Question orale n° 325 :
décentralisation

12e Législature

Question de : M. François Vannson
Vosges (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. François Vannson appelle l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur les inquiétudes manifestées par les personnels techniques et administratifs des CIO, à l'occasion du débat sur la décentralisation. Il serait en effet question de transférer les CIO aux régions. La réorganisation éventuelle de ce service public dans le sens d'une régionalisation appelle plusieurs séries de questions quant à ses conséquences. La première concerne la pérennité du métier de conseiller d'orientation psychologue. A l'heure actuelle, aucun recrutement n'est envisagé en 2004. Est-on dans l'extinction du corps ? Toujours s'agissant de la pérennité du métier, la question du statut doit être envisagée. Recrutés à bac + 5, les COP sont dans le cadre A de la fonction publique. Or ni cette fonction, ni ce cadre d'emplois n'existent dans la fonction publique territoriale. Est-ce que l'on continuera de les recruter au niveau de qualification bac + 5 ? Avec en filigrane la question des compétences techniques de ces personnels. La seconde série de questions concerne la pérennité des structures. Notre pays compte environ six cents CIO. Seront-ils préservés ? Le traitement de la demande du public continuera-t-il à être assuré par des professionnels qui auront la spécificité et la technicité des COP ? La troisième série de questions, certainement la plus importante, porte sur la pérennité du concept même d'orientation. Le rôle du COP consiste à amener l'élève à mettre de l'ordre dans ces informations puis à approfondir une réflexion personnelle sur son avenir. Le rôle des COP consiste à aider les élèves à élaborer un projet. Autrement dit, l'orientation est un processus long, qui s'inscrit dans la durée qui exige un suivi personnalisé et qui ne saurait être résumé à un entretien téléphonique. Les missions des COP seront-elles garanties ? Cela étant, les directeurs de CIO, les COP, les personnels administratifs ne sont pas par principe hostiles à la déconcentration. Ils ont cependant le sentiment d'être tenus à l'écart de cette réforme, de ne pas y être associés. Ils regrettent l'absence de concertation, alors qu'ils sont les premiers concernés. La représentation nationale elle-même reste très mal informée sur les intentions du Gouvernement. Il le remercie des réponses qu'il voudra bien apporter aux questions extrêmement importantes que soulève ce projet de réforme.

