réforme
Question de :
M. Pascal Terrasse
Ardèche (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 8 mai 2003
AVENIR DES RETRAITES
M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, pour le groupe socialiste.
M. Pascal Terrasse. Monsieur le Premier ministre, vous venez de présenter aujourd'hui, à grand renfort de communication, votre avant-projet de réforme des retraites. Cette réforme, vous la présentez au nom de la sauvegarde des retraites.
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Les socialistes n'ont rien fait, eux !
Un député du groupe socialiste. Arrêtez ! C'est un air connu !
M. Pascal Terrasse. Ce n'est, nous le croyons, qu'un prétexte. Prisonnier de votre idéologie libérale (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), vous préparez la France à une régression des retraites, aujourd'hui et demain.
M. Richard Mallié. N'importe quoi !
M. Pascal Terrasse. Personne ne conteste la nécessité d'une réforme, bien évidemment. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Les travaux du Conseil d'orientation des retraites, créé par l'ancien gouvernement, avait permis en effet d'apaiser un climat tendu, et qui l'était notamment en raison du plan Juppé de 1995.
M. Yves Fromion. Lui, il a eu du courage !
Un député du groupe socialiste. Le courage de prendre sa retraite avant la réforme ! Droit dans ses bottes !
M. Pascal Terrasse. Ces travaux du COR ont d'ailleurs abouti à un diagnostic aujourd'hui largement partagé.
Vous menez une campagne catastrophiste pour faire croire qu'il n'y a pas d'autres alternatives à vos propositions.
M. Yves Fromion. Quelles sont-elles, ces alternatives ?
M. Pascal Terrasse. Aujourd'hui même, vous écrivez à tous les Français pour exiger d'eux qu'ils travaillent plus longtemps en vue de toucher des retraites plus faibles.
M. Claude Goasguen. La question !
M. Richard Mallié. Arrêtez votre démagogie !
M. Pascal Terrasse. Comment allez-vous expliquer aux salariés, ceux du secteur privé, ceux du secteur public, que vous refusez d'inscrire dans la loi un niveau de pension minimum garanti, et que leurs ressources vont en effet diminuer à très court terme de 20 % à 30 % ?
M. Yves Bur. Vous avez eu cinq ans pour agir !
M. Pascal Terrasse. Travailler toujours plus pour gagner toujours moins, voilà en réalité ce qui guide votre démarche. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Richard Mallié. C'est de la désinformation !
M. Pascal Terrasse. Vous maltraitez les retraités, qui vont non seulement toucher une pension plus faible, mais vont en outre être pénalisés par le déremboursement des médicaments que vous venez de décider, sans compter ce que vous préparez. C'est le contrat entre les générations qui est aujourd'hui fragilisé. C'est le droit à la retraite à soixante ans à taux plein qui est remis en cause.
M. Richard Mallié. Et pourquoi vous n'avez rien fait quand vous étiez au pouvoir ?
M. Pascal Terrasse. C'est la porte ouverte aux fonds de pension. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vos projets ne sont pas financés.
Un député du groupe socialiste. Ils ont besoin d'argent, après avoir spéculé à tout va !
M. Pascal Terrasse. L'hypothétique transfert des cotisations chômage vers les retraites est un pari risqué. Tout cela n'est naturellement pas très sérieux. Votre échec en matière de lutte contre le chômage en est d'ailleurs la preuve : vous refusez de chercher d'autres financements.
Votre réforme, monsieur le Premier ministre,...
M. Claude Goasguen. La question !
M. le président. Monsieur le député, veuillez poser votre question.
M. Pascal Terrasse. Je la pose tout de suite, monsieur le président.
M. le président. Je vous en prie, posez votre question ! Ne m'obligez pas à être brutal avec vous comme je l'ai été avec M. Lellouche, ce que je regrette.
M. Pascal Terrasse. Laissez-moi trois secondes pour la poser.
M. le président. Votre temps est écoulé !
M. Pascal Terrasse. Votre réforme, monsieur le Premier ministre, est idéologique. C'est celle de la régression et de l'appauvrissement.
