Iraq
Question de :
M. Paul Quilès
Tarn (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 6 février 2003
POSITION EUROPÉENNE SUR LA CRISE IRAKIENNE
M. le président. La parole est à M. Paul Quilès, pour le groupe socialiste.
M. Paul Quilès. En l'absence du ministre des affaires étrangères, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Devant la chronique d'une guerre annoncée en Irak, les pays européens réagissent différemment, on vient de le voir. Il est vrai que cette chronique se déroule selon un scénario inexorable, avec une mise en scène bien organisée. C'est ainsi que, dès cet après-midi, le secrétaire d'Etat américain, M. Colin Powell, a été chargé de présenter devant le Conseil de sécurité des preuves irréfutables de l'armement irakien.
N'est-il pas un peu étrange que ces preuves, dont le Président de la République a peut-être eu connaissance, n'aient pas été transmises il y a quelques semaines aux inspecteurs de l'ONU, comme MM. Blix et ElBaradei l'avaient demandé ? Il est vrai que les Américains prétendaient, à l'époque, qu'ils ne pouvaient pas révéler leurs sources sans mettre leurs auteurs en danger. Apparemment, cet argument ne vaut plus aujourd'hui.
La position de la France ne risque-t-elle pas d'évoluer ? En d'autres termes, le Gouvernement peut-il nous rassurer et nous dire que notre diplomatie ne va pas se déclarer convaincue par ces preuves, soit dès cet après-midi, soit dans quinze jours, quand les inspecteurs remettront leur rapport ? (Murmures sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Vous légitimeriez, dans ce cas, la guerre dangereuse que prépare M. Bush, ce que, naturellement, nous n'accepterons pas.
Pouvez-vous nous affirmer que la France ne rentrera pas dans le rang, et ne s'alignera pas sur la prétendue « nouvelle Europe » ? Pour nous, il ne s'agit que d'une juxtaposition de gouvernements heureusement désavoués par leurs opinions publiques qui savent bien, elles, que le futur de l'Europe ne se trouve pas dans l'approbation inconditionnelle et irréfléchie des visées hégémoniques du Président des Etats-Unis. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Permettez-moi tout d'abord, monsieur Quilès, de vous transmettre les excuses du Premier ministre qui se trouve en Inde et du ministre des affaires étrangères qui, comme vous le savez, est à l'heure actuelle à New York pour l'ouverture, dans environ une heure, des travaux du Conseil de sécurité.
Votre question est fondamentale et il est tout à fait normal que la représentation nationale soit informée de l'évolution des travaux du Conseil de sécurité et de la crise irakienne.
Sur le premier point, à savoir que Washington détiendrait les preuves de la possession par l'Irak d'armements de destruction massive, bien entendu, le ministre des affaires étrangères français écoutera avec la plus grande attention l'exposé américain. Il reviendra ensuite aux inspecteurs de prendre en compte d'éventuels éléments nouveaux et d'en tirer les conséquences en se rendant, si nécessaire, sur le terrain pour les vérifier.
Sur le second point, à savoir l'unité de l'Union européenne, il faut rappeler que le 27 janvier dernier, lors d'un Conseil des ministres des affaires étrangères, une position unanime a été arrêtée. L'Union s'en tient au strict respect de la résolution 1441 souhaitant un désarmement pacifique de l'Irak et l'intensification des missions d'inspection.
Il est vrai, monsieur le député, que, récemment - et sans doute d'autres déclarations seront-elles faites dans les heures ou les jours qui viennent -, une lettre dite « des huit » signée par certains pays de l'Union et certains pays candidats, affichait une autre position. Quelles que soient les objections que l'on puisse formuler à l'encontre de la méthode, il est à souligner que cette déclaration commune met en avant - ce qui évidemment nous satisfait - le rôle éminent et incontournable du Conseil de sécurité.
Mais quid de la politique étrangère européenne ? C'est une politique de longue haleine, on l'a vu à propos du Proche-Orient. Nous soutenons l'initiative de la présidence grecque qui va réunir, dans les jours qui viennent, un Conseil extraordinaire des ministres des affaires étrangères, lequel pourrait éventuellement être suivi d'un Conseil européen extraordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement. Cela répond à notre souhait car c'est à l'Union de prendre ses responsabilités face à cette crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. Nous en avons fini avec les questions portant sur des thèmes européens.
Auteur : M. Paul Quilès
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires européennes
Ministère répondant : affaires européennes
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 6 février 2003