politique des transports
Question de :
Mme Martine Lignières-Cassou
Pyrénées-Atlantiques (1re circonscription) - Socialiste
Mme Martine Lignières-Cassou souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur l'ouverture du tunnel du Somport. Elle n'a pas cessé d'appeler l'attention des gouvernements français sur l'urgence de dégager des crédits conséquents pour la sécurisation et la modernisation de la route nationale menant au Somport, et a dénoncé à plusieurs reprises les retards pris sur les chantiers. Elle a également insisté sur la nécessité pour l'Etat français de mieux communiquer sur ses intentions. Il est urgent d'accélérer le calendrier et de se donner les moyens d'accéder au tunnel dans les meilleures conditions. D'importants travaux ont déjà été effectués sur la nationale, d'autres sont programmés mais ils sont insuffisants. En conséquence, elle lui demande d'apporter des informations précises quant aux aménagements que l'Etat envisage de réaliser sur l'axe Pau-Canfranc et de donner une échéance claire des travaux qui seront menés. Par ailleurs, elle aimerait qu'il apporte également des précisions quant au projet de réouverture de la liaison ferroviaire Pau-Canfranc. Face à l'accroissement régulier du trafic de marchandises entre le sud et le nord de l'Europe, de nouvelles liaisons transfrontalières sont indispensables. La liaison ferroviaire Pau-Canfranc constitue une solution parmi d'autres pour donner un peu de souffle au franchissement des Pyrénées. Le conseil régional s'est engagé concrètement en faveur de sa réouverture et il est urgent que le Gouvernement s'investisse dans ce projet vital pour le désenclavement du Béarn.
Réponse en séance, et publiée le 26 mars 2003
LIAISONS ROUTIÈRE ET FERROVIAIRE
PAU-CANFRANC
M. le président. La parole est à M. David Habib, suppléant Mme Martine Lignières-Cassou, pour exposer sa question n° 228 relative aux liaisons routière et ferroviaire Pau-Canfranc.
M. David Habib. Je supplée en effet Mme Martine Lignières-Cassou car, suite à un accident sur la ligne, depuis hier il n'y a plus de train entre Pau et Bordeaux. Si je suis ici, c'est parce que j'ai été plus chanceux qu'elle. Je me permettrai donc de poser cette question qui rejoint en partie celle que j'avais déjà évoquée à l'occasion d'une séance similaire.
Le 17 janvier dernier, nous faisions partie, Mme Lignières-Cassou et moi-même, de la poignée d'élus du département présents devant le tunnel du Somport pour célébrer ce qui devait être un événement dans l'histoire des relations entre l'Aquitaine et l'Aragon, et, dans une moindre mesure, entre la France et l'Espagne. Vous n'ignorez pas qu'une grande partie des élus locaux avaient décidé de boycotter cet événement. Si je regrette leur geste, c'est parce que je crois qu'ils ont apporté une mauvaise réponse à de vrais problèmes. Il y a quelques semaines, lorsque Mme Liguières-Cassou a déposé cette question orale, elle avait prévu d'insister sur la nécessité pour le Gouvernement d'accélérer le calendrier des travaux d'aménagement de la route nationale 134 et de s'engager plus fermement en faveur de la réouverture de la liaison ferroviaire entre Pau et Canfranc.
Malheureusement, le rapport d'audit sur les infrastructures a été rendu public depuis, et le scénario est encore plus sombre que je ne l'imaginais pour l'ensemble de la région Aquitaine.
Si le projet de prolongement du TGV Sud-Europe entre Tours et Bordeaux est maintenu, sa mise en service n'est pas préconisée avant 2016, voire 2020. Son achèvement jusqu'à Dax ou Irun est renvoyé aux calendes grecques. La réalisation d'une liaison routière, rapide et sûre, entre Pau et Bordeaux, est, quant à elle, à peine évoquée, malgré la mobilisation de l'ensemble des acteurs aquitains et le début du chantier de la déviation d'Aire-sur-Adour, lancé par le conseil régional d'Aquitaine.
La réouverture de la ligne ferroviaire entre Pau et Canfranc est pour sa part quasiment abandonnée. Le rapport d'audit méprise de la sorte les engagements financiers pris en commun par la région Aquitaine et le précédent gouvernement dans le cadre du contrat de plan Etat-région.
Par ailleurs, d'autres projets structurants pour l'Aquitaine sont carrément oubliés, sans plus d'explications. Or le trafic marchandises entre la France et l'Espagne est désormais le double de celui entre la France et l'Italie, et il croît deux fois plus vite. Chaque jour, 7 500 poids lourds franchissent la frontière entre Hendaye et Biriatou.
Que compte faire le Gouvernement pour répondre très clairement à ce problème, dont les enjeux dépassent largement le seul cadre régional ? Envisage-t-il la réouverture de la voie ferrée entre Pau et Canfranc et, à long terme, la réalisation d'un grand projet de franchissement des Pyrénées ? A-t-il l'intention de lancer enfin l'appel à candidature des sociétés d'autoroute pour la liaison Pau-Bordeaux, épine dorsale de l'Aquitaine ? Va-t-il engager sur la voie du rééquilibrage entre l'axe européen dit de « la Banane bleue » et l'arc atlantique, autrefois si cher à Jean-Pierre Raffarin ?
