Question au Gouvernement n° 584 :
politique de l'éducation

12e Législature

Question de : M. Manuel Valls
Essonne (1re circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 7 mai 2003

ÉDUCATION NATIONALE

M. le président. La parole est à M. Manuel Valls, pour le groupe socialiste.
M. Manuel Valls. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, les enseignants sont blessés, amers, meurtris. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ils se sentent humiliés et l'envoi de votre livre a accentué leur malaise. (Protestations sur les mêmes bancs.)
Par votre discours, le regard que vous portez sur eux, votre méthode, vos propositions, vous avez perdu leur confiance et celle de la communauté éducative qui, pour la quatrième fois depuis la rentrée scolaire, manifeste contre vous. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous engagez le démantèlement de l'Etat et du service public de l'éducation nationale, seuls garants de l'égalité des chances. Vous ne proposez pas une décentralisation, mais un transfert des charges de l'Etat aux collectivités locales. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous n'essayez pas d'aider les enseignants, dans leur mission, à se recentrer sur l'essentiel, c'est-à-dire la transmission des savoirs et des valeurs républicaines.
M. Lucien Degauchy. Savoirs socialistes !
M. Manuel Valls. Non, monsieur le ministre, vous souhaitez dénationaliser l'école au nom d'une vision idéologique qui conduit notamment à détruire l'unité de l'équipe pédagogique, seule à même de lutter contre l'échec scolaire.
Au lieu de sourire et de sous-estimer la puissance du mouvement, entendez, monsieur le ministre, le cri d'angoisse et la révolte qui monte. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. S'il vous plaît, laissez parler M. Valls.
M. Manuel Valls. C'est l'avenir de l'essence même de la République qui est en cause, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Prenez au sérieux ce qui se passe, ne vous fiez pas aux chiffres, observez les mouvements, voyez leur dureté.
M. Jean Auclair. Provocation !
M. Manuel Valls. Regardez, monsieur le ministre, la révolte contre votre attitude et vos propositions, car votre attitude ici, sur les bancs du Gouvernement, illustre bien le mépris qui est le vôtre à l'égard des enseignants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Monsieur Valls, je vous prie de poser votre question.
M. Manuel Valls. Les députés du groupe socialiste et moi-même vous demandons de retirer vos projets et de restaurer une vraie discussion avec les acteurs de l'éducation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Noël Mamère. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, j'ai constaté, en me rendant dans les établissements scolaires, qu'on y distribuait un tract, d'ailleurs assez bien fait et même amusant, qui essayait de faire croire aux parents, parce qu'on voulait affoler les familles, que le Gouvernement voulait supprimer les conseillers d'orientation et faire payer leurs consultations, ce qui est contradictoire, parce que s'il les supprime je ne vois pas comment il ferait payer les consultations.
M. André Chassaigne. C'est un peu facile, monsieur le ministre !
M. François Lamy. Ne soyez pas méprisant !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le Gouvernement voudrait également supprimer les assistantes sociales, la médecine scolaire, démanteler et privatiser le service public...
M. François Hollande. C'est vrai !
M. le ministre de la justice, de l'éducation nationale et de la recherche. Je suis heureux de pouvoir vous dire, monsieur Valls, que cette désinformation absurde, dont vous vous faites malheureusement l'écho aujourd'hui, n'a pas de prise sur l'opinion publique. Elle a fait long feu : c'est la bonne nouvelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean Glavany. Vous n'avez que le mépris à la bouche.
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. J'ai eu le plaisir de lire ici même, la semaine dernière, un texte fort intéressant de Pierre Mauroy, qui recommandait vivement le transfert à la fonction publique territoriale des 95 000 « TOSS ». (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je vais vous en lire un autre aujourd'hui, mais sans vous donner l'auteur. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Si vous voulez bien écouter, quelques-uns parmi vous se reconnaîtront : « L'éducation nationale reste encore trop centralisée en France. Il faut assurément aller plus loin dans la voie de la déconcentralisation et de la décentralisation ouverte par Claude Allègre. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Dès lors qu'en matière de contenu de l'enseignement, d'objectifs pédagogiques, de statuts et de règles de fonctionnement, ce qui doit être défini au niveau national l'est, pourquoi, sur tous les autres points, et pour ce qui est de la mise en oeuvre effective des objectifs nationaux, ne pas donner pleine responsabilité aux établissements ? »
M. Manuel Valls. Et alors ?
Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas ce que vous faites.
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Ce texte fort intelligent a été validé par le bureau national du parti socialiste le 9 octobre 2001. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Le seul commentaire que je ferai est le suivant : il est vraiment regrettable que lorsque vous avez de mauvaises idées, vous les appliquiez, mais que, lorsque vous en avez de bonnes, vous les gardiez de côté. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Manuel Valls

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : jeunesse et éducation nationale

Ministère répondant : jeunesse et éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mai 2003

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