Question orale n° 1005 :
fermeture de classes

12e Législature

Question de : M. Pierre Bourguignon
Seine-Maritime (3e circonscription) - Socialiste

M. Pierre Bourguignon attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la fermeture de classes dans la 3e circonscription de la Seine-Maritime. Il fait part de son mécontentement et de son incompréhension en rappelant que de telles mesures vont à l'encontre des politiques municipales menées en faveur de l'éducation des jeunes et remettent en cause l'espoir des familles de voir leurs enfants accéder à une situation sociale meilleure. De surcroît, ces mesures concernent des villes de banlieues percevant la dotation de solidarité urbaine et des établissements classés en ZEP et font peu de cas des objectifs poursuivis en matière d'égalité des chances, ni des besoins des familles en terme d'éducation. D'autant que dans le même temps, M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale propose la mise en place d'équipes éducatives destinées à rétablir l'égalité effective des chances en s'attaquant à la source aux inégalités. Aussi, il lui demande ses intentions à ce sujet.

Réponse en séance, et publiée le 19 janvier 2005

FERMETURE DES CLASSES EN SEINE-MARITIME

M. le président. La parole est à M. Pierre Bourguignon, pour exposer sa question, n° 1005, relative à la fermeture des classes en Seine-Maritime.
M. Pierre Bourguignon. Monsieur le ministre délégué à la recherche, puisque vous représentez M. le ministre de l'éducation nationale, j'attire votre attention sur le fait que cette année, en Seine-Maritime, soixante postes d'enseignants dans l'élémentaire et le pré-élémentaire seront " à rendre ", pour utiliser le vocabulaire administratif.
Dans la troisième circonscription de la Seine-Maritime - circonscription très populaire, qui comprend quatre villes, exige beaucoup de travail en termes de politique de la ville et de politique sociale, et demande une forte concertation entre les services intervenant, notamment ceux de l'éducation nationale et de la jeunesse et des sports -, cinq classes se trouvent ainsi menacées, dont une à Sotteville.
Comment parler d'aide aux enfants en difficulté, alors que de telles mesures vont à l'encontre des politiques municipales menées d'année en année avec les intervenants de l'éducation nationale en faveur de l'éducation des jeunes ? Comment parler de réduction des inégalités alors que de telles décisions remettent en cause l'espoir des familles de voir leurs enfants accéder à une situation sociale meilleure ?
Dans ce grand secteur urbain, nous savons, pour l'avoir vérifié dans la pratique, qu'une bonne organisation du travail en matière d'éducation et de relations avec les intervenants, grâce à des politiques municipales et nationales coordonnées, profite aux moins favorisés.
Les sureffectifs des classes, vous le savez, ne permettent pas aux professeurs de s'attacher autant qu'ils le souhaiteraient au développement intellectuel des élèves, ainsi qu'aux problèmes de motivation. Pourtant, chacun s'accorde à le dire, si elle était favorisée par des effectifs moins importants, la détection des difficultés en amont par les enseignants et les équipes éducatives conduirait à une plus grande efficacité de la prise en charge des élèves.
Je ne trouve plus guère de cohérence dans la carte scolaire de Seine-Maritime, en particulier dans le secteur urbain qui me préoccupe, alors que, selon les chiffres de l'éducation nationale et pour reprendre son vocabulaire - qui n'est pas le mien -, il s'agit d'un secteur " à taux de réussite très fragile ".
Je l'ai constaté sur le terrain dans la circonscription de Sotteville, dont je suis maire et que je connais bien, plus on met en oeuvre des politiques municipales et partenariales intelligentes, moins l'éducation nationale fait d'efforts. C'est même dans notre secteur que les restrictions deviennent les plus fortes.
C'est aujourd'hui un jour terrible, qui voit l'annonce de cette mesure au niveau départemental. Je ne trouve, je le répète, aucune cohérence dans l'action du Gouvernement. Aucune concertation n'a été menée avec les acteurs de terrain et je n'ai toujours pas rencontré le nouvel inspecteur d'académie, vice-recteur.
