délocalisations
Question de :
M. Georges Colombier
Isère (7e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Georges Colombier interroge M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale sur les moyens de freiner les délocalisations, de favoriser un retour rapide à l'emploi des personnes licenciées et d'aider la réindustrialisation des sites. Aujourd'hui, de nombreux territoires et salariés sont confrontés aux délocalisations et vivent dans la crainte et l'angoisse que des projets de transferts d'activités ne soient mis à exécution. Il ne s'agit pas de cas isolés ou d'un phénomène ponctuel. Nous assistons bien à une nouvelle mutation sans précédent de l'économie mondiale qui ne peut laisser indifférent. Les pouvoirs publics sont perçus comme impuissants à apporter des remèdes efficaces et rapides d'autant plus que ces entreprises ont pu bénéficier de l'argent public au moment de leur implantation et réalisent souvent des bénéfices importants. Dans l'Isère, outre les fermetures d'usines liées aux mutations technologiques, on dénombre de plus en plus d'entreprises qui décident soit de transférer des pans entiers de leur activité, soit, tout simplement, de délocaliser l'ensemble de leur production vers des pays où la main-d'oeuvre est bon marché. Derrière ces pratiques, il y a des hommes et des femmes inquiets pour leur avenir et celui de leurs enfants. Les conséquences sociales sont souvent dramatiques. Et pourtant, on aurait tort de penser qu'il s'agit d'un phénomène inéluctable. Le Gouvernement, par la politique qu'il mène depuis deux ans et demi, a lancé plusieurs réformes importantes, notamment la mise en place dans le projet de loi de finances pour 2005 de mesures fiscales pour lutter contre les délocalisations et l'impulsion d'une politique industrielle et de recherche ambitieuse. Le Gouvernement oeuvre également à l'échelle européenne, conscient que ces actions ne seront pleinement bénéfiques que si elles s'accompagnent d'une véritable solidarité européenne qui passe par l'élimination du dumping fiscal et social à l'origine de distorsions déloyales. Néanmoins, face à ces pratiques contestables et à la détresse des salariés dont certains cumulent souvent les difficultés liées à l'âge et au faible niveau de qualification, trois questions se posent. Il lui demande quels moyens peuvent être envisagés pour éviter que les entreprises ne deviennent des « chasseurs de primes publiques », quels moyens l'État peut mettre en oeuvre pour apporter une réponse immédiate aux problèmes d'emploi et favoriser au plus vite le retour à l'activité, et comment l'on peut aider la réindustrialisation de ces sites.
Réponse en séance, et publiée le 6 avril 2005
CONSEQUENCES POUR L'EMPLOI
DES DELOCALISATIONS D'ENTREPRISES
M. Georges Colombier. Madame la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion, de nombreux territoires et salariés sont aujourd'hui confrontés aux délocalisations et vivent dans la crainte et l'angoisse que des projets de transferts d'activité ne soient mis à exécution.
Il ne s'agit pas de cas isolés ou d'un phénomène ponctuel. Non, nous assistons bien à une mutation sans précédent de l'économie mondiale. Nous ne pouvons rester indifférents devant ce phénomène qui tend à renforcer la précarité.
Les pouvoirs publics sont perçus comme impuissants à apporter des remèdes efficaces et rapides, d'autant plus que ces entreprises ont pu bénéficier de l'argent public au moment de leur implantation et réalisent souvent des bénéfices importants.
Dans l'Isère, outre les fermetures d'usines liées aux mutations technologiques, on dénombre de plus en plus d'entreprises qui décident soit de transférer des pans entiers de leur activité, soit, tout simplement, de délocaliser l'ensemble de leur production vers des pays où la main-d'oeuvre est bon marché.
Je ne citerai que deux exemples récents, celui d'une entreprise spécialisée dans les textiles industriels, et celui d'une entreprise de fabrication de micro-ordinateurs. La première va laisser un peu moins de 100 salariés sur le bord de la route, et dans la seconde, 600 salariés seront directement touchés, sans compter les emplois indirects.
Derrière ces chiffres, il y a des hommes et des femmes inquiets pour leur avenir et celui de leurs enfants. Les conséquences sociales sont souvent dramatiques. Pourtant, on aurait tort de penser qu'il s'agit d'un phénomène inéluctable. Le Gouvernement a, depuis deux ans et demi, lancé plusieurs réformes importantes, notamment la mise en place dans le projet de loi de finances pour 2005 de mesures fiscales pour lutter contre les délocalisations et l'impulsion d'une politique industrielle et de recherche ambitieuse. Il oeuvre également à l'échelle de l'Union européenne, conscient que ces actions ne seront pleinement bénéfiques que si elles s'accompagnent d'une véritable solidarité européenne, passant par l'élimination du dumping fiscal et social à l'origine de distorsions déloyales.
