politique de l'éducation
Question de :
M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste
M. Bruno Le Roux interroge M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur l'école publique et laïque, élément fondamental de lutte contre les inégalités, de construction de la citoyenneté, d'accès aux savoirs et d'intégration sociale qui subit de plein fouet le désengagement de l'Etat. La Seine-Saint-Denis est très directement touchée par cette politique et ces nombreuses régressions l'amènent à demander un véritable plan de développement pour l'éducation dans ce département. L'égalité des élèves face à la réussite scolaire exige en effet que l'école exprime une même ambition pour tous en terme d'appropriation des savoirs et d'une culture commune. Les élèves de Seine-Saint-Denis ont autant le droit de réussir leur scolarité que ceux des autres départements de notre pays. Il souhaite savoir si le plan d'urgence (1997-2000) a fait l'objet d'une évaluation de la part de ses services, si cette évaluation est publique et s'il est prêt à ouvrir un débat permettant de discuter des effets de cette politique publique et enfin s'il est prêt à mettre en place, sur la base de ce débat, un nouveau plan pluriannuel spécifique à la Seine-Saint-Denis.
Réponse en séance, et publiée le 21 mai 2003
POLITIQUE DE L'ÉDUCATION
DANS LA SEINE-SAINT-DENIS
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour exposer sa question, n° 327, relative à la politique de l'éducation dans la Seine-Saint-Denis.
M. Bruno Le Roux. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, au lendemain d'une nouvelle manifestation de grande ampleur, qui a montré toute la détermination de ceux qui, aujourd'hui, jugent dangereux et injustes votre politique et vos projets concernant les retraites et la décentralisation, je souhaite ici évoquer, de façon courte et précise, la situation spécifique de l'éducation en Seine-Saint-Denis.
L'école publique et laïque est un élément fondamental de la lutte contre les inégalités, de la construction de la citoyenneté, d'accès au savoir et d'intégration sociale. En Seine-Saint-Denis, elle subit aujourd'hui de plein fouet le désengagement de l'Etat. Baisse des dotations horaires globales, remise en cause des politiques de soutien scolaire, baisse de l'encadrement due à la suppression des emplois jeunes, rupture dans le processus de scolarisation des jeunes enfants : aux inquiétudes justifiées concernant le démantèlement de l'éducation nationale viennent s'ajouter toutes ces raisons objectives de mécontentement.
L'égalité des élèves face à la réussite scolaire exige en effet que l'école exprime une même ambition pour tous en termes d'appropriation des savoirs et d'une culture commune. Les élèves de Seine-Saint-Denis ont autant droit à réussir leur scolarité que ceux des autres départements de notre pays.
C'est pourquoi cette baisse de moyens est injuste et inadmissible, surtout après le plan de rattrapage dont le département a bénéficié de 1998 à 2001, sous la précédente législature.
Aussi, monsieur le ministre, je vous poserai trois questions précises.
Je souhaite d'abord savoir si ce plan d'urgence a fait l'objet d'une évaluation de la part de vos services, comme cela me semble devoir être le cas en matière de politique publique quand des ruptures sont opérées, car il convient de mesurer les résultats qu'elles ont permis d'obtenir.
Si oui, cette évaluation est-elle publique et êtes-vous prêt, monsieur le ministre, à ouvrir un débat, en Seine-Saint-Denis ou peut-être plus largement, permettant d'en discuter les effets ?
Etes-vous prêt, enfin, à mettre en place, sur la base de ce débat, un nouveau plan pluriannuel spécifique à la Seine-Saint-Denis ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député Le Roux, d'abord, la question de l'école doit être abordée sans a priori et sans débats idéologiques forcés. Par ailleurs, il faut isoler la question de la Seine-Saint-Denis des mouvements actuels, qui ont un caractère beaucoup plus général.
Par ailleurs, vous le savez, nous avons affirmé, et nous le maintenons, que l'école ne se pilotera pas seulement à partir des moyens mais en nous fixant des objectifs.
Cela dit, la République - je souscris à votre formule - se doit d'offrir aux élèves de Seine-Saint-Denis les mêmes opportunités, les mêmes perspectives qu'aux élèves de tous les autres départements. Ce serait trahir les valeurs de l'école que d'accepter que se pérennise, avec ou sans notre « complicité » - pour utiliser un terme qui serait le vôtre - , une quelconque fracture scolaire.
Néanmoins, concernant la Seine-Saint-Denis, j'aimerais que nous soyons lucides et que nous regardions ce qui a été fait. Un plan d'urgence 1997-2000 relatif à la Seine-Saint-Denis a donné lieu à un bilan - c'est ce que vous souhaitez -, qui fut présenté au conseil départemental de l'éducation nationale le 5 novembre 2002. Ce bilan a alimenté la réflexion du rapport de l'inspection générale sur le fonctionnement de l'académie de Créteil, rapport que je suis tout à fait disposé, monsieur le député, à vous faire parvenir, au cas où vous ne l'auriez pas en votre possession.
Je reconnais que le bilan est mitigé, mais en même temps il montre que les engagements de l'Etat ont été tenus. Il rappelle ceci : l'Etat a bien mis les moyens qu'il avait promis à la disposition du département ; les collectivités locales et les services de l'Etat - éducation nationale, police, justice, jeunesse, sports et culture - ont bien renforcé leur partenariat ; l'impact sur la réussite scolaire des élèves est cependant resté limité : si les performances globales se sont un peu améliorées de 1997 à 2001, certains résultats demeurent préoccupants au niveau des évaluations de 6e et des baccