Question orale n° 1620 :
EDF

12e Législature

Question de : M. Jean Gaubert
Côtes-d'Armor (2e circonscription) - Socialiste

M. Jean Gaubert souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la modification des procédures de normalisation d'EDF. Gestionnaire unique du réseau de distribution publique d'énergie électrique, EDF a, depuis 1946, mis en oeuvre une compétence de normalisateur qui a permis de disposer de réseaux électriques conçus et réalisés selon des techniques dont la fiabilité et la pérennité sont reconnues au niveau européen. Aujourd'hui, EDF, dont le capital est ouvert, assortit le développement et l'agrément de nouveaux produits au transfert de la propriété intellectuelle par les constructeurs. En contrepartie, le fournisseur se voit réserver une part du marché EDF correspondant. Or les collectivités locales autorités concédantes sont aussi maîtres d'ouvrage d'une part importante de travaux sur le réseau électrique et sont soumises au code des marchés publics. Il lui demande donc si cette nouvelle démarche ne risque pas de les mettre dans une situation contraire aux règles de la concurrence en les rendant dépendantes d'un normalisateur économiquement intéressé.

Réponse en séance, et publiée le 31 mai 2006

CONSEQUENCES DE L'OUVERTURE DU CAPITAL D'EDF SUR LES PROCEDURES DE NORMALISATION

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert, pour exposer sa question, n° 1620, relative aux conséquences de l'ouverture du capital d'EDF sur les procédures de normalisation.
M. Jean Gaubert. Monsieur le ministre délégué à l'industrie, je veux attirer votre attention sur la modification des procédures de normalisation d'EDF.
Gestionnaire unique du réseau de distribution publique d'énergie électrique, EDF a, depuis 1946, mis en oeuvre une compétence de normalisateur qui a permis de disposer de réseaux électriques conçus et réalisés selon des techniques dont la fiabilité et la pérennité sont reconnues au niveau européen. Aujourd'hui, EDF, dont le capital est ouvert, assortit le développement et l'agrément de nouveaux produits au transfert à son profit de la propriété intellectuelle par les constructeurs. En contrepartie, le fournisseur se voit réserver une part du marché EDF correspondant. Or les collectivités locales, autorités concédantes, sont aussi maîtres d'ouvrage d'une part importante de travaux sur le réseau électrique et sont soumises au code des marchés publics. La nouvelle démarche ne risque-t-elle pas de les mettre dans une situation contraire aux règles de la concurrence en les rendant dépendantes d'un normalisateur économiquement intéressé et qui, de plus, se trouve être leur concessionnaire ?
EDF, notons-le, gagne sur deux tableaux : l'entreprise ne paye plus l'innovation, qu'elle s'approprie, et pourra même plus tard percevoir des royalties sur les installations réalisées sur les réseaux des collectivités locales.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.
M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le député, vous m'interrogez sur la compatibilité des normes imposées par EDF en matière de matériel de distribution d'électricité avec les règles de passation des marchés publics dans la mesure où les autorités concédantes peuvent être maîtres d'ouvrage des travaux relatifs aux réseaux publics de distribution et sont alors soumises au code des marchés publics.
Vous demandez si, dans ces conditions, les collectivités maîtres d'ouvrage ne risquent pas, lorsqu'elles passent des marchés pour ces réseaux, de se trouver dans une situation contraire aux règles de la concurrence.
Je tiens à vous préciser plusieurs points.
Tout d'abord EDF n'est pas l'unique gestionnaire du réseau de distribution : il existe 160 entreprises locales de distribution.
M. Jean Gaubert. Mais c'est le normalisateur.
M. le ministre délégué à l'industrie. Non, EDF n'a pas de compétence de normalisation. Cette compétence est du ressort d'entités indépendantes telles que l'AFNOR pour les normes françaises, le comité européen de normalisation pour les normes européennes ou l'International standards organisation - ISO - pour les normes internationales. Le transfert de propriété intellectuelle, aujourd'hui demandé par EDF, n'a donc en rien modifié la responsabilité en matière de normalisation.
Par ailleurs, EDF, dans ses cahiers des charges, peut spécifier que les candidats admis à une consultation doivent être qualifiés pour tel ou tel type de produits afin d'assurer un niveau de qualité satisfaisant.
EDF est soumise, pour la passation de ses marchés, à des principes de mise en concurrence similaires à ceux des collectivités maîtres d'ouvrage. Les autorités concédantes peuvent donc, si elles le souhaitent, aujourd'hui comme hier, introduire dans leurs cahiers des charges les mêmes types de spécification et utiliser pour cela les mêmes arguments qu'EDF. Elles peuvent également tenter de passer des marchés conjoints avec EDF afin de disposer d'un poids commercial suffisant face aux constructeurs.
Je tiens à préciser que, conformément aux directives européennes en matière de concurrence, EDF recherche un matériel de qualité au meilleur coût.
Enfin, les collectivités sont libres de faire appel à d'autres fournisseurs que ceux agréés par EDF mais elles peuvent également introduire dans leurs cahiers des charges des clauses relatives à la compatibilité des matériels considérés avec les caractéristiques des réseaux de leur concessionnaire.
J'avoue que c'est un peu compliqué...
M. Jean Gaubert. Oui !
M. le ministre délégué à l'industrie. ...mais, juridiquement, c'est clair !
M. le président. Bravo pour votre honnêteté intellectuelle, monsieur le ministre ! Il est rare d'entendre un membre du Gouvernement employer les mots que vous venez d'utiliser. (Sourires.)
La parole est à M. Jean Gaubert.
M. Jean Gaubert. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. J'espère qu'elle sera entendue par les dirigeants d'EDF.

Données clés

Auteur : M. Jean Gaubert

Type de question : Question orale

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 mai 2006

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