domaine public maritime
Question de :
M. Lionnel Luca
Alpes-Maritimes (6e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Lionnel Luca appelle l'attention de M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer au sujet du décret n° 2006-608 du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage. Dans le département des Alpes-Maritimes, et plus particulièrement à Cagnes-sur-Mer, ce décret menace très directement 5 restaurants sur 3 kilomètres de plages. En effet, l'impossibilité d'ouvrir à l'année est très pénalisante dans une région où l'ensoleillement spécifique permet de déjeuner en terrasse quelle que soit la saison. Les critères retenus pour les dérogations sont discutables, car toutes les communes n'ont pas les moyens (ni l'obligation) d'avoir un office du tourisme classé 4 étoiles, ou d'avoir un nombre de nuitées, suffisant, ce qui est le cas de Cagnes-sur-Mer. Or, la ville de Cagnes-sur Mer, classée « station touristique et balnéaire » avec son hippodrome, attire toute l'année de nombreux visiteurs, ce qui devrait lui permettre de bénéficier de l'ouverture des restaurants de plage à l'année. Qui plus est, à l'heure des déplacements facilités, le critère de nuitées n'est plus un élément caractéristique et unique de séjour touristique. Cette fermeture des restaurants aurait des répercussions directes et indirectes sur l'emploi. Directes, avec des personnels licenciés qui laisseront la place à des saisonniers de moindre qualification ; indirectes, avec des répercussions sur les achats aux fournisseurs locaux. À Cagnes-sur-Mer, ce sont quelque 200 emplois qui se trouvent concernés. Il souhaite par conséquent savoir s'il envisage de réexaminer les critères afin d'adapter ce décret à la spécificité des départements méditerranéens comme les Alpes-Maritimes.
Réponse en séance, et publiée le 30 novembre 2006
APPLICATION DES REGLES
RELATIVES AUX CONCESSIONS DE PLAGE
DANS LES ALPES-MARITIMES
M. Lionnel Luca. Monsieur le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, ma question porte sur l'application des dispositions du décret du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage, en particulier pour les départements méditerranéens, et notamment celui dont je suis l'élu. La Fédération nationale des plages-restaurants a déjà eu l'occasion de rencontrer vos services et de vous interpeller sur la nécessité d'adapter ces dispositions aux réalités locales.
Dans le département des Alpes-Maritimes, et plus particulièrement à Cagnes-sur-Mer, station balnéaire classée touristique, l'application stricte de ce décret entraînerait des complications invraisemblables, notamment pour cinq établissements qui, avant d'être des concessions de plage, sont d'abord des restaurants ouverts toute l'année et qui se trouveraient dans l'obligation de fermer quatre mois sur douze. En effet, malgré l'activité touristique suscitée par l'hippodrome de la Côte d'Azur, la commune ne dispose pas d'un office du tourisme " quatre étoiles ", ce classement étant soumis à des contraintes très importantes auxquelles la ville n'a pas les mêmes moyens que ses voisines - Cannes, par exemple - de satisfaire. Pour ce qui est, par exemple, du nombre de nuitées requises, les établissements anciens de Cannes sont mieux placés pour attirer une clientèle tout au long de l'année.
Pour la plupart, cependant, les établissements concernés à Cagnes-sur-Mer existent depuis une trentaine d'années, c'est-à-dire avant même la loi littoral, et n'ont fait jusqu'à présent l'objet d'aucune réserve ni restriction particulière de la part de la DDE, malgré une configuration locale très spécifique dans laquelle un restaurant peut se trouver à la fois sur le domaine public communal et sur le domaine public maritime. La perspective d'une application stricte du décret inquiète donc légitimement les professionnels, qui, ayant pu obtenir à l'origine un permis de construire pour leurs établissements, n'avaient pas l'impression d'être des voleurs ou des hors-la-loi.
