Question orale n° 1471 :
carte scolaire

12e Législature

Question de : M. Christian Paul
Nièvre (3e circonscription) - Socialiste

M. Christian Paul attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la mise en cause de nombreuses filières dans les lycées nivernais. Ouvertement et sans concertation, le Gouvernement fragilise des filières et des établissements quand il faudrait les moderniser et les consolider. Depuis plusieurs mois, il remet en cause le système éducatif par l'apprentissage à partir de quatorze ans, l'allégement des programmes scolaires pour les apprentis, la mise en place de nouvelles méthodes de lecture, la fin programmée du collège unique. La nouvelle carte scolaire en cours de finalisation par les rectorats annoncera la suppression de plus de 2 083 postes d'enseignant sur le territoire national et de 186 postes d'enseignant dans les lycées en Bourgogne. Cette réorganisation comptable des filières, effectuée sans concertation avec les élus et les équipes enseignantes, démontre la détermination du Gouvernement à privilégier une approche arithmétique budgétaire à l'encontre des besoins et des réalités locales. Une stratégie nationale s'engage pour privilégier l'hyperconcentration des formations dans les grandes cités scolaires. A l'inverse, les lycées implantés dans des petites ou moyennes villes sont dévitalisés. Dans le département de la Nièvre, au lycée Romain-Rolland de Clamecy, le BTS assistants PME-PMI ainsi que le BEP secrétariat comptabilité pourraient être, dès la rentrée prochaine, supprimés sans contre-partie. Il est inacceptable que ces formations, développées par des équipes enseignantes qualifiées et motivées, appréciées des entreprises soient sans préavis supprimées dans notre département, sans qu'aucun effort soit fait pour créér et développer de nouvelles formations. Il est inadmissible que le recteur, dépositaire de la politique de l'État dans les régions et départements, réorganise la carte scolaire sans véritable dialogue. L'indifférence est mère du mépris. Il lui demande si c'est ainsi qu'il entend répondre aux inquiétudes des élèves, des parents d'élèves et des enseignants et remédier à l'échec scolaire.

