installations classées
Question de :
M. Simon Renucci
Corse-du-Sud (1re circonscription) - Socialiste
M. Simon Renucci interroge Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur les conséquences juridiques et pratiques de la mise en oeuvre des directives Seveso. La société Gaz de France exploite, à Ajaccio, un centre de stockage de gaz combustibles liquéfiés situé dans le quartier du Loretto, et la société Antargaz exploite celui qui est au Ricanto. En outre, dans le cadre de la directive Seveso II, une nouvelle installation a dû être prise en compte ; il s'agit des dépôts pétroliers de la Corse (DPLC), centre de stockage d'hydrocarbures, situés au Vazzio. L'Etat a imposé des périmètres de protection majorés sur les trois sites concernés : à titre d'exemple le plus grand a un diamètre de trois kilomètres. Les surfaces gelées en zone urbaine dépassent mille hectares. Or, les zones U du POS, c'est-à-dire celles qui ont vocation à accueillir des constructions, représentent exactement 1 149 hectares. Voilà qui donne la mesure des conséquences préjudiciables pour Ajaccio de la mise en oeuvre des directives communautaires dont il ne discute pas le bien-fondé. Il apparaît de surcroît qu'en cas d'explosion, les services de sécurité seront dans l'impossibilité de faire évacuer correctement et rapidement les 12 000 à 15 000 personnes résidant au voisinage de ces sites. Sur ce sujet, plusieurs réunions de travail ont eu lieu avec le préfet. La seule solution envisageable pour assurer à la fois la sécurité et le développement, c'est la délocalisation et l'enfouissement des installations dangereuses. Telle est la conclusion de principe qui peut être tirée des dernières réunions que nous avons eues avec les exploitants et les services de l'Etat. Il lui demande d'intervenir pour que la délocalisation et l'enfouissement soient réalisés dans les meilleurs délais.
Réponse en séance, et publiée le 5 février 2003
CONSÉQUENCES DE LA MISE EN OEUVRE
DES DIRECTIVES SEVESO À AJACCIO
M. le président. La parole est à M. Simon Renucci, pour exposer sa question, n° 109, relative aux conséquences de la mise en oeuvre des directives Seveso à Ajaccio.
M. Simon Renucci. C'est en ma double qualité de représentant de la nation et de maire d'Ajaccio, président de la communauté d'agglomération du pays ajaccien, que je souhaite vous interroger, madame la ministre de l'écologie et du développement durable, sur les conséquences juridiques et pratiques de la mise en oeuvre des directives dites « Seveso ».
La société Gaz de France exploite à Ajaccio un centre de stockage de gaz combustible liquéfié situé au coeur de la ville, dans le quartier du Loretto, et la société Antargaz exploite celui qui est situé au Ricanto. De plus, dans le cadre de la directive Seveso II, une nouvelle installation a dû être prise en compte ; il s'agit de Dépôts pétrolier de la Corse, DPLC, centre de stockage d'hydrocarbures situé au Vazzio. L'Etat a imposé des périmètres de protection majorés sur les trois sites concernés, dont le plus grand a un diamètre de trois kilomètres.
Les surfaces gelées en zone urbaine dépassent mille hectares. Or les zones U du plan d'occupation des sols, c'est-à-dire celles qui ont vocation à accueillir des constructions, représentent exactement 1 149 hectares. Voilà qui donne la mesure des conséquences préjudiciables pour notre ville de la mise en oeuvre des directives communautaires dont, je le précise, je ne discute pas le bien-fondé.
Il apparaît de surcroît qu'en cas d'explosion les services de sécurité seront dans l'impossibilité de faire évacuer correctement et rapidement les 12 000 à 15 000 personnes résidant au voisinage de ces sites. Sur ce sujet, plusieurs réunions ont eu lieu avec la préfecture.
La seule solution propre à assurer à la fois la sécurité et le développement est la délocalisation et l'enfouissement des installations dangereuses.
C'est pourquoi je vous demande, madame la ministre, d'intervenir, avec toute l'autorité du Gouvernement de la République, pour que cette délocalisation et cet enfouissement soient réalisés dans les meilleurs délais. A cela je vois deux conditions, pour ne pas dire deux nécessités : une initiative forte de l'Etat pour organiser la concertation avec tous les partenaires concernés, notamment les collectivités et les industriels ; un fort engagement financier de l'Etat au nom de la solidarité nationale. Vous connaissez sans doute, madame la ministre, la situation financière extrêmement difficile de la commune d'Ajaccio qui m'a conduit à demander un audit dès mon élection : or celui-ci a révélé qu'elle était encore plus tendue que je ne l'imaginais.