Réponse en séance, et publiée le 7 mai 2003

CONSÉQUENCES DE LA RÉGIONALISATION ÉVENTUELLE
DES CENTRES D'INFORMATION ET D'ORIENTATION

M. le président. La parole est à M. François Vannson, pour poser sa question, n° 325, relative aux conséquences de la régionalisation éventuelle des centres d'information et d'orientation.
M. François Vannson. Ma question s'adresse à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et concerne les inquiétudes manifestées par les personnels techniques et administratifs des centres d'information et d'orientation à l'occasion du débat sur la décentralisation. Il serait en effet question de transférer les CIO aux régions.
Les CIO sont un service public de l'éducation nationale, qui repose sur environ 4 500 fonctionnaires d'Etat, directeurs de CIO et conseillers d'orientation-psychologues, sans compter les personnels administratifs.
Les COP sont partie intégrante du système éducatif. Ils interviennent aussi bien auprès des élèves et de leurs familles qu'au sein des équipes enseignantes. Ils sont également présents en dehors des établissements, dans les CIO, où ils accueillent tous les publics. A titre indicatif, chaque COP a 1 500 élèves environ à sa charge.
La réorganisation éventuelle de ce service public dans le sens d'une régionalisation appelle plusieurs séries de questions quant à ses conséquences.
La première série concerne la pérennité du métier de COP. A l'heure actuelle, aucun recrutement n'est envisagé en 2004. Est-on dans l'extinction du corps ? On peut légitimement se le demander.
Toujours à propos de la pérennité, la question du statut doit aussi être envisagée. Recrutés à bac + 5, les COP font partie du cadre A de la fonction publique. Or ni cette fonction ni ce cadre d'emploi n'existent dans la fonction publique territoriale. Est-ce que l'on continuera de les recruter au niveau de qualification bac + 5 ? En filigrane se pose le problème des compétences techniques de ces personnels : la mission d'orientation porte également sur l'identité, la construction de soi et le développement de la personne, ce qui relève bien de la psychologie.
La seconde série de questions concerne la pérennité des structures. Notre pays compte environ six cents CIO. Seront-ils préservés ? Des régions ne pourraient-elles pas être tentées, dans un souci d'économie, de les regrouper ? Le traitement de la demande du public continuera-t-il à être assuré par des professionnels qui auront la spécificité et la technicité des COP, sachant la complexité de ce qui se cache derrière la première demande ?
La troisième série, certainement la plus importante, porte sur la pérennité du concept même d'orientation. Les conseillers d'orientation - psychologues ne se contentent pas d'informer les élèves. S'ils ne faisaient que cela, la question de leur utilité se poserait effectivement. Les élèves, toutes les études le prouvent, sont sur-informés. Le rôle du COP consiste à amener l'élève à mettre de l'ordre dans ces informations, puis à approfondir une réflexion personnelle sur son avenir. Le conseiller aide aussi les élèves à élaborer un projet. C'est en cela que sa mission s'inscrit dans une démarche éducative. Autrement dit, l'orientation est un processus long qui s'inscrit dans la durée, qui exige un suivi personnalisé et qui ne saurait être résumé à un entretien téléphonique. Les missions des COP seront-elles garanties ?
L'éducation est un tout et il est permis de s'interroger sur l'opportunité de la fractionner. Cela étant, les directeurs de CIO, les conseillers d'orientation - psychologues et les personnels administratifs ne sont pas par principe hostiles à la décentralisation si elle leur permet d'être encore plus efficaces, de fonctionner dans de meilleures conditions matérielles et techniques, et d'apporter un mieux aux élèves qu'ils informent et conseillent. Ils aimeraient cependant être mieux associés à cette réforme.
Quant à la représentation nationale, elle souhaiterait être informée des intentions du Gouvernement.
Monsieur le ministre, je vous remercie des réponses que vous voudrez bien apporter aux questions extrêmement importantes que soulève ce projet de réforme.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur Vannson, je vous remercie de poser cette question, qui me permettra de clarifier le problème des conseillers d'orientation - psychologues.
Le transfert aux régions de la compétence de conseil, d'orientation et d'information sur les métiers est inscrit dans le projet gouvernemental de décentralisation. Le Premier ministre l'a clairement rappelé dans le discours sur la décentralisation qu'il a prononcé le jour de la clôture des Assises des libertés locales, le 28 février dernier, à Rouen.
Pourquoi cette décision ? D'abord, elle a été prise au vu des demandes formulées par les régions elles-mêmes, qui considèrent que cette mission nouvelle s'inscrit dans les compétences qu'elles exercent déjà de manière très efficace en matière de formation professionnelle et de planification des formations puisqu'elles y consacrent généralement la moitié de leur budget. Il nous a donc paru cohérent que les régions aient la responsabilité de l'ensemble des dispositifs d'orientation.
L'objectif, comme toujours, est d'améliorer la qualité du service rendu aux élèves et à leurs familles - souvent inquiètes et qui veulent être informées - en faisant jouer, dans le cadre d'un service public régional, la complémentarité des acteurs qui participent à l'orientation et de ceux qui participent à l'insertion professionnelle.
Cet objectif étant rappelé, disons clairement que le métier de conseiller d'orientation-psychologue n'est en rien menacé. D'ailleurs le recrutement de la promotion 2003 se déroule en ce moment même. J'ai lu dans la presse qu'on n'allait plus recruter, que les concours internes allaient disparaître. Tout cela est faux. Bien évidemment, le métier continue. Pour l'avenir, l'Etat s'engage, et je m'engage moi-même devant vous, à faire en sorte qu'il n'y ait pas d'interruption dans le flux annuel de recrutement au moment du transfert aux régions.
Une difficulté particulière est apparue, qui est l'intégration dans un cadre d'emploi, car il n'existe pas de cadre d'emploi territorial qui soit exactement le même que celui des COP. Il est donc prévu qu'un cadre d'emploi territorial de catégorie A soit proposé aux COP en fonction aujourd'hui. Ce statut ne leur sera cependant pas imposé. Ils pourront soit opter pour le détachement de longue durée, ce qui impliquera parallèlement le maintien dans leur statut actuel, soit rester dans le cadre de la gestion nationale.
Quant aux 600 centres d'information et d'orientation, ils seront transférés avec tous les moyens de fonctionnement matériels, immobiliers et informatiques, et il reviendra aux régions d'organiser le réseau des structures locales d'information et d'orientation afin de mieux répondre aux besoins exprimés par les communautés éducatives.
La mission des personnels d'orientation et leur rôle de conseil à l'équipe éducative sont réaffirmés dans le projet de loi de décentralisation qui sera soumis d'ici à l'été au Parlement : le texte précise clairement que leur action s'exerce tant au sein des établissements scolaires que dans le cadre des structures qui seront mises en place par la région.
Les principes généraux qui régissent le droit à l'orientation et à l'information ainsi que l'élaboration par les élèves de leurs projets d'orientation scolaire et professionnelle, tels qu'ils figurent dans le code de l'éducation adopté ici même il y a peu, ne seront en aucune façon modifiés à l'occasion de la décentralisation.
Il n'est donc nullement question, monsieur le député, de faire disparaître les conseillers d'orientation-psychologues. Bien au contraire, nous sommes convaincus que leur rattachement à un service régional mieux adapté aux spécificités du tissu local, connaissant mieux les bassins d'emploi et mieux informé de l'évolution des formations, leur permettra de répondre encore mieux à l'attente des publics qui recherchent de l'information, ainsi que de renforcer leurs capacités d'aide et de conseil aux familles, aux élèves et aux équipes éducatives - dont, je le rappelle, ils resteront plus que jamais les membres.
Je pense, monsieur Vannson, vous avoir ainsi rassuré, et plus encore les conseillers d'orientation-psychologues.
M. le président. La parole est à M. François Vannson.
M. François Vannson. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier de votre réponse, qui nous a apporté un certain nombre de précisions. Je vous demande cependant de continuer à entretenir le dialogue avec ces personnels, car l'éducation doit rester une priorité de notre société et l'orientation fait partie des premiers principes. Si un élève est mal orienté, il n'a quasiment pas de chance de réussir. La représentation nationale restera donc vigilante quant à la mise en oeuvre et au suivi de votre projet.

Données clés

Auteur : M. François Vannson

Type de question : Question orale

Rubrique : État

Ministère interrogé : jeunesse et éducation nationale

Ministère répondant : jeunesse et éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mai 2003

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