Néanmoins, face à ces pratiques contestables et à la détresse des salariés, dont certains cumulent souvent les difficultés liées à l'âge et au faible niveau de qualification, trois questions se posent. Premièrement, quels moyens peuvent être envisagés pour éviter que les entreprises ne deviennent des " chasseurs de primes publiques " ? Deuxièmement, quels moyens l'État peut-il mettre en oeuvre pour apporter une réponse immédiate aux problèmes d'emploi et favoriser au plus vite le retour à l'activité ? Troisièmement, enfin, comment peut-on aider la réindustrialisation de ces sites ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion.
Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Monsieur le député, vous appelez l'attention du Gouvernement sur les fermetures d'usines liées aux mutations technologiques, les transferts d'activité et délocalisations et leurs conséquences sociales. À ce titre, vous souhaitez savoir quels sont les moyens envisagés pour éviter que les entreprises ne deviennent des " chasseurs de primes publiques " et pour apporter une réponse aux problèmes d'emploi, favoriser le retour à l'activité et aider à la revitalisation des sites concernés.
Plusieurs dispositifs ont été élaborés par le Gouvernement pour répondre à la préoccupation que vous exprimez.
S'agissant tout d'abord de la prévention des délocalisations, l'action publique se situe à plusieurs niveaux.
À titre défensif tout d'abord, la loi de finances 2005 prévoit d'accorder jusqu'en 2009 un crédit de taxe professionnelle de 1 000 euros par an et par salarié aux entreprises situées dans une zone d'emploi reconnue en grande difficulté au regard des délocalisations. La liste des zones éligibles est en cours d'élaboration et fera prochainement l'objet d'un arrêté ministériel.
S'agissant de l'aspect offensif, le CIADT du 14 septembre 2004 a marqué la volonté de relancer la politique industrielle française avec la mise en place de pôles de compétitivité. Sur un territoire donné, un pôle se définit comme une combinaison d'acteurs - entreprises, centres de recherche et de formation, collectivités territoriales - engagés autour de projets communs à caractère innovant. Les pôles labellisés bénéficieront d'exonérations partielles d'impôts sur les bénéfices, de cotisations de taxe professionnelle, de taxe foncière ou de cotisations sociales. Les 105 dossiers présentés en réponse à l'appel à projets lancé fin novembre 2004 sont en cours d'instruction, et la labellisation aura lieu lors d'un CIADT qui se tiendra avant la fin du premier semestre. La région Rhône-Alpes a, à ce titre, déposé dix-neuf projets qui seront examinés avec attention.
S'agissant des mesures d'accompagnement des salariés et de revitalisation des bassins d'emploi, la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 comprend des dispositions nouvelles qui visent notamment à encourager, au sein des entreprises et des branches, le développement d'une gestion prévisionnelle de l'évolution des emplois et des compétences ainsi que l'anticipation des mutations ; à renforcer les garanties offertes à l'ensemble des salariés, en particulier dans les petites et moyennes entreprises, en cas de licenciement économique, avec la création de la convention de reclassement personnalisé ; à remédier aux effets déstabilisateurs que peuvent avoir certaines opérations de restructuration à l'échelle d'un bassin d'emploi, avec l'obligation pour les entreprises ou groupes d'entreprises employant plus de 1 000 salariés de prendre des mesures correctrices favorisant l'implantation d'activités nouvelles.
Les textes d'application d'une partie de ces mesures sont en cours d'élaboration. La négociation des partenaires sociaux sur la convention de reclassement personnalisé est sur le point d'aboutir, et plusieurs autres mesures sont déjà mises en oeuvre. C'est ainsi que le ministre délégué aux relations du travail a signé, avec les élus et les acteurs économiques locaux, une convention de revitalisation du bassin d'emploi de Reims particulièrement innovante.
Vous voyez donc que le Gouvernement n'est pas inactif dans le domaine des mutations économiques, au niveau français comme au niveau européen. Le ministre délégué aux relations du travail participe en effet, le 8 avril prochain à Luxembourg, à une importante réunion des ministres de l'emploi de l'Union européenne qui traitera de ce sujet. Il aura à coeur, monsieur le député, de relayer vos préoccupations, de débattre avec ses homologues de l'anticipation et de la gestion des restructurations et de demander à la Commission européenne d'améliorer la surveillance sectorielle des mutations économiques et les outils financiers qui, comme les fonds structurels européens, ont été élaborés pour y faire face.
M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.
M. Georges Colombier. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Je sais que ces problèmes mobilisent toute votre attention et votre énergie, et bien sûr celles du ministre de l'emploi. En la matière, je le reconnais, rien n'est simple. Le Gouvernement est loin d'être insensible et inactif pour venir en aide aux personnes ainsi mises en difficulté, et pour faire en sorte que les entreprises restent durablement en France et trouvent dans notre pays les meilleures conditions pour se développer et créer de l'emploi.
Auteur : M. Georges Colombier
Type de question : Question orale
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : emploi
Ministère répondant : emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 avril 2005