le plan pénal, j'envisage, d'une part, d'envoyer aux parquets une circulaire qui est déjà prête, afin de les inciter à poursuivre, chaque fois que la fraude est démontrée ; ...
M. Bernard Roman. Sur quel fondement ?
M. le garde des sceaux. ... d'autre part, de faire en sorte que la coopération entre le parquet, lorsqu'il est saisi par l'officier d'état civil, et les services de police permette, autant qu'il est possible dans le délai légal actuel d'un mois, de faire l'enquête nécessaire.
Mais nous devrons sans doute aller plus loin, dans le respect, bien entendu, de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, en 1993, a posé le principe selon lequel le mariage est, y compris pour des personnes étrangères sur le sol français, une liberté publique.
Pour autant, je pense très sincèrement que le délai d'un mois pose problème. Nous devons examiner les conditions dans lesquelles le parquet pourrait le prolonger afin de permettre à l'enquête indispensable de déterminer s'il y a ou non fraude. Car le problème ne concerne pas seulement deux personnes : comme vous l'avez dit, madame la députée, il existe désormais des réseaux qui utilisent des femmes ou des hommes pour gagner de l'argent et organiser le mariage comme un trafic. C'est contre ces dérives que nous devons lutter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : Mme Françoise de Panafieu

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Famille

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 30 janvier 2003

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