Aujourd'hui, je demande non plus d'accélérer les projets en Aquitaine mais bien de respecter les engagements passés et les accords signés, au titre du contrat de plan Etat-région notamment. Il faut sortir notre région du désarroi dans lequel le rapport d'audit l'a plongée, un rapport d'audit qui s'apparente non pas, comme le dit imprudemment M. de Robien, à une photographie de nos insuffisances, mais soit à une habile préparation à des renoncements régionaux, soit à une ingénieuse mise en scène en vue d'aloudir la fiscalité.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur Habib, l'audit ne mérite pas cet excès d'indignité. Si je voulais être désagréable avec vous - mais je n'en ai aucune envie, vous le savez bien - je dirais qu'il dresse l'état des lieux des promesses non financées du précédent gouvernement. Derrière les annonces, il n'y a rien, en effet ! Telle est bel et bien la réalité. Mais cela n'empêche pas, à quelques mois des élections régionales en Aquitaine, des personnalités locales de prendre certaines positions. C'est de bonne guerre et cela fait partie du débat démocratique.
Plus sérieusement, et moins politiquement, le sud-Europe atlantique ne fait pas l'objet d'une remise en cause particulière. La photographie obtenue à partir de l'audit montre simplement, le précédent gouvernement n'ayant pas avancé sur le tronçon Angoulême-Tours, que, même en allant très vite sur la liaision Angoulême-Bordeaux, la voie nouvelle entre Tours, Angoulême puis Bordeaux ne pourrait pas être mise en service avant 2016. Voilà pour la photo ! Il nous appartiendra ensuite de travailler ensemble pour améliorer les choses, pour voir si l'on peut passer du noir et blanc à la couleur. Et, comme vous l'avez fort justement indiqué, il conviendra naturellement d'aller au-delà. Il importera de descendre vers Dax puis Hendaye pour rejoindre l'Espagne. Pour l'heure, les Espagnols ont pris un peu de retard de leur côté, mais il faudra bien se relier à leur réseau.
En inaugurant le tunnel du Somport, Gilles de Robien a constaté l'importance des retards en matière d'infrastructures. Comme vous l'aviez souligné au mois de janvier dans cet hémicycle, il convient tout d'abord d'accélérer l'aménagement de la RN 134. Il faudra veiller ainsi au bon avancement des opérations aujourd'hui inscrites au contrat de plan, dont nous nous sommes déjà entretenus. Sachez par exemple que la déviation d'Oloron-Sainte-Marie trouvera un début d'exécution avant la fin du plan. Et d'autres déviations, dont celle d'Urdos, sont en préparation. Au niveau de la sécurité, il faudra également prévoir la rectification du virage du Marbre et l'aménagement du carrefour de Pont-Suzon.
Il est vrai qu'il est dommage que les équipements routiers de l'itinéraire d'accès au tunnel du Somport présentent un tel retard. Mais, très honnêtement, et sans vouloir polémiquer, la responsabilité ne saurait en incomber à l'actuel gouvernement, eu égard aux délais nécessaires à la réalisation de tels équipements routiers.
S'agissant de la réactivation de la liaison ferroviaire Pau-Canfranc, l'exercice est évidemment difficile puisque la liaison est interrompue depuis 1970. Cette ligne présente d'ailleurs des caractéristiques qu'on peut qualifier de médiocres, avec une succession de tunnels hélicoïdaux, des pentes très sévères, pour acheminer les marchandises, l'emploi de rames courtes, voire de rames avec une locomotive « en pousse ». Il a néanmoins été décidé de lancer une serie d'études approfondies. Celles-ci sont conduites par Réseau ferré de France en partenariat avec le conseil régional d'Aquitaine et le ministère des transports, et leur résultats sont attendus pour le milieu de l'année. Ils doivent permettre aux deux gouvernements de définir les conditions d'une réouverture.
Certes, l'audit qui, je le répète, est un travail de hauts fonctionnaires demandé pour éclairer les choix du Gouvernement et du Parlement laisse entrevoir des niveaux de rentabilité économique très faible ; pour information, la liaison en TGV de Tours à Bordeaux, par exemple, atteint un taux de 8 à 9 %. Mais il s'agit là d'un problème d'aménagement du territoire, d'un problème de nature politique, au sens noble du terme. Chacun voit bien que la traversée pyrénéenne constitue une préoccupation majeure pour les années à venir. Si les Italiens peuvent traverser les Alpes, en passant par la Suisse, la Slovénie ou la France, les Espagnols et les Portugais, eux, n'ont pas le choix : ils ne peuvent traverser les Pyrénées qu'à Hendaye et à Perpignan ou en empruntant le petit tunnel routier auquel vous avez fait allusion.
Il faudra donc certainement prévoir une troisième grande liaison pyrénéenne. J'ai récemment évoqué ce sujet avec Jean Glavany, avec le maire de Tarbes, Gérard Trémège, et d'autres élus, dont le maire de Lourdes. Au-delà des étiquettes politiques des uns et des autres, il faut réfléchir ensemble à une grande traversée pyrénéenne dont on voit bien, en raison du développement économique de la péninsule Ibérique qu'elle est absolument nécessaire. En conséquence, il faut replacer l'ensemble des moyens de transport dans cette perspective.
M. le président. La parole est à M. David Habib.
M. David Habib. Je me félicite de cette prise de position très claire sur le franchissement des Pyrénées. Cet élément alimentera notre réflexion à l'occasion du débat public sur les infrastructures. Je tiens cependant à rappeler notre impatience quant au lancement de l'appel à candidatures pour l'autoroute Pau-Bordeaux.
Auteur : Mme Martine Lignières-Cassou
Type de question : Question orale
Rubrique : Transports
Ministère interrogé : équipement, transports et logement
Ministère répondant : équipement, transports et logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 mars 2003