Question orale n° 1467 :
ZEP

12e Législature

Question de : M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - Union pour la Démocratie Française

M. Jean-Christophe Lagarde attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui concerne les grands axes de sa politique de relance de l'éducation prioritaire. Suite aux propositions qu'il a présentées le 13 décembre 2005, il a été annoncé le 8 février dernier la liste des établissements qui entreraient dès la rentrée 2006 dans la politique de relance de l'éducation prioritaire. Trois niveaux ont été retenus au sein de l'enseignement prioritaire. Le niveau EP1 est celui qui regroupe les collèges qui accueillent les élèves confrontés aux plus grandes difficultés scolaires et sociales. Ce sont les collèges que le Gouvernement a nommé « ambition réussite ». Le niveau EP2 correspond aux collèges qui resteront dans l'éducation prioritaire et correspond à peu près aux établissements classés actuellement en ZEP. Enfin le niveau EP3 concerne les collèges appelés à sortir de l'éducation prioritaire. Le niveau EP1, c'est-à-dire « ambition réussite », regroupe donc les établissements qui se verront attribuer des moyens accrus. Ce nouveau dispositif aura pour principal objectif d'aporter une aide supplémentaire, significative et personnalisée aux élèves en difficulté (classes réduites, études accompagnées, prise en charge d'élèves difficiles en petits groupes,...). Six critères ont été retenus afin de déterminer la liste des établissements « ambition réussite ». La part d'enfants issus de familles appartenant à des catégories socioprofessionnelles défavorisées, la part des élèves ayant des résultats faibles aux évaluations en 6e, la part d'élèves ayant un retard scolaire de deux ans en 6e, la part des parents bénéficiaires du RMI et la part des enfants ayant des parents non francophones. Or, dans la circonscription de Bobigny-Drancy, seul le collège République de Bobigny a été retenu pour intégrer le réseau « ambition réussite ». Pourtant la Seine-Saint-Denis concentre une population souvent en grande difficulté qui a notamment des répercussions sur le système éducatif et scolaire, et les villes de Drancy et de Bobigny ne sont pas épargnées par ce phénomène. C'est ainsi que le collège Auguste Delaune de Bobigny a été exclu de ce dispositif, qui regroupe 249 collèges, alors qu'il a été classé parmi les 134 établissements les plus défavorisés de France. Il en va de même pour les collèges Paul Langevin et Jacques Jorissen de Drancy qui n'ont pas été retenus alors qu'ils concentrent un nombre d'élèves en situation de difficultés ou d'échec scolaire nécessitant des moyens individualisés et supplémentaires, tel qu'en offre le réseau « ambition réussite ». C'est pourquoi, il lui demande, d'une part, les raisons et les critères précis qui l'ont conduit à ne pas retenir ces 3 établissements dans le cadre des réseaux « ambition réussite » et, d'autre part, si cette liste, établie sans concertation avec les élus, est amenée à évoluer d'ici la prochaine rentrée scolaire.

