Question orale n° 2 :
SNCF

12e Législature

Question de : M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - Union pour la Démocratie Française

M. Jean-Christophe Lagarde attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur les nuisances insupportables que subissent les riverains de la SNCF sur les communes de Bobigny et de Drancy. A Bobigny, des centaines d'habitants supportent chaque jour les émanations toxiques des locomotives Diesel destinées à la ligne Paris - Bâle depuis que le précédent gouvernement a décidé de les faire stationner en gare de Bobigny au lieu de la gare Paris-Est. A Drancy, des milliers d'habitants proches de la gare de triage sont victimes de nuisances sonores très supérieures aux normes légales suite au changement de système de freinage de cette gare. Dans ces deux cas, il est indispensable que le Gouvernement impose à la SNCF de respecter la tranquillité des habitants lorsqu'elle exploite son réseau en zone d'habitat dense.

Réponse en séance, et publiée le 16 octobre 2002

NUISANCES DUES À LA SNCF
À BOBIGNY ET À DRANCY

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour exposer sa question, n° 2, relative aux nuisances dues à la SNCF à Bobigny et à Drancy.
M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, élu d'une circonscription fortement concernée par le ferroviaire, aussi bien par les voies ferrées que par les gares de triage, je souhaitais vous interroger sur la culture en vigueur à la SNCF, et plus récemment à RFF, s'agissant des nuisances subies par les riverains. Il est en effet systématiquement répondu à ceux-ci que les voies ferrées étaient là avant les habitations, et qu'ils n'ont qu'à s'en accommoder.
Mais si les voies ferrées étaient là avant, elles produisaient alors peu de nuisances, et le développement du trafic n'était évidemment pas celui d'aujourd'hui.
C'est le cas pour Drancy, où la gare de triage, près de laquelle j'ai eu le privilège de grandir, a accru d'année en année les nuisances sonores. Ainsi, d'après une étude que j'ai récemment commandée comme maire de la commune, les niveaux sonores varient sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, entre 69 et 74 décibels. Une enquête menée par le conseil régional d'Ile-de-France il y a deux ans avait d'ailleurs désigné Drancy comme l'un des points noirs de l'Ile-de-France.
Or un changement récent de système de freinage par la SNCF a encore aggravé les choses. Sur plusieurs centaines de mètres à la ronde, des explosions, des crissements extrêmement stridents empêchent les riverains de vivre normalement chez eux, même avec les fenêtres et les volets fermés, ce qui est quand même un comble.
Une intervention est nécessaire, notamment pour faire entendre raison à la SNCF. Même si les installations préexistaient, on ne peut pas dire aux riverains qu'ils devront subir ces nuisances ad vitam aeternam, sauf à transformer des zones fortement urbanisées en désert, tout le monde finissant par partir. On arrive à prendre en compte un certain nombre de nuisances à proximité de certaines infrastructures telles que les aéroports, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas agir pour une gare, qui peut constituer une nuisance aussi grande.
La seconde partie de ma question porte sur Bobigny. Il y a quelques années, M. Gayssot a décidé que des locomotives Diesel qui desservent la ligne Paris-Bâle, qui n'est pas électrifiée, allaient être déplacées de la gare de l'Est à Bobigny, au motif qu'elles polluaient trop les riverains parisiens qui habitaient à proximité. Comme si à Bobigny, elles n'allaient pas gêner d'autres riverains !
Ironie du sort, Bobigny était située dans la circonscription de M. Gayssot - il a fait ce cadeau à ses électeurs avant de partir !
Les habitants de Bobigny ont droit au même respect que les habitants du quartier de la gare de l'Est à Paris. Ils ne peuvent pas continuer à supporter les émanations qui, tous les matins, plusieurs heures durant, inondent leur quartier parce qu'une locomotive Diesel a besoin de chauffer, ce que chacun peut comprendre. J'imagine que si l'on reportait l'installation ailleurs, on retrouverait des difficultés similaires. La SNCF doit donc s'équiper. Je ne parle pas de l'électrification de la ligne Paris-Bâle, qui me paraît complètement illusoire dans un premier temps, en raison des coûts énormes que cela impliquerait, non, la SNCF doit s'équiper de locaux qui permettent de chauffer les machines sans que la population alentour soit obligée de subir les nuisances qui en résultent.