M. Claude Goasguen. La question !
M. le président. S'il vous plaît, monsieur Terrasse !
M. Pascal Terrasse. Les Français attendent mieux que vos propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, permettez-moi de vous le dire, l'avenir des retraites, ce n'est pas un problème de droite ou de gauche. C'est un problème national, c'est un problème qui transcende les générations, et c'est un problème que dans la plupart des pays européens, on a été capable de régler avec un vrai consensus national.
M. Yves Fromion. Très bien !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le problème mérite que nos recherchions ensemble l'intérêt général et non pas que nous nous jetions à la figure, comme vous venez de le faire, des affirmations qui sont mensongères,...
M. Bernard Accoyer. Oui !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qui ne reposent sur aucune réalité, et qui surtout sont contraires à tout ce que vous avez dit pendant les cinq dernières années. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
En réalité, chaque gouvernement, de Michel Rocard à Edouard Balladur, d'Alain Juppé à Lionel Jospin, s'est efforcé - avec plus ou moins de vigueur, il est vrai - d'apporter sa pierre à l'édifice. Eh bien, je crois, moi, que cette continuité mérite de se cristalliser autour de la réforme que nous proposons, ....
M. François Hollande. Les choses vont se cristalliser, en effet !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et ce pour trois raisons. D'abord, parce qu'il s'agit de ne pas changer le système de nos retraites. Nous voulons défendre le système de répartition. Nous avons fait le choix d'un système de solidarité, et je crois que ce choix devrait nous rassembler. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ensuite, parce que nous sommes pressés par le temps, mesdames et messieurs les députés.
M. Yves Fromion. Eh oui !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Dans quelques années, il sera trop tard, et le déclin du système sera tel que les scénarios soit d'une baisse drastique des pensions, que vous évoquez, soit de la privatisation, deviendront alors inéluctables. Et ces scénarios, aucun d'entre vous, aucun d'entre nous, ne veut les vivre.
M. Pascal Terrasse. Qu'est-ce que vous faites ?
M. Jacques Desallangre. Changez l'assiette !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Enfin, monsieur le député, parce que le projet que nous présentons est un projet juste, équitable et équilibré. (« Oh non ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Il est juste, équitable et équilibré parce qu'il repose sur un effort, partagé par tous les Français,...
M. Jacques Desallangre. Faux !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... d'allongement de la durée de cotisation pour maintenir le même niveau de pension qu'aujourd'hui. D'ailleurs, mesdames et messieurs les députés, c'est le choix qu'ont fait tous les autres pays européens.
M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas vrai !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Sur les quinze pays d'Europe, quatorze ont choisi d'allonger la durée de cotisation pour permettre de sauvegarder leur régime de retraite. Toutes les affirmations que vous venez d'avancer, monsieur Terrasse, sont fausses. Nous avons, nous, introduit dans la loi un minimum garanti, qui n'existe pas aujourd'hui. Nous avons décidé de stopper la dégradation du taux de remplacement alors que pendant cinq ans, vous y avez assisté impuissants, sans rien changer à la législation existante. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Enfin, ce texte repose sur une mobilisation générale pour l'emploi des plus de cinquante ans, problème sur lequel, là encore, vous n'avez rien fait, ...
Mme Elisabeth Guigou. Ce n'est pas vrai !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... contribuant à déséquilibrer encore un peu plus les régimes de retraite.
Mesdames, messieurs les députés, la démarche du Gouvernement est ouverte.
Mme Martine David. C'est plutôt l'étroitesse d'esprit qui caractérise votre démarche !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous écoutons, nous dialoguons, mais nous avançons, parce que c'est notre devoir. Monsieur Terrasse, je crois que vous vous grandiriez à examiner avec lucidité et avec responsabilité le défi que nous avons tous ensemble à relever. Car, un jour ou l'autre, les Français jugeront. (« En effet ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Pascal Terrasse
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Retraites : généralités
Ministère interrogé : affaires sociales, travail et solidarité
Ministère répondant : affaires sociales, travail et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 mai 2003