Question au Gouvernement n° 386 :
modes de scrutin

12e Législature

Question de : M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 13 février 2003

RÉFORME ÉLECTORALE

M. le président. La séance ne fait que commencer. Mes chers collègues, je vous prie de vous asseoir !
La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, au moment où les Français subissent les licenciements, l'austérité de votre politique, les augmentations de taxes, vous ne trouvez rien de mieux à faire que engager un débat sur la chasse. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Edouard Landrain. Il n'a rien compris !
Un député du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Parlez-nous des 35 heures !
M. Jean-Marc Ayrault. Au moment où plane sur le monde la menace d'une guerre, au moment où nous demandons que le Parlement soit consulté et associé à la décision que prendra notre pays sur la gravissime question de l'Irak, vous ne trouvez rien de mieux à proposer qu'un changement de mode de scrutin, et que de le faire par force pour instituer la domination absolue d'un parti : le vôtre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Non content de traiter par le mépris l'opposition de toutes les forces démocratiques à cette réforme, vous bâillonnez le Parlement en utilisant l'article 49-3 de la Constitution, comme vous venez de le confirmer, et cela pour mettre fin à un débat qui vous dérange...
M. Charles Cova. Ce n'est pas le débat !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. C'est indigne !
M. Jean-Marc Ayrault. ... et dans lequel vous vous êtes fourvoyé. C'est une méthode que, pendant cinq ans, le gouvernement de Lionel Jospin s'est refusé à employer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) De plus, fait sans précédent dans la vie parlementaire, vous agissez à la demande d'un président de groupe parlementaire. Monsieur Barrot, vous qui êtes attaché à la tradition parlementaire, c'est totalement inadmissible et incompréhensible de votre part ! (Mêmes mouvements.)
M. Richard Mallié. Nul !
M. Jean-Marc Ayrault. Ce double coup de force est un aveu de faiblesse, monsieur le Premier ministre.
M. Richard Mallié. On a autre chose à faire !
M. Jean-Marc Ayrault. Vous disposez de majorités écrasantes à l'Assemblée nationale, au Sénat et dans toutes les institutions de la République, et vous imposez la pire des contraintes pour un parlement : l'impossibilité de débattre et de voter. Voilà ce que vous avez décidé. Alors, de grâce, monsieur le Premier ministre, n'ayez pas en plus le ridicule de nous en faire porter la responsabilité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Jean-Michel Ferrand. C'est vous qui êtes ridicule !
M. Jean-Marc Ayrault. C'est vous et votre gouvernement qui avez pris l'initiative de cette réforme et qui devez assumer la responsabilité de cette injustice.
Je vous pose donc la question : qu'en sera-t-il lorsque vous nous présenterez vos projets de réforme des retraites ou de la sécurité sociale ? Utiliserez-vous les mêmes méthodes ?
Monsieur le Premier ministre, vous évoquez sans cesse « l'esprit de mai ». « L'esprit de mai », c'est le refus que tous les pouvoirs soient concentrés dans les mêmes mains. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Jean Glavany. Il est beau, « l'esprit de mai » !
M. Jean-Marc Ayrault. C'est l'intérêt général au-dessus des intérêts partisans. C'est la République au-dessus de tout. Et nous, le 5 mai, nous en avons fait la démonstration. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. La question !
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, je vous le demande avec solennité : respectez l'Assemblée nationale. Ayez l'humilité de reconnaître votre faute. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) C'est simple, monsieur le Premier ministre. Soyez fidèle à l'esprit de mai. Retirez votre texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président Ayrault, vous avez décrit la majorité d'aujourd'hui comme écrasante. Est-ce un reproche que vous adressez aux Français qui vous ont sanctionnés hier (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) et nous ont confié la majorité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Monsieur Ayrault, vous le savez, car nous en avons longuement parlé hier, le Gouvernement est venu à la discussion sur les lois électorales dans un esprit d'ouverture. J'en donne trois preuves. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) D'une part, j'ai indiqué, au nom du Gouvernement, que nous étions prêts à discuter des modalités de la fusion. J'ai indiqué, d'autre part, que nous étions prêts à discuter des modalités du remboursement des campagnes électorales. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) J'ai indiqué enfin que nous étions prêts à discuter du sectionnement régional pour les élections européennes.
A cela, vous avez répondu de la façon suivante : sept suspensions de séance avant même qu'un seul orateur ait pu prendre la parole. Telle est votre conception du débat parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Vous-même, monsieur Ayrault, n'avez cessé de me sommer de répondre à vos questions. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous n'avez cessé de me mettre en accusation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et quand je suis monté à la tribune, pour répondre à vos questions, vous avez quitté l'hémicycle, vous avez déserté (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste), vous avez fui le débat. Voilà votre conception. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Glavany. Calmez-vous !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je dois à la vérité de reconnaître que nous en avons été fort aises.
Monsieur le président Ayrault, une nouvelle fois, vous vous posez en donneur de leçons. Je me demande au nom de quoi. Est-ce au nom de votre bilan ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues...
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous qui, pendant tant d'années, avec la complicité indirecte du Front national, avez assis un pouvoir sur beaucoup d'arrangements (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste), voilà que vous nous proposez à présent la démolition et l'obstruction. (Protestations continues sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons décidé de ne pas nous laissez faire. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - « Soisson ! Soisson ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Allez, debout, levez-vous !
M. le président. Arrêtez ! Mesdames et messieurs. Vous rendez-vous compte du spectacle que vous donnez ? (« Soisson ! Soisson ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je vous en prie, un peu de tenue. Pensez à l'institution parlementaire. (Protestations prolongées sur les bancs du groupe socialiste.) Nous ne sommes pas à l'Opéra-Comique ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Ayrault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Élections et référendums

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 février 2003

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