Question au Gouvernement n° 675 :
décentralisation

12e Législature

Question de : M. Christophe Masse
Bouches-du-Rhône (8e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 4 juin 2003

REPORT DU VOLET ÉDUCATIF
DE L'AVANT-PROJET DE LOI DE DÉCENTRALISATION

M. le président. La parole est à M. Christophe Masse.
M. Christophe Masse. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, on a donc enfin annoncé hier la proposition de reporter le volet « éducation » du projet de loi de décentralisation. Ouf, aurais-je envie de dire. Malheureusement, votre prise de position tardive n'aura pas permis d'éviter le trouble dans le milieu des enseignants et des personnels techniques.
M. François Goulard. A qui la faute ?
M. Christophe Masse. Elle aurait pu avoir, notamment sur la tenue des examens, des conséquences encore plus graves, que vous auriez dû assumer seul, monsieur le ministre, sans pouvoir recourir à un odieux chantage sur les enseignants.
M. François Goulard. Lamentable !
M. Christophe Masse. Cette prise de position le confirme : vous devriez peut-être écouter davantage l'opposition parlementaire (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et le mouvement syndical, car il y a déjà longtemps que, pour notre part, nous demandions ce report ou, plutôt, ce retrait. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. François Goulard. Est-ce une profession d'irresponsabilité ?
M. Christophe Masse. En effet, monsieur le ministre, la méthode qui consiste à mettre la charrue avant les boeufs n'a jamais fait avancer le labour. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il nous paraît pourtant essentiel et prioritaire de créer les conditions de ce véritable débat sur les missions de l'école, que vous ne cessez de repousser après l'avoir annoncé.
M. Lucien Degauchy. Démago !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
M. Christophe Masse. Vous avez donc reculé (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et c'est le signe que la pression populaire, que vous méprisez souvent, a encore un sens (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), c'est le signe que l'opposition parlementaire n'a pas tort lorsque, sans relâche, à l'occasion des questions au Gouvernement, ses députés relayent les préoccupations des Françaises et des Français. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cela devrait peut-être vous donner à réfléchir sur ce que votre gouvernement va faire avec le projet concernant les retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Marsaudon. Donneur de leçons !
M. Christophe Masse. Aujourd'hui, le retour à la sérénité dans l'éducation nationale ne sera effectif que si de vraies négociations s'engagent. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous devez ouvrir rapidement les négociations avec les organisations syndicales...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
M. Christophe Masse. ... puis le débat parlementaire, comme nous le demandons depuis longtemps dans cet hémicycle et comme l'a encore réclamé récemment notre collègue Yves Durand.
Il ne suffira pas d'annoncer le report de la discussion sur les questions qui vous posent des problèmes (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), il faut, dès maintenant, traiter le fond, négocier et se concerter. (Mêmes mouvements.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
M. le président. N'interrompez pas M. Masse ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur Masse, veuillez conclure.
M. Christophe Masse. Monsieur le ministre, sous la pression, vous reportez votre réforme. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Sous la pression, vous promettez d'engager un dialogue avec les syndicats. Sous la pression, enfin, vous allez sans aucun doute surseoir à toute décision concernant les personnels de l'éducation nationale (Exclamations sur les mêmes bancs) avant la tenue d'un grand débat dans notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Debout ! Debout !
M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, la délectation que vous inspire l'hypothèse d'un retour à l'immobilisme me paraît en elle-même très inquiétante. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Vous êtes un parlementaire averti, mais il est curieux de vous entendre parler de retrait d'un projet de loi : il ne s'agit en fait que d'un avant-projet (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), il n'est nullement retiré et nous avons simplement décidé d'ouvrir la concertation avec les partenaires sociaux sur trois sujets fondamentaux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qui ont été annoncés par le comité interministériel du 27 mai présidé par le Premier ministre. (« Quel aveu ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bataille. Tartuffe !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le premier sujet concerne la décentralisation et mon collègue Nicolas Sarkozy. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous ne l'ignorez sans doute pas : c'est lui qui est chargé de ce dossier et qui défendra le projet de loi devant vous. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Apparemment, vous apprenez la nouvelle, mais je crois bien que ce n'est une surprise que pour vous. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Henri Emmanuelli. Merci ! Merci !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le deuxième sujet concerne les métiers de l'enseignement et la gestion des fins de carrière. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Marcel Dehoux. Vous verrez les problèmes en septembre !
Mme Martine David. Pour l'instant, les enseignants sont dans la rue !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Le troisième sujet concerne le grand débat sur l'éducation nationale et sur l'avenir de l'école que vous appelez de vos voeux. ll n'y a aucun recul du Gouvernement sur cette question. Ce débat aura lieu, comme prévu, devant le Parlement, (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...
M. Marcel Dehoux. Vous ne serez plus là !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. ... probablement en septembre, ou, en tout cas, au printemps 2004. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme Martine David. Vous ne serez plus ministre !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Il donnera lieu à une révision de la loi d'orientation de 1989, la fameuse loi Jospin, qui n'est pas bonne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
On peut choisir de ne pas négocier, mais ce serait une erreur. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Si l'on ouvre la concertation, il faut se donner un peu de temps, d'une part parce que les réformes passent d'autant mieux qu'elles sont comprises et expliquées (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), d'autre part parce qu'il ne faut pas exclure la possibilité - bien que cela vous arrive rarement - que nous ayons à prendre en compte des idées nouvelles et intéressantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Voilà ce que nous allons faire. Désolé de vous décevoir : notre volonté de réforme est intacte et elle n'est nullement remise en cause. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : M. Christophe Masse

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : État

Ministère interrogé : jeunesse et éducation nationale

Ministère répondant : jeunesse et éducation nationale

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 4 juin 2003

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