Réponse en séance, et publiée le 8 mars 2006

REORGANISATION DE LA CARTE SCOLAIRE
DANS LA NIEVRE

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, pour exposer sa question, n° 1471, relative à la réorganisation de la carte scolaire dans la Nièvre.
M. Christian Paul. Avec cette question, nous allons passer de la ville à la campagne.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, j'appelle votre attention sur les conséquences préoccupantes que provoque aujourd'hui la mise en cause de nombreuses filières dans les lycées bourguignons.
En effet, le Gouvernement fragilise des filières et des établissements situés dans des villes moyennes ou petites, quand il faudrait les moderniser et les consolider. Je vois là le prolongement d'une discussion que nous avons eue il y a quelques semaines, lors de la discussion du projet de loi sur l'égalité des chances. Nous vous disions alors qu'en réorientant les crédits vers l'apprentissage, il fallait prendre garde à ne pas casser les filières techniques ou les BTS dans les villes moyennes. Or c'est ce qui se passe, en particulier dans la Nièvre.
La suppression de plus de 2 000 postes d'enseignant sur le territoire national se traduit par 186 suppressions dans les lycées de Bourgogne. Certes, la démographie scolaire diminue dans certains lycées, mais les besoins sont tels qu'on aurait pu faire des choix différents. Cette réorganisation comptable de ces filières, en dépit des réponses précédentes, effectuée sans la moindre concertation avec les élus et les équipes enseignantes, démontre la détermination du Gouvernement à privilégier une approche arithmétique budgétaire à l'encontre des besoins et des réalités locales.
Le lycée Romain-Rolland de Clamecy illustre bien cette dévitalisation de nos campagnes. On y supprime le BTS " assistants PME-PMI ", dont tous les titulaires trouvent du travail, et le BEP de secrétariat comptabilité, sans la moindre proposition alternative ni réflexion sur des contreparties permettant de maintenir à l'établissement une taille critique. Les enseignants, les élèves et les parents qui occupent ce lycée jour et nuit depuis la semaine dernière regrettent qu'il n'y ait pas eu un vrai dialogue avec vos services sur un projet d'établissement.
Il est inacceptable que ces formations, développées par des équipes enseignantes qualifiées et motivées, appréciées des entreprises et des familles, soit supprimées sans préavis, dans notre département comme dans beaucoup d'autres, sans aucun effort pour examiner la situation sur le terrain et pour créer et développer de nouvelles formations.
Il est inadmissible, y compris dans la logique actuelle des lois de décentralisation, que le recteur - votre représentant, monsieur le ministre - réorganise la carte scolaire sans dialoguer avec le conseil régional de Bourgogne, qui a une vision différente de l'aménagement scolaire du territoire. Cette politique est ressentie comme de l'indifférence à la situation de ces lycées.
Est-ce ainsi, monsieur le ministre, que vous entendez répondre aux inquiétudes des élèves, des parents et des enseignants ? Quelles solutions concrètes proposez-vous pour remédier à cette situation ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Notre vision des chiffres diffère.
Je viens d'indiquer que la démographie scolaire dans le secondaire aurait dû nous conduire à supprimer 2 500 postes et que nous n'en avons supprimé que la moitié. Il y a donc un effectif supplémentaire pour un nombre d'élèves moins élevé. Notre gestion n'est donc pas comptable ; elle relève d'une politique pédagogique et traduit un effort supplémentaire d'encadrement. Nous avons en outre ouvert 1 000 postes supplémentaires dans le primaire.
Les compétences de l'État en matière de carte scolaire étant déconcentrées, c'est au recteur d'académie qu'il appartient de décider de la répartition des moyens. Elles sont également partagées avec le président du conseil régional.
Renseignements pris auprès du recteur de l'académie de Dijon, le nombre de places vacantes en BTS, dans l'ensemble de la filière tertiaire de la Nièvre, augmente chaque année. De plus, les résultats aux examens ne sont pas satisfaisants, le taux de réussite étant d'à peine 50 %. À la rentrée de 2005, seulement onze élèves ont été accueillis en section de BTS " assistant de gestion PME-PMI " au lycée Romain-Rolland de Clamecy. Ce trop faible effectif fragilise la formation elle-même.
S'agissant du BEP des métiers du secrétariat et de la comptabilité dans le même lycée, il connaît également un effectif insuffisant. Surtout, le niveau de qualification ne permet plus une bonne insertion professionnelle, qui est l'objectif recherché par les jeunes, leurs parents et le monde enseignant.
À ce stade, je vous confirme que la carte des formations dans l'académie de Dijon a été arrêtée conjointement par les représentants de la région et par ceux de l'État et que l'ensemble des projets est présenté à la collectivité territoriale au cours de ce mois.
M. le président. La parole est à M. Christian Paul.
M. Christian Paul. Monsieur le ministre, nous devons examiner ces questions très sérieusement. Évoquer dans cet hémicycle les relations entre le Gouvernement et un conseil régional appelle, me semble-t-il, à un peu plus de prudence.
En fait, il n'y a nullement codécision sur le maintien ou la création de filières et sur les formations. Les propositions sont exprimées par le rectorat auprès du conseil régional. Ce dernier est totalement opposé aux propositions du rectorat en ce qui concerne le lycée de Clamecy et quelques autres. La stratégie du conseil régional de Bourgogne vise au contraire à maintenir des formations diversifiées dans l'espace rural.
Je regrette beaucoup que votre représentant et vous-même, monsieur le ministre, soyez fermés au dialogue. Ces lycées de quelques centaines d'élèves ne demandent pas le statu quo à tout prix. Ils veulent simplement que le dialogue s'engage sur un vrai projet d'établissement, afin de donner un signe fort de la volonté de maintenir ces établissements nécessaires à l'équilibre du territoire et à la formation des jeunes.
C'est pour contribuer à cette réflexion que les enseignants et les parents d'élèves de ce lycée ont organisé des assises en avril, pour que les représentants de tous les lycées ruraux réfléchissent à une stratégie de développement diversifié.

Données clés

Auteur : M. Christian Paul

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : éducation nationale

Ministère répondant : éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mars 2006

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