tribunaux d'instance
Question de :
M. Pascal Terrasse
Ardèche (1re circonscription) - Socialiste
M. Pascal Terrasse interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation de la justice dans la juridiction du tribunal d'instance de Privas. La justice manque de moyens et de personnels. Son budget ne permet plus de gérer le quotidien ni de faire face aux besoins résultant de l'inflation des textes législatifs, pas plus qu'il ne permet de rendre la justice dans des délais acceptables. Le manque de magistrats et la vétusté de certains tribunaux se fait cruellement ressentir. Ainsi, dans la juridiction de Privas, la gestion du personnel est telle qu'elle ne permet aucune anticipation des départs, les services restant des mois entiers dans l'attente des nouvelles nominations. Malgré l'installation récente d'un nouveau juge pour enfants, le tribunal de Privas connaît un niveau d'affaires qui justifierait un renforcement du nombre de postes de magistrats. Ce n'est pas le recrutement, par ailleurs largement discuté, de nouveaux juges de proximité qui viendra combler ces carences. D'autres mesures, plus significatives de l'attention qu'il porte à la situation des tribunaux, sont attendues. S'agissant des locaux, les personnels administratifs comme les magistrats perdent patience à attendre désespérément que leur appel à bénéficier de bureaux adaptés à leurs besoins soit entendu. Outre le fait qu'ils ne permettent pas aux personnels de travailler dans des conditions décentes, les locaux du tribunal d'instance s'avèrent totalement inadaptés à l'accueil du public. Il lui demande quels sont les moyens qu'il entend débloquer pour que la justice soit enfin rendue dans de bonnes conditions dans la juridiction de Privas.
Réponse en séance, et publiée le 2 mars 2005
FONCTIONNEMENT DU TRIBUNAL D'INSTANCE
DE PRIVAS
M. Pascal Terrasse. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
La justice manque de moyens et de personnels, ce n'est pas nouveau. Son budget est aujourd'hui en tel décalage avec les réalités qu'il ne permet plus de gérer le quotidien ni de faire face aux besoins résultant de l'inflation des textes législatifs. Le manque de magistrats et la vétusté de certains tribunaux se font cruellement ressentir. Dans certaines juridictions, la situation devient telle qu'il n'est plus possible de garantir à nos concitoyens que la justice sera rendue dans des conditions élémentaires de sérénité et dans des délais acceptables.
Dans la juridiction de Privas - que je connais particulièrement bien -, on déplore ainsi de graves carences en personnels tant au niveau des fonctionnaires des greffes que des magistrats. Avec 2 376 affaires jugées en correctionnelle en 2004, le tribunal de grande instance de Privas connaît un niveau d'affaires qui justifie la demande, exprimée depuis plusieurs années, de créer un second poste de magistrat. Au niveau du parquet, les services ont connu ces derniers mois le départ plusieurs collaborateurs non remplacés, ce qui accroît de façon critique la pression déjà forte dans les services. La gestion du personnel est telle qu'elle ne permet aucune anticipation des départs, les services restant des mois entiers dans l'attente d'une nouvelle nomination.
Certes, les premières semaines de l'année 2005 ont vu l'installation d'un nouveau juge pour enfants à Privas ; mais cette nomination attendue ne suffira pas à compenser les nombreux départs et ne permettra pas, si elle reste isolée, de couvrir l'ensemble des besoins qui résultent de l'accroissement des tâches administratives autant que de l'inflation du nombre des affaires traitées : plus de 10 % pour les affaires civiles en 2004.
Ce n'est pas le recrutement, par ailleurs largement discuté, de nouveaux juges de proximité qui viendra combler ces carences. Le moment venu, il faudra procéder à un état des lieux, tant il est vrai que cette expérience fut un échec retentissant. D'autres mesures, plus significatives de l'attention portée à la situation des tribunaux, sont attendues.
S'agissant des locaux, la juridiction de Privas attend avec impatience les travaux d'agrandissement et de modernisation de la salle d'audience du tribunal d'instance. Dans le même temps, personnels administratifs et magistrats perdent patience à attendre désespérément que leur appel à bénéficier de locaux adaptés à leurs besoins soit entendu. Les locaux actuels sont étroits, inadaptés à l'accueil du public, inaccessibles aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, et insuffisants au regard de l'activité de la juridiction.
Outre les conditions de travail des fonctionnaires de la justice, qui font pourtant preuve d'un grand dévouement, c'est l'ensemble du service rendu aux justiciables de l'Ardèche qui souffre de cette situation.
Ce problème est connu depuis de nombreuses années. J'ai à plusieurs reprises, avec le président du conseil général et les autres parlementaires du département, appelé l'attention de la chancellerie sur ce point. M. le garde des sceaux, en déplacement à Privas, avait à cet égard fait des annonces il y a plusieurs années. Malheureusement, les réponses se font toujours attendre, en dépit des promesses faites aux magistrats et aux élus.