Réponse en séance, et publiée le 8 mars 2006

PERSPECTIVES DE L'EDUCATION PRIORITAIRE EN SEINE-SAINT-DENIS

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour exposer sa question, n° 1467, relative aux perspectives de l'éducation prioritaire en SSD.
M. Jean-Christophe Lagarde. En tant qu'élu de Seine-Saint-Denis, département où la relance de l'éducation prioritaire est éminemment nécessaire, je souhaite vous interroger, monsieur le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur les grands axes de votre politique en la matière.
Suite aux propositions que vous avez présentées le 13 décembre 2005, vous avez annoncé, le 8 février dernier, la liste des établissements qui seront concernés, dès la rentrée 2006, par la politique de relance de l'éducation prioritaire.
Trois niveaux ont été retenus au sein de l'enseignement prioritaire : le niveau EP1, qui regroupe les collèges accueillant les élèves confrontés aux plus grandes difficultés scolaires et sociales - ce sont les collèges que le Gouvernement a nommés " ambition réussite " ; le niveau EP2, qui correspond aux collèges qui resteront dans l'éducation prioritaire et recoupe à peu près l'actuel classement en ZEP - vous êtes d'ailleurs venu à Bobigny pour affirmer qu'aucun collège de Seine-Saint-Denis ne serait déclassé d'ici à la prochaine rentrée scolaire ; enfin le niveau EP3 qui concerne les collèges appelés à sortir de l'éducation prioritaire.
Le niveau EP1 - c'est-à-dire " ambition réussite " - regroupe donc en réalité les établissements qui seuls se verront attribuer des moyens accrus. Ce nouveau dispositif a pour principal objectif d'apporter une aide supplémentaire - ô combien nécessaire -, significative et personnalisée aux élèves en difficulté : classes réduites, études accompagnées, prise en charge en petits groupes d'élèves difficiles ou rencontrant des difficultés ponctuelles, etc.
Différents critères ont été retenus afin de déterminer la liste des établissements labellisés " ambition réussite " : la part des enfants issus de familles appartenant à des catégories socioprofessionnelles défavorisées, celle des élèves ayant des résultats faibles aux évaluations ou accusant un retard scolaire de deux ans en 6e, celle des parents bénéficiaires du RMI et celle des enfants ayant des parents non francophones.
Or, à ma grande surprise, et à celle de toute la communauté éducative, dans la circonscription dont je suis l'élu, Bobigny-Drancy, seul le collège République de Bobigny a été retenu pour intégrer le réseau " ambition réussite ", en tout cas dans une première liste.
Pourtant, la Seine-Saint-Denis concentre, vous le savez bien, monsieur le ministre, une population souvent en grande difficulté, ce qui a notamment des répercussions sur le système éducatif et scolaire ; et les villes de Drancy et de Bobigny ne sont malheureusement pas épargnées par ce phénomène.
Ainsi le collège Auguste-Delaune de Bobigny a été exclu de ce dispositif, qui concernera 249 collèges, alors même qu'il a été classé parmi les 134 établissements les plus défavorisés de France. On s'interroge sur la cohérence de ces deux classements ! Il en va de même pour les collèges Paul-Langevin et Jacques-Jorissen de Drancy qui n'ont pas été retenus non plus, alors qu'ils concentrent un nombre d'élèves en situation de difficultés ou d'échec scolaire. Beaucoup sont issus de familles étrangères et présentent les difficultés sociales qui nécessitent des moyens individualisés et supplémentaires, tels que ceux qu'offrirait le réseau " ambition réussite ".
C'est pourquoi, je vous demande, monsieur le ministre, d'une part, de me préciser les raisons qui vous ont conduit à écarter ces trois établissements et, d'autre part, de me dire si cette liste, établie sans concertation avec les élus, est amenée à évoluer d'ici à la prochaine rentrée scolaire.
Par ailleurs, depuis plusieurs semaines, différents établissements scolaires de Seine-Saint-Denis, notamment de Drancy et de Bobigny, sont affectés par des mouvements de grève et d'occupation pour protester contre ce classement et, plus généralement, pour manifester la crainte de voir diminuer les moyens accordés à la Seine-Saint-Denis.
Vous avez, monsieur le ministre, fait taire les fausses rumeurs lancées par certains élus locaux, annonçant à leurs administrés que certains établissements scolaires sortiraient de la politique d'éducation prioritaire. Cela dit, manque encore la prise en compte réelle de la difficulté de chaque établissement de la circonscription, en tout cas pour ces trois-là.
Aussi, monsieur le ministre afin de rassurer les professeurs mais également les élèves et leurs parents, pouvez-vous, devant la représentation nationale, réaffirmer cet engagement de maintenir les moyens pour toutes les ZEP, et nous faire savoir si la liste des établissements retenus pour les collèges " ambition réussite " peut encore évoluer, ce qui me paraît nécessaire ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Lagarde, votre question montre combien vous êtes attaché à l'éducation prioritaire, et je vais essayer de vous démontrer, une fois encore, que je le suis aussi !
