viticulteurs
Question de :
M. Patrice Martin-Lalande
Loir-et-Cher (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Patrice Martin-Lalande interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. La viticulture de Loir-et-cher, tout particulièrement l'appellation Touraine, se trouve dans une situation d'une gravité sans précédent. Un certain nombre de viticulteurs cessent leur activité et la plupart des autres viticulteurs sont gravement inquiets pour l'avenir de leur exploitation. Comme cela a été examiné en avril 2005 lors d'une réunion avec le ministre, un certain nombre de mesures d'urgence sont nécessaires pour permettre de faire face aux cas sociaux les plus désespérés et pour donner leur chance de poursuite d'activité à des exploitations gravement touchées. Au-delà de ces mesures d'urgence, des mesures d'accompagnement et de soutien pour faire évoluer les modes d'exploitation et de commercialisation des vins de Loir-et-Cher sont elles aussi indispensables, dans les plus brefs délais, pour reconquérir des marchés, notamment à l'exportation, et pour assurer la viabilité économique des entreprises viticoles. Il lui demande comment le Gouvernement compte agir pour répondre dans les meilleurs délais à ces attentes de la profession et aussi de l'économie d'un département marqué par la viticulture.
Réponse en séance, et publiée le 1er mars 2006
VITICULTURE EN LOIR-ET-CHER
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour exposer sa question, n° 1458.M. Patrice Martin-Lalande. Nous serons heureux, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, de vous accueillir en Loir-et-Cher à la fin de la semaine.
Le Gouvernement - et tout particulièrement Dominique Bussereau, retenu au salon de l'agriculture - est conscient de l'extrême gravité de la situation viticole et mobilisé pour apporter des solutions appropriées, dans l'urgence comme sur le long terme, en concertation avec la profession.
La viticulture de Loir-et-Cher, tout particulièrement l'appellation Touraine, que vous dégusterez en fin de semaine se trouve dans une situation d'une gravité sans précédent : 30 % des viticulteurs risquent de disparaître ! Face à cette catastrophe, la Fédération des associations viticoles de Loir-et-Cher, présidée par André Coutoux, a adressé aux pouvoirs publics, le 15 février, une motion demandant un certain nombre de réformes et de moyens pour adapter l'offre aux nouveaux marchés et pour parer aux difficultés conjoncturelles les plus graves.
J'ai tenu la semaine dernière une nouvelle réunion de concertation avec les principaux responsables viticoles. Mes questions, auxquelles j'associe mes collègues de Loir-et-Cher, portent sur les points clés de la motion. La Confédération des vignerons du Val de Loire a validé un projet de nouvelle offre de ses vins. Ce projet de nouvelle segmentation suppose des adaptations réglementaires. Quand le Gouvernement prendra-t-il position sur ce projet et adaptera-t-il les textes en vigueur ? Les responsables viticoles demandent une réponse le plus rapidement possible, en mars, pour en permettre 1'application dès la prochaine récolte.
Lorsque la nouvelle offre de vins de qualité adaptés au goût des consommateurs étrangers sera acquise, une nouvelle politique de l'aide à l'exportation devra être mise en oeuvre. L'Italie soutient deux fois plus l'exportation que la France et nos banques sont trop frileuses face à la conquête de ces nouveaux marchés. Le Gouvernement est-il favorable à un redéploiement des politiques de soutien, notamment européennes, au profit des aides à la commercialisation ?
Au titre des mesures conjoncturelles de soutien aux exploitations, que compte faire le Gouvernement pour le maintien du guichet unique, pour l'ensemble des dettes fiscales et sociales, avec, sur le plan fiscal, la non-prise en compte de l'excédent anormal de stock - une récole complète n'a pas été vendue chez certains viticulteurs -, pour l'allongement à vingt-quatre mois de la durée des échéanciers de paiement dans les cas les plus graves et, enfin, pour le maintien d'une enveloppe d'aide au départ en préretraite ou en reconversion professionnelle ? Afin d'assurer l'assainissement et l'équilibre du marché, comment le Gouvernement entend-il obtenir de l'Union européenne une mesure exceptionnelle de dégagement du marché ? Par exemple, en Loir-et-Cher, nous avons besoin, pour les AOC et les vins de pays, du double de distillation par rapport à 2005. Que compte faire le Gouvernement en vue de compléter des crédits européens insuffisants pour faire fonctionner l'indispensable régime de restructuration et de reconversion ? Comment prendra-t-il en charge les frais de mutation des parcelles à échanger afin de sauvegarder les meilleurs terroirs, alors que certaines vignes vont être abandonnées ? Il faudrait aussi autoriser les changements de parcelles dans les contrats d'agriculture durable.
Je vous remercie de montrer par vos réponses que le Gouvernement est convaincu que la place de la viticulture française est et doit rester la première dans le nouveau marché mondialisé.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire
M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le député, le ministre de l'agriculture m'a chargé de vous transmettre sa réponse.