Pour conclure, madame la ministre, je veux souligner que, comme votre ministère et tous nos concitoyens, je suis particulièrement attaché à notre environnement et à la sécurité des personnes.
Afin d'apaiser un sentiment d'inquiétude grandissant, je vous demande donc simplement de prendre de réels engagements, conformes aux annonces faites par le Gouvernement en faveur du développement économique de notre île. L'occasion en est remarquable, et vos actes seront remarqués.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur Renucci, j'ai noté avec intérêt que vous avez souligné tout le bien-fondé des mesures de sécurité prévues par la directive Seveso II. Je suis d'ailleurs à l'origine d'un durcissement des conditions imposées par cette directive, puisque c'est moi qui ai proposé à mes collègues européens, qui m'ont approuvée, d'abaisser le seuil de prise en compte des ammonitrates, à la suite de l'accident d'AZF Toulouse. Mais j'ai, bien entendu, conscience des problèmes que la prise en compte des risques engendrés par les installations Seveso pose dans votre ville.
J'ai donc adressé l'année dernière des instructions au préfet, visant à demander aux exploitants de réaliser des études technico-économiques en vue de réduire les risques technologiques liés aux installations, et in fine les périmètres de maîtrise de l'urbanisation.
Gaz de France doit réaliser une étude de ce type avant juillet 2003. Il devra également compléter son étude des dangers afin de prendre en compte les observations de l'inspection des installations classées avant février 2003, et la faire expertiser par un tiers indépendant avant juillet 2003. Vous le savez, c'est le cheminement prévu par la loi.
Selon les informations en ma possession, il semble qu'une solution de création de nouveaux réservoirs sous-talus sur le même site soit privilégiée, plutôt qu'une délocalisation avec mise en place de sphères neuves. Les risques associés à ce type d'installations industrielles seraient alors réduits. Des démarches similaires à celles de Gaz de France sont attendues pour les deux autres sites Seveso de votre commune. La réglementation ne me permet cependant pas d'imposer d'autorité une délocalisation.
Je souhaite que des décisions satisfaisantes et pérennes en matière de sécurité des populations riveraines puissent être arrêtées très vite dès l'été 2003. Ces solutions sont à rechercher avant tout dans le cadre de la réduction du risque à la source dans les installations existantes. En attendant, il est indispensable de tenir compte des conclusions des études de danger pour la gestion des sols autour des établissements à haut risque industriel.
Je me refuse à toute position dogmatique sur ce sujet. Il s'agit de garantir à la fois la sécurité de nos concitoyens et le maintien d'une activité industrielle et économique : vous avez vous-même signalé les difficultés de votre commune en ce domaine.
M. le président. La parole est à M. Simon Renucci.
M. Simon Renucci. Madame la ministre, la connaissance du dossier m'incite à formuler d'autres remarques, en écho aux questions que me posent les Ajacciens.
Premièrement, la mise sous-talus in situ, c'est-à-dire sans délocalisation, induit certes un périmètre de létalité de cent mètres mais pose aussi le problème du stockage en haut de la colline, entraînant le risque d'une boule de feu qui exercerait assez loin ses ravages, même avec un périmètre réduit à cent mètres.
Ensuite, nous avons souhaité, dans le cadre de l'aménagement de la ville, qu'il y ait un seul site de stockage de ce gaz, qui soit situé hors de la ville, ainsi qu'un seul lieu de dépotage, au lieu de deux actuellement, l'un au milieu de la baie et l'autre hors de la baie. Or, il me semble tout à fait cohérent pour la suite de réduire au minimum les risques. Malheureusement, et malgré l'engagement fort de l'Etat, la solution proposée est insuffisante pour mettre nos concitoyens à l'abri des risques majeurs qu'ils encourent.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je vous remercie, monsieur Renucci, de ce complément d'information.
Je vous signale que commence cet après-midi au Sénat l'examen de la loi sur les risques, tant industriels que naturels. Instruits par l'accident d'AZF Toulouse et conscients de la nécessité de protéger nos concitoyens qui vivent dans le périmètre d'installations de type Seveso, en particulier des 670 installations Seveso « seuil haut », nous allons prendre des mesures qui vont dans le sens que vous préconisez. N'en doutez pas, mes services vont examiner et évaluer avec une particulière attention les propositions de Gaz de France.
Auteur : M. Simon Renucci
Type de question : Question orale
Rubrique : Déchets, pollution et nuisances
Ministère interrogé : écologie
Ministère répondant : écologie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 février 2003