Le souhait qui s'exprime localement, et dont je me fais tout naturellement l'écho en qualité de député de cette circonscription, est que, d'une part, sur le plan général, le décret relatif à la façade maritime méditerranéenne soit adapté de manière à permettre la prise en compte des conditions météorologiques et des situations locales, et que, d'autre part, pour les Alpes-Maritimes, le préfet, le sous-préfet et l'administration de la DDE fassent preuve de sens des réalités et de pragmatisme en permettant à des établissements qui emploient à l'année quelque 200 personnes de poursuivre leur activité.
Le démontage saisonnier des installations aurait pour effet de substituer à ces salariés des travailleurs saisonniers, ce qui pourrait se traduire par une moindre qualité de service, car des emplois précaires ne peuvent évidemment pas assurer le même service à un public qui est, certes, principalement touristique, mais qui concerne aussi tous les habitants du département.
Nous avions, monsieur le ministre, eu l'occasion d'évoquer cette question lors de votre visite à Cannes, et Nice-Matin, le journal local, rapportait vos déclarations à ce sujet : " La question, ce sont les conditions d'application de ce texte par les préfets, en particulier s'agissant de la période de fermeture hivernale et de l'obligation de démontage et de remontage. La concertation continue. Il n'est pas question de modifier le décret, mais nous pouvons regarder les conditions d'application pour tenir compte des réalités. "
Pouvez-vous m'indiquer où en sont aujourd'hui cette concertation et cette adaptation aux réalités ?
M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Comme vous le savez, monsieur Luca, cette question, que nous évoquons ensemble depuis plusieurs mois, est très difficile. Mon prédécesseur avait mené une très large concertation avant la rédaction de ce décret, dont l'objectif est de protéger le domaine public et l'accès au littoral en évitant la présence sur nos plages, en hiver, de baraquements abandonnés qui donnent une très mauvaise image - sans parler des risques qu'ils présentent. C'est à cette nécessité que répondait l'obligation de démontage.
Il nous faut donc aujourd'hui tout à la fois trouver un point d'accord et veiller à une bonne application de l'esprit du texte. Ainsi, lorsqu'un restaurant ou un café de plage ferme pour une durée relativement longue, les installations qui défigureraient la plage doivent être démontées.
À l'inverse, je souscris parfaitement à l'idée que dans des stations et sur des sites, comme la Côte d'Azur, où l'activité dure toute l'année, cette obligation n'a pas lieu d'être. Il ne s'agit plus, en effet, du même cas de figure : grâce au climat et à des activités telles que les courses de chevaux, une fréquentation touristique permanente entraîne une activité elle aussi permanente. Il serait absurde d'imposer, dans ce cas, l'obligation de démonter.
Comme vous l'avez justement relevé, l'un des critères prévus par le décret pose question : l'existence d'un office touristique " quatre étoiles ". Sans entrer dans les détails techniques, je rappelle en effet que l'obtention des quatre étoiles exige que l'office du tourisme satisfasse à diverses conditions, notamment physiques. Nous étudions, avec Léon Bertrand, le ministre délégué au tourisme, les moyens de gérer cette classification. Il pourrait notamment être envisagé - et j'ai d'ailleurs évoqué ce point avec les organisations représentatives que vous évoquiez - d'aborder la question à l'échelle intercommunale. En effet, dans une région qui, comme la vôtre, présente un tissu touristique continu, rien n'impose un traitement administratif qui s'appliquerait commune par commune : la réalité touristique est bien différente.
Tel est le chemin que nous empruntons pour rechercher une solution : il faut à la fois respecter l'esprit d'un texte qui va dans le sens d'une bonne accessibilité du littoral et veiller à ce que son application ne se traduise pas par la suppression d'activités économiques.
M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
M. Lionnel Luca. Merci, monsieur le ministre, de répondre clairement et réellement au problème posé, et non d'un point de vue technocratique. Je vous remercie de prendre en compte très concrètement les problèmes que nous rencontrons.
Nous attendons maintenant la suite de cette concertation. Il serait souhaitable que, dans l'intervalle, les préfets puissent entendre la voix du ministère.
Auteur : M. Lionnel Luca
Type de question : Question orale
Rubrique : Mer et littoral
Ministère interrogé : transports, équipement, tourisme et mer
Ministère répondant : transports, équipement, tourisme et mer
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 novembre 2006