Aussi, je demande au Gouvernement quels moyens concrets il entend débloquer pour que la justice soit enfin rendue dans de bonnes conditions dans la juridiction de Privas, représentant l'ensemble du département de l'Ardèche.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion.
Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Monsieur le député, la chancellerie suit avec une particulière attention l'évolution des effectifs des juridictions de Privas.
Le tribunal de grande instance de Privas comprend un effectif budgétaire de treize magistrats du siège et quatre magistrats du parquet. Le prochain départ de quatre magistrats du siège a été anticipé et ces magistrats seront aussitôt remplacés par deux collègues arrivant en mutation et deux auditeurs issus de 1' École nationale de la magistrature.
Concernant les magistrats du parquet, deux départs sont prévus, mais, là encore, ils seront compensés par deux arrivées : l'effectif reste donc complet.
Le garde des sceaux a en outre décidé de renforcer cette juridiction par la création d'un poste supplémentaire de juge d'instance.
En ce qui concerne les fonctionnaires, les effectifs budgétaires du tribunal de grande instance et du tribunal d'instance ont augmenté au cours des dernières années et sont aujourd'hui supérieurs à l'évaluation de la charge de travail.
Actuellement, il est vrai, un des deux postes de greffier en chef n'est pas occupé, car le titulaire est suspendu de ses fonctions, mais le garde des sceaux a demandé qu'une nomination soit décidée en surnombre pour compenser cette absence, dès la prochaine commission administrative paritaire de mobilité qui se tiendra en mai prochain.
Les emplois budgétaires de greffiers correspondent à l'effectif réel. Deux postes seront offerts à la prochaine commission administrative paritaire, en compensation des temps partiels.
Enfin, un poste actuellement vacant de personnel technique sera offert au prochain mouvement de mutation.
Sensibles à la situation du tribunal de grande instance de Privas, les chefs de cour d'appel y ont délégué un greffier placé et deux personnels de bureau placés. Ce tribunal bénéficie également de la présence de trois agents de justice et de deux assistants de justice.
Le tribunal d'instance de Privas dispose quant à lui d'un surnombre dans le corps des greffiers. Seul demeure vacant un emploi de personnel de bureau, qui sera prochainement pourvu.
Je finirai en évoquant la situation immobilière du tribunal d'instance de Privas. Les locaux de la juridiction se répartissent entre le palais de justice et des bureaux loués, comme vous le savez, à proximité immédiate. Ceux-ci, situés au premier étage d'un immeuble ancien, sont vétustes et exigus et ne communiquent pas directement avec le palais, où la juridiction d'instance tient ses audiences.
Ces locaux, vous l'avez souligné, présentent effectivement des désordres qui ont conduit les chefs de juridiction, avec l'appui de l'antenne régionale de l'équipement d'Aix-en-Provence et de la direction départementale de l'équipement de l'Ardèche, à rechercher un nouveau site pour reloger le tribunal d'instance. Les services municipaux ont également été sollicités. Ces recherches sont demeurées, hélas, infructueuses jusqu'à présent, mais se poursuivent activement, je peux vous l'assurer.
En outre, je vous informe qu'une étude de schéma directeur immobilier portant sur l'ensemble du patrimoine judiciaire de la cour d'appel de Nîmes sera engagée au cours du second semestre 2005 et permettra de définir une programmation pluriannuelle cohérente des investissements immobiliers futurs du ministère de la justice dans ce ressort.
M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
M. Pascal Terrasse. J'entends bien les propositions qui sont faites en matière de nominations. Mais au-delà des annonces, quatre magistrats du siège et deux magistrats du parquet, le plus important est de connaître les dates de leur prise de fonction. Je suis bien sûr intimement convaincu qu'ils seront remplacés un jour. La question est de savoir quand. Or il n'a pas été répondu à cette question. J'espère néanmoins qu'ils le seront dans les meilleurs délais.
Au-delà de ces remplacements parfaitement légitimes, la difficulté repose sur l'insuffisance des moyens en personnel. Or la réponse apportée n'est pas satisfaisante, même si j'ai bien noté qu'un greffier en chef en surnombre serait affecté par la cour d'appel de Nîmes : j'en suis ravi, mais j'espère que ces emplois seront pourvus rapidement.
S'agissant des problèmes immobiliers, j'entends bien les réponses de l'administration. Mais il faut être sérieux : le conseil général de l'Ardèche dont j'assure la première vice-présidence, est disposé, dès demain, à mettre des locaux à la disposition du tribunal, s'il le faut. Et les services le savent. Si demain, la cour d'appel de Nîmes nous demande des locaux, nous les mettrons à disposition. Il appartiendra ensuite à la chancellerie de faire les travaux et les aménagements nécessaires. Les mètres carrés sont là pour la juridiction de Privas. On ne peut donc pas dire qu'il faut attendre un audit pour agir. S'il y a une réelle volonté politique, madame la ministre, pour répondre aux besoins, nous pouvons inaugurer ensemble les locaux avant la fin de l'année.
Auteur : M. Pascal Terrasse
Type de question : Question orale
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 1er mars 2005