J'ai présenté, le 8 février dernier, la nouvelle logique qui sous-tend le plan de relance de l'éducation prioritaire : il s'agit de sortir d'une logique de " zone " - le terme est, du reste, assez peu valorisant - pour passer à une logique d'"élèves en difficulté ", afin d'aider davantage ceux qui en ont le plus besoin. C'est bien là, d'ailleurs, l'esprit de l'éducation prioritaire.
Dès lors, pour la première fois depuis la création de l'éducation prioritaire, qui remonte au début des années 80 donc à pratiquement un quart de siècle, des critères nationaux, précis et pertinents, du moins me semble-t-il, ont été retenus. Ils ont permis de distinguer les établissements où se concentrent les plus grandes difficultés sociales et scolaires.
Ces critères sont : la part d'enfants issus de familles appartenant à des catégories socioprofessionnelles défavorisées ; la part d'élèves ayant des résultats faibles aux évaluations en sixième ; la part d'élèves ayant un retard scolaire de deux ans à l'entrée au collège ; la part des parents bénéficiaires du RMI ; la part des enfants ayant des parents non francophones.
Sur la base de ces cinq critères, j'ai retenu 249 collèges qui formeront, avec les écoles de leur secteur, des réseaux "ambition réussite " constituant le premier niveau de la nouvelle architecture de l'éducation prioritaire. Comme quinze autres collèges de Seine-Saint-Denis, le collège République à Bobigny en fait partie. Il recevra à ce titre, dès la rentrée de 2006, des moyens renforcés.
Quant aux quarante-huit autres collèges de Seine-Saint-Denis, actuellement classés en ZEP, dont les collèges Auguste-Delaune à Bobigny, Paul-Langevin et Jacques-Jorissen à Drancy, ils demeurent bien entendu en éducation prioritaire. Comme vous le soulignez à juste titre, leurs élèves connaissent aussi des difficultés sociales et scolaires, même si, objectivement - soit dit sans minimiser - elles sont moins lourdes que dans les seize réseaux "ambition réussite ". C'est pourquoi tous ces collèges et écoles continueront de bénéficier des moyens de l'éducation prioritaire, je l'affirme avec force. Je précise, en outre, que toute une série de mesures du plan de relance s'appliqueront aussi à eux.
Enfin, il va de soi que la carte de l'éducation prioritaire est amenée à évoluer, - dans le bon sens, espérons-nous - puisqu'elle est désormais fonction des critères qui mesurent les difficultés sociales et scolaires des élèves. La liste des réseaux " ambition réussite " en tiendra forcément compte. Toutefois soyons clairs : elle ne sera pas modifiée pour la rentrée de septembre prochain, car tous les moyens de la rentrée scolaire sont maintenant répartis. Et on peut constater qu'il y aura davantage d'établissements scolaires en éducation prioritaire à la rentrée de 2006, qu'il n'y en avait à la rentrée de 2005.
Par conséquent, que ceux qui craignent qu'on ait enlevé des moyens à l'éducation prioritaire, se rassurent : on en a rajouté beaucoup. Et ceux qui pensent que certains établissements ont été retirés du champ de l'éducation prioritaire se trompent, ou ont été trompés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
M. Jean-Christophe Lagarde. Je prends acte de votre engagement, monsieur le ministre, que l'on ne retirera aucun moyen accordé au titre de l'éducation prioritaire.
Pour ce qui est de la modification de la liste, vous affirmez qu'elle n'est pas envisagée pour la rentrée de 2006. Je pense néanmoins qu'il faudra rediscuter des critères retenus. En tout état de cause, le choix des établissements a suscité une incompréhension tout à fait légitime en Seine-Saint-Denis où un sort différent a été réservé à des collèges qui présentaient les mêmes caractéristiques au regard de ces critères, même si l'on peut comprendre que les moyens budgétaires manquent. Une explication s'impose, par exemple avec le recteur de l'académie de Créteil.
En tout cas ladite liste a vraiment vocation à être élargie, même si l'on peut penser, ou espérer, que certains établissements pourront sortir des difficultés et donc être exclus de la liste. Cependant il ne faut pas laisser les autres sur le côté.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Je souhaite reprendre la parole pour dissiper tout malentendu.
Lorsque l'on veut appliquer une politique républicaine sur l'ensemble du territoire, on définit des critères. Je vous les rappelle : la part d'élèves ayant des résultats faibles aux évaluations de sixième ; la part d'élèves ayant un retard scolaire de deux ans à l'entrée au collègue ; la part des parents bénéficiaires du RMI ; la part des enfants ayant des parents non francophones.
Ces critères sont-ils les plus pertinents ? On peut le contester et je suis très ouvert à la discussion. Néanmoins une fois qu'ils ont été établis, on a examiné avec beaucoup d'attention quels étaient les établissements qui rentraient dans ces critères.
Monsieur Lagarde, vos interrogations sont légitimes et je vous invite à venir regarder le résultat de l'application de ces critères aux collèges pour lesquels vous éprouveriez un doute : il faut que ce doute soit levé !

Données clés

Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : éducation nationale

Ministère répondant : éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mars 2006

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