Je ne demande aucune " calinothérapie ", monsieur le ministre. J'ai seulement besoin de réponses précises.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la recherche.
M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche. Monsieur le député, vous interrogez M. le ministre de l'éducation nationale, retenu par d'autres obligations, sur les effectifs en Seine-Maritime.
Vous le savez, la répartition des emplois au niveau national prend en compte un certain nombre de critères, parmi lesquels l'évolution de la démographie, le taux d'encadrement constaté l'année précédente et les critères sociaux et de ruralité.
Les prévisions d'effectifs pour la rentrée de 2005 dans le département de la Seine-Maritime sont en diminution de 549 élèves. D'ailleurs, des modifications de répartition démographique sont probablement intervenues entre les communes. Il est en effet de notoriété publique - il en va ainsi presque partout en France - que les communes qui forment les noyaux centraux des agglomérations connaissent une diminution des effectifs, souvent au bénéfice de communes plus rurales, situées en bordures des agglomérations, où sont implantés de nouveaux lotissements habités par des familles plus jeunes. Le vieillissement de la population des grandes villes pose évidemment problème sur le plan scolaire.
Si le département de la Seine-Maritime se voyait retirer soixante emplois, le taux d'encadrement - c'est-à-dire le nombre d'enseignants pour cent élèves - resterait cependant supérieur à celui de la moyenne nationale, puisqu'il atteindrait 5,37, soit une moyenne de 18,6 élèves par classe.
Quoi qu'il en soit, monsieur le député, l'éducation nationale est encore pour le moment dans une phase préparatoire de travail, de simulations et d'études. C'est pourquoi je ne parle encore qu'au conditionnel.
Les mesures envisagées pour la rentrée ne seront arrêtées que dans quelques semaines, pas avant le début du mois de février. Elles s'appuieront sur des règles d'équité départementale qui intègrent bien évidemment l'appartenance ou non à des zones d'éducation prioritaire, afin de prendre en compte les difficultés sociales bien connues de certains quartiers ou de certaines communes.
Mais je le répète : l'inspecteur d'académie n'en est qu'à la phase d'étude et de concertation, à laquelle les élus seront bien évidemment associés. Ainsi, en ce qui concerne plus particulièrement le secteur de Sotteville-les-Rouen, il rencontre aujourd'hui même l'ensemble des partenaires et sera, nous vous l'assurons, particulièrement attentif aux arguments que vous développez concernant les établissements scolaires de votre circonscription.
M. le président. La parole est à M. Pierre Bourguignon.
M. Pierre Bourguignon. Je vous remercie pour ces précisions, monsieur le ministre. J'attire votre attention sur le fait que, précisément, les secteurs dont la situation est la plus préoccupante et pour lesquels on prévoit aujourd'hui des fermetures se situent dans des villes de banlieue qui comptent des populations jeunes et bénéficient donc d'une DSU forte et que les établissements qui seront touchés - je pense notamment à une école primaire de Sotteville-lès-Rouen - sont classés soit en zone d'éducation prioritaire, soit en zone urbaine sensible.
L'année dernière, déjà, une décision identique avait été prise, de sorte que, dans les secteurs en question, les classes de maternelle, qu'elles se situent en ZEP ou en ZUS, comptent chacune trente élèves. Je suis d'autant plus surpris que l'éducation nationale poursuive cette action sidérante que, dans le même temps, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale se retourne vers nous pour la mise en oeuvre du volet de son plan consacré à la création d'équipes éducatives destinées théoriquement à rétablir l'égalité effective des chances en " s'attaquant à la source des inégalités ". Où est la cohérence entre le travail du ministère de l'éducation nationale et les actions du ministère de l'emploi ? Mes préoccupations demeurent.

Données clés

Auteur : M. Pierre Bourguignon

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement maternel et primaire

Ministère interrogé : éducation nationale

Ministère répondant : éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 janvier 2005

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