accès aux soins
Question de :
Mme Hélène Mignon
Haute-Garonne (6e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 29 mai 2003
AIDE MÉDICALE D'URGENCE
M. le président. La parole est à Mme Hélène Mignon, pour le groupe socialiste.
Mme Hélène Mignon. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, puisque de ce côté-ci de l'hémicycle nous sommes aussi des parlementaires à part entière ! Tout à l'heure, monsieur le Premier ministre, en refusant de répondre au président du groupe socialiste, vous avez manifesté une fois de plus votre mépris de l'opposition et votre cynisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez cherché l'affrontement là où il faudrait rechercher l'apaisement.
Monsieur le Premier ministre, les fortes réactions des associations d'aide aux exclus, en particulier celles gérant les problèmes de santé, vous avaient amené, croyait-on, à renoncer à votre projet de réforme de l'aide médicale d'Etat prévoyant l'instauration d'un ticket modérateur pour des personnes réputées sans ressources. En réalité, vous avez fait le dos rond pendant quelques semaines. Aujourd'hui, un projet de circulaire lève le voile sur vos intentions. Certes, vous y rappelez le principe de l'aide médicale d'Etat. Vous affirmez ne pas vouloir la remettre en cause, mais c'est à travers plus de vingt pages qu'est détaillée la procédure à suivre lors de l'instruction d'un dossier de demande. C'est étonnant venant de vous, qui vous élevez sans cesse contre l'excès de bureaucratie. A moins que cela ne soit destiné à rendre l'AME inaccessible !
M. Jean Auclair. Qui est-ce qui vous a dit ça ?
Mme Hélène Mignon. Pour démasquer quelques fraudeurs - il y en a à tous les échelons de la société -, on met en place un véritable parcours du combattant et on transforme les employés de la CPAM en enquêteurs tâtillons. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) L'obsession de la fraude l'emporte sur les problèmes de santé publique. Certes, les dépenses de l'aide médicale d'Etat augmentent, mais cela montre à quel point ceux qui font appel à cette prestation ont besoin de soins. En outre, les dépenses engendrées ne correspondent qu'à 0,17 % des dépenses d'assurance maladie. Croyez-vous, monsieur le Premier ministre, que c'est par le biais de ce texte à relents xénophobes que vous traiterez les flux migratoires ?
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est nul !
Mme Hélène Mignon. Pour la première fois depuis cinquante ans, en violation de tous les principes de l'aide sociale, vous rendez quasi impossible l'accès au droit aux soins. Avez-vous analysé les conséquences de cette circulaire sur la santé publique ? (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous imaginez-vous, in fine, qu'au mépris de l'avenir de ces hommes et de ces femmes, vous ferez des économies ? Ce n'est qu'un projet, monsieur le Premier ministre. Abandonnez-le ! Les associations concernées feront entendre leur voix.
Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, mais j'ai constaté tout à l'heure que seule la majorité avait droit à ses réponses. J'espère néanmoins y avoir droit moi aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Madame la députée, s'il y a un domaine dans lequel l'art de la caricature est à éviter, c'est vraiment celui-là ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je me suis rendue, à votre invitation, au groupe Quart-Monde que vous présidez ; j'ai d'ailleurs pu mesurer l'immense intérêt qu'y portent les collègues de votre groupe puisque vous étiez... deux. (Protestations sur les mêmes bancs.) A cette occasion, je vous ai expliqué, pendant une heure et demie, la situation de l'aide médicale d'Etat, qui a été votée en 2000, en même temps que la CMU.
Si vous aviez vraiment voulu rendre accessible la CME, votre gouvernement aurait pris les décrets d'application en en fixant le cadre. Comme cela ressort du rapport de l'IGAS que je vous ai transmis, il s'agit d'un dispositif destiné à permettre l'accès aux soins de tous. Le Premier ministre, comme l'ensemble du Gouvernement, y est attaché.
M. Alain Néri. Le Premier ministre ? Il est muet !
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Les personnes sans ressources, qu'elles soient en situation régulière ou pas, doivent pouvoir être soignées.
Il se trouve que le dispositif de l'AME est le seul dispositif d'accès à l'aide sociale qui ne soit pas cadré. Aucun contrôle n'a été mis en place, pas même ceux qui s'imposent aux autres assurés sociaux, ce qui va à l'encontre du principe de l'égalité de tous devant la loi. Le Premier ministre a donc pris une décision responsable,...
Mme Martine David. Il a gelé les crédits !
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. ... destinée précisément à faciliter et à maintenir l'accès aux soins pour tous. Et c'est par voie de circulaire que seront posées les règles d'accès à l'AME. Mais ce seront les mêmes que pour tous.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai !
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Cela vous choque que tout le monde se voie appliquer les mêmes contrôles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Quoi qu'il en soit, je ne vous permets pas de dire qu'il s'agit d'un texte xénophobe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Alain Néri. Mme Versini n'est même pas une élue du peuple ! C'est une honte !
M. le président. Monsieur Néri, taisez-vous !
Auteur : Mme Hélène Mignon
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : précarité et exclusion
Ministère répondant : précarité et exclusion
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 mai 2003