accès aux soins
Question de :
Mme Conchita Lacuey
Gironde (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 29 octobre 2003
AIDE MÉDICALE D'ÉTAT
M. le président. La parole est à Mme Conchita Lacuey.
Mme Conchita Lacuey. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Malgré une réforme contestée par les associations humanitaires, malgré une pétition signée par des dizaines de milliers de personnes, malgré un projet de circulaire controversé, le Gouvernement persiste et signe en s'attaquant de nouveau à l'aide médicale d'Etat.
M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances de l'économie générale et du Plan. Il a raison !
Mme Conchita Lacuey. Dans le projet de budget pour 2004, les moyens diminuent de 411 millions d'euros.
Un député socialiste. C'est scandaleux !
Mme Conchita Lacuey. Cette baisse de plus de 60 % touche exclusivement 200 000 malades, les plus démunis, les plus pauvres, les exclus, puisque cette aide permet aux sans-papiers et aux SDF de se faire soigner.
M. François Goulard, rapporteur pour avis. C'est vous qui le dites !
Mme Conchita Lacuey. Sous prétexte de responsabilisation, vous pénalisez les plus démunis d'entre les plus démunis.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Comme toujours !
Mme Conchita Lacuey. Vous voulez mettre en place un ticket modérateur. Cette décision est lourde de conséquences.
En montrant du doigt celles et ceux qui font appel à la solidarité nationale, vous ne cherchez qu'à stigmatiser et à culpabiliser des personnes en grande difficulté. Vous voulez limiter l'accès aux soins médicaux indispensables.
M. Thierry Mariani. Caricature !
Mme Conchita Lacuey. En retardant ainsi la prise en charge de ces personnes, vous faites fi des objectifs de santé publique. Faute de soins précoces, il faudra traiter malheureusement avec retard des situations plus graves. Cela risque à terme de provoquer une augmentation des maladies contagieuses.
Cette décision est la parfaite illustration de votre double langage. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Alors que le Président de la République parle encore de la fracture sociale, qu'il voudrait réduire, la politique de son gouvernement l'aggrave.
M. Richard Mallié. C'est long !
Mme Conchita Lacuey. Il s'agit d'une véritable régression sociale. (« La question ! La question ! » et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mes questions sont simples. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pourquoi ces économies sur le dos des plus démunis ? Pourquoi négliger la santé publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Monsieur Goasguen, Mme Lacuey s'en est tenue à son temps de parole. Arrêtez de faire des gestes ! (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Claude Goasguen. Elle n'a pas posé de question !
M. le président. Il ne sert à rien de crier ! Mme Lacuey a respecté son temps de parole. J'y veille : tout le monde a droit au même temps. (Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la députée, lorsque l'aide médicale d'Etat a été créée en 2000, le Gouvernement avait budgété un peu plus de 50 millions d'euros pour en assurer le financement. En 2003, contrairement à ce que vous venez de me dire, 700 millions d'euros auront été utilisés pour les dépenses de l'aide médicale d'Etat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Richard Mallié. C'est un scandale ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous savez bien que cette situation ne saurait perdurer.
M. Richard Mallié. Il faut arrêter !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Comment réduire la dépense ? Il convient d'abord de lutter implacablement contre l'immigration irrégulière. C'est la première des priorités, car cela permettra, à terme, de diminuer significativement la dépense de l'aide médicale d'Etat.
M. André Gerin. Mais pas les mafias !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ainsi que vous le savez, j'avais, avec M. Mattei, confié à l'IGAS le soin d'élaborer un rapport sur ce sujet. Ses conclusions ont montré que, au-delà du volume d'immigration irrégulière qui génère une partie de cette dépense, on relève beaucoup d'abus quant à l'utilisation de l'aide médicale d'Etat.
Mme Chantal Brunel et M. Michel Bouvard. Tout à fait !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Suivant ses suggestions, nous avons décidé de mettre en place un meilleur contrôle de l'ouverture des droits. Nous venons ainsi de transmettre au Conseil d'Etat un décret qui permettra en particulier d'éviter la fraude généralisée à l'identité, puisque l'on peut actuellement bénéficier de l'AME en présentant une simple photocopie d'un document sans photographie d'identité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Pascal Terrasse. Qu'en pense le Vatican ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ensuite, le Gouvernement entend mettre en place, comme cela est naturel, un ticket modérateur, dont l'instauration a été votée par le Parlement en 2002. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. Monsieur Bonrepaux, évitez de hurler, cela ne sert à rien !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce ticket modérateur sera d'un niveau modeste et nous prévoirons toutes les exceptions nécessaires.
M. Pascal Terrasse. Qu'en pense le Vatican ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cela étant, mesdames, messieurs les députés, je pense que, dans le principe, les étrangers en situation irrégulière ne peuvent pas avoir des droits gratuits illimités plus favorables que ceux offerts à l'ensemble de la population. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Madame la députée, notre système de protection sociale peut être victime de sa générosité. L'ignorer serait être non seulement irréaliste, mais aussi irresponsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : Mme Conchita Lacuey
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : affaires sociales, travail et solidarité
Ministère répondant : affaires sociales, travail et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 octobre 2003