Question au Gouvernement n° 39 :
croissance

12e Législature

Question de : M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 10 octobre 2002

PRÉVISIONS DE CROISSANCE

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
M. Didier Migaud. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'INSEE vient de réviser à la baisse sa prévision de croissance pour 2002, avec les conséquences que cela peut avoir pour 2003.
M. Yves Nicolin. La faute à qui ?
M. Didier Migaud. Tous les économistes, en France et dans le monde, font de même pour 2003.
M. Patrick Ollier. Jurisprudence Fabius !
M. Didier Migaud. Le seul à rester imperturbable face à cette situation, c'est le Gouvernement,...
M. Georges Tron. Qu'avez-vous fait il y a un an ?
M. Didier Migaud. ... à l'exception de vous-même, monsieur le ministre, qui, dans un élan de sincérité qui vous honore, avez exprimé des inquiétudes et des doutes par rapport à votre hypothèse de croissance.
Nous comprenons que le Gouvernement se montre ambitieux. Encore faut-il qu'il reste crédible...
M. Yves Nicolin. Ça vous va bien !
M. Didier Migaud. ... et que des mesures fortes viennent exprimer sa volonté de conforter la croissance. Or, nous ne trouvons rien qui aille dans ce sens dans le projet de budget pour 2003.
Le moral des chefs d'entreprise est à la baisse, celui des Français également. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. Laissez M. Migaud parler ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Didier Migaud. Merci, monsieur le président. Chacun commence à ressentir plus fortement encore les difficultés de la situation économique : la remontée du chômage - et les conséquences du krach boursier. L'injustice et l'inefficacité de vos premières mesures semblent nous conduire dans le mur et, peut-être, à un nouveau plan de rigueur comme on l'entend parfois.
D'un côté, vous prévoyez des baisses d'impôt pour une minorité de nos concitoyens, l'exemple le plus caricatural étant la réduction supplémentaire pour les emplois à domicile, qui ne concernera que 70 000 des 28 millions de familles de notre pays. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. Le temps de parole de M. Migaud n'est pas encore écoulé. Laissez-le poursuivre !
M. Didier Migaud. De l'autre côté, vous augmentez les prix du carburant et du fioul domestique, ce qui risque de fragiliser la consommation. (Mêmes mouvements.)
J'en arrive à mes questions.
Allez-vous réviser votre copie et donc vos hypothèses de croissance ? (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Que ferez-vous pour consolider la consommation ? Allez-vous enfin prendre des mesures dont le champ dépasse les quelques dizaines de milliers de personnes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, la prévision de croissance de 2,5 % est celle du Gouvernement, c'est aussi (Huées sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. Maintenant, laissez M. Mer répondre ! Monsieur le ministre, ne vous laissez pas interrompre !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est une prévision, ce n'est pas une prédiction. Je ne suis pas Mme Soleil ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Cela dit, cette prévision est celle aujourd'hui de la grande majorité des instituts...
M. Jean Glavany. C'est faux !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... tels le Fonds monétaire international ou l'OCDE, et cela n'est absolument pas contradictoire avec les prévisions retenues au même moment par la plupart des pays membres de l'Union européenne.
M. Jean Glavany. Mais non !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je n'en veux pour preuve que l'hypothèse de 2,8 % sur laquelle est fondé le budget italien. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Pour donner à cette prévision le maximum de chances de se révéler exacte, nous sommes en train, par notre politique, de créer les conditions pour que les acteurs de la croissance que sont l'entrepreneur et le consommateur réalisent cette croissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Le consommateur, vous le savez, bénéficie d'un certain nombre de réductions d'impôts (« Lesquelles ? » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Lesquelles ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... qu'il va transformer, soit maintenant, soit un peu plus tard, en consommation.
M. Jean Glavany. Plutôt en épargne !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. D'ailleurs je me permets de vous rappeler que l'INSEE, tout en révisant à la baisse la prévision de croissance des trois prochains mois, table sur une croissance du pouvoir d'achat des ménages supérieure au chiffre que nous avons retenu nous-mêmes dans nos prévisions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Elle annonce 2,9 % contre 2,1 % dans les prévisions du Gouvernement. Cet argent perçu en plus, ou bien sera dépensé maintenant, et l'INSEE aura tort dans les trois prochains mois ; ou bien l'INSEE aura raison, mais j'aurai raison l'année suivante (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) dans la mesure où ce supplément de pouvoir d'achat sera dépensé alors. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Deuxièmement, je vous rappelle qu'il n'importe pas seulement que le consommateur ait le moral. Il faut que l'entrepreneur aussi ait le moral. Et il n'y a aucune raison de ne pas l'encourager dans sa prise de risques par les mesures gouvernementales, y compris celles qui ont été annoncées, ce lundi, par le Premier ministre et par Renaud Dutreil à Lyon ou à Strasbourg. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : M. Didier Migaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique économique

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 10 octobre 2002

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