Alors que le secteur viticole est confronté à une crise profonde touchant plusieurs bassins de production, vous lui faites part de votre inquiétude concernant la situation du Loir-et-Cher. Comme vous le savez, le Gouvernement a mis en place en 2005 plusieurs mesures d'aides d'urgence au secteur viticole : aides de trésorerie, prêts de consolidation, mesures agridiff, préretraites. Les exploitations du Loir-et-Cher ont pu notamment bénéficier en 2005 d'une enveloppe d'aides à la trésorerie de 240 000 euros. Pour répondre à la demande des organisations professionnelles agricoles, la prime à l'abandon définitif des superficies viticoles a été ouverte dans le Loir-et-Cher et près de 250 hectares vont bénéficier de l'aide européenne au titre de la campagne 2005-2006. Ce dispositif d'aides conjoncturelles sera très prochainement complété pour faire face aux besoins complémentaires recensés par la Direction départementale de l'agriculture et de la forêt.
La crise traversée par la filière viticole résulte aussi de tendances de fond : stagnation de la consommation dans l'Union européenne, concurrence des vins du Nouveau Monde sur nos marchés à l'exportation traditionnels notamment. Pour y faire face, il faut favoriser l'adaptation structurelle de la filière viticole et renforcer l'offre française afin de mieux l'adapter aux demandes des consommateurs. C'est pourquoi, à la demande du Premier ministre, le ministre de l'agriculture prépare pour la fin mars, avec l'ensemble des professionnels concernés, une stratégie nationale de développement pour la viticulture. L'évolution de l'organisation commune de marché, dont la révision est prévue en 2006, sera aussi une occasion de faire évoluer les aides européennes afin de les rendre plus favorables à l'aval de la filière et aux producteurs, l'objectif étant de permettre à la filière d'être plus compétitive et de mieux répondre aux demandes du marché.
Depuis le début de l'année, à la demande de Dominique Bussereau, les comités de bassin travaillent avec les préfets et les élus régionaux à la mise au point de mesures de gestion de l'offre, de restructuration du vignoble et de meilleure adaptation aux exigences commerciales et à l'exportation. Le préfet Bernard Pomel a été chargé de suivre et de coordonner les travaux des différents bassins. Ce travail de proposition avance avec efficacité et le Gouvernement pourra définir sans retard les règles de gestion de la campagne de l'année.
Les instances du bassin Vallée-de-la-Loire se sont réunies mercredi 22 février et un état de la situation a été dressé avec les responsables professionnels : certains vins sont en expansion, notamment les rosés et le vouvray. En revanche, les appellations rouges, dont celles de Touraine, connaissent des difficultés. Les professionnels de la filière sont décidés à s'organiser afin de renforcer une offre commune autour des vins de la vallée de la Loire. En effet, votre région possède une image forte qu'il s'agit de mieux exploiter et nous souhaitons les encourager dans cette voie. Toutefois, l'utilisation du nom ou d'une partie du nom d'une appellation pour désigner l'ensemble de la production viticole d'une région peut susciter des difficultés juridiques relativement à la protection des appellations d'origine contrôlées. Le ministre de l'agriculture et de la pêche a donc demandé à ses services une étude sur ce point et sur les évolutions éventuelles de la réglementation nécessaire pour prendre en compte votre demande. C'est à partir des travaux de tous les comités de bassin que Dominique Bussereau réunira une table ronde le 5 avril prochain afin de mettre au point un plan stratégique pour le développement de la viticulture avec les mesures d'accompagnement nécessaires à sa réussite.
Telles sont les réponses que je souhaitais vous apporter au nom du ministre de l'agriculture.
Je sais combien vous vous êtes mobilisé aux côtés de la filière viticole du Loir-et-Cher et plus particulièrement de votre circonscription. Comme vous l'avez rappelé, je me rendrai samedi prochain dans votre département.
M. Patrice Martin-Lalande. Nous vous attendons avec plaisir !
M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire. Vos initiatives pèseront, bien évidemment, sur celles que prendra le ministère de l'agriculture. Pour appuyer votre démarche, je préciserai à vos côtés les ambitions du Gouvernement en vue d'aider, au-delà de cette seule filière, l'ensemble du monde rural de Loir-et-Cher : nouveaux décrets d'application de la loi sur le développement rural en faveur des zones de revitalisation rurale ; mesures d'exonération de charges sociales, de taxe professionnelle ou de taxe foncière. J'annoncerai également un certain nombre de mesures concernant les nouveaux pôles d'excellence rurale de votre département : je sais que vous avez des candidatures à suggérer.
M. Patrice Martin-Lalande. Eh oui !
M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire. Le ministère de l'agriculture et celui de l'aménagement du territoire veilleront donc à ce que des réponses concrètes soient apportées à l'ensemble de vos administrés, chefs d'entreprise et exploitants.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
M. Patrice Martin-Lalande. Je vous remercie de votre réponse et de celle du ministre de l'agriculture, Dominique Bussereau. Vous nous détaillerez plus particulièrement la vôtre, monsieur Estrosi, lors de votre visite dans le Loir-et-Cher à la fin de cette semaine.
Je suis heureux de constater l'écoute et la mobilisation du Gouvernement sur la viticulture. Elle ne traverse pas une crise, mais une mutation profonde qui nécessite des mesures fortes et une véritable stratégie. J'espère que la table ronde du 5 avril permettra d'apporter des solutions applicables dès la prochaine récolte, car il y a urgence. Avec mes collègues parlementaires et les responsables viticoles du Loir-et-Cher, nous demanderons aussi à rencontrer de nouveau le ministre sur cette question vitale pour notre département comme pour notre pays. Que deviendrait la France sans sa viticulture ? Quelle tristesse !
Auteur : M. Patrice Martin-Lalande
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : agriculture et pêche
Ministère répondant : agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 février 2006