De nombreuses associations sont montées en ligne, qui entendent poursuivre aujourd'hui la SNCF. En effet, on n'a pas le droit d'être un pollueur dans une zone très fortement urbanisée sans en subir de conséquences. Puisqu'il s'agit d'un acteur public dont l'Etat a bien évidemment la tutelle, je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, ce que le Gouvernement entend faire pour restaurer à la fois la quiétude à proximité de la gare de triage de Drancy et la salubrité de l'air près de la gare de Bobigny.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le député, ces sujets sont évoqués depuis déjà un certain nombre d'années, ils posent, comme celui traité tout à l'heure par un de vos collègues, le problème plus général du fret ferroviaire. Nous souhaitons tous développer ce mode de transport parce que c'est une solution alternative à la « thrombose » routière et, en même temps, nous nous apercevons, ou nous nous rappelons, que le ferroviaire fait du bruit, en particulier le transport de fret. En effet, le parc de wagons de marchandises dont nous disposons est assez ancien et les systèmes de freinage et de triage sont extrêmement bruyants.
Il faudra bien que la société française mette fin à cette contradiction. Si, par exemple, nous voulons rouvrir des tangentielles ou des lignes en Ile-de-France pour faciliter le transport de fret, il faut savoir que nous allons provoquer du bruit dans des zones où les lignes étaient jusqu'à présent peu ou pas utilisées, et donc gêner des riverains. C'est un problème général. Comme pour les autoroutes nous allons devoir construire des ouvrages antibruit et prendre toutes les dispositions nécessaires.
En ce qui concerne les locomotives qui tirent les trains voyageurs sur la ligne Paris-Bâle, ce sont les plus récentes de la SNCF en diesel, les CC 72000, mais elles ont quand même trente ans, et elles polluent pas mal. Je me souviens fort bien de la polémique qu'elles ont suscitée autour de la gare de l'Est parmi les associations et les riverains au moment des élections, à Paris ; le débat avait été bien agité.
La SNCF a procédé au déplacement de ces locomotives à Bobigny, avec les difficultés et le paradoxe que vous avez soulignés avec humour.
Sur le site de Bobigny, un certain nombre d'installations spécifiques de captation et de filtration des fumées ont été réclamées, mais surtout, et c'est ce qui est important, les locomotives sont remotorisées. La première à l'avoir été est en circulation, ainsi que je l'ai lu il y a quelques jours dans une revue ferroviaire. L'ensemble du parc des CC 72000 affectées à la ligne Paris-Bâle est en cours de remotorisation et les nouveaux moteurs datent des années 2000 et non plus des années 1970. Ils ne présenteront donc plus les inconvénients des moteurs Diesel anciens, qui dérangent les riverains de votre circonscription comme ils dérangeaient les utilisateurs et les riverains de la gare de l'Est.
Par ailleurs, l'électrification du tronçon Paris-Troyes est en cours, qui devrait faire baisser le nombre des rotations de locomotives Diesel vers Troyes, et la région Champagne-Ardenne a acheté des automoteurs TER. Utilisés sur les relations Paris - Culmont-Chalindrey, ils devraient permettre de diminuer le nombre de trains tractés et une amélioration de la desserte de cette ligne.
Reste le problème de la gare de triage de Drancy. Enfant élevé par des parents cheminots près d'installations ferroviaires, je sais ce que peut représenter le bruit des installations ferroviaires. Un triage, ce sont des wagons de marchandises qui roulent en faisant du bruit, les tirs au but, des wagons qui s'entrechoquent sur les voies... Nous avons demandé à RFF de procéder à un examen spécifique des problèmes du triage de Drancy. Je dois rencontrer, à l'issue de cette séance, les présidents de la SNCF et de RFF, je leur reposerai directement la question.
Si nous voulons augmenter le fret ferroviaire pour diminuer le trafic de camions sur les routes, nous devons trouver des solutions pour diminuer le bruit du fret. Toute une série d'actions sont d'ores et déjà menées par la direction de la SNCF sur le freinage des convois ferroviaires, sur le rapport entre la route et le rail. Dans le cas du triage de Drancy, nous essaierons, en liaison avec vous puisque vous êtes l'élu de cette circonscription, de trouver des solutions appropriées.
M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
M. Jean-Christophe Lagarde. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse. La SNCF et RFF doivent changer de comportement vis-à-vis des riverains. Une mission interne, commandée par le Gouvernement, pourrait peut-être imposer d'autres rapports et un autre dialogue avec les riverains. Le Gouvernement semble s'engager dans cette voie, je l'en remercie.


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Données clés

Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde

Type de question : Question orale

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : équipement, transports et logement

Ministère répondant : équipement, transports et logement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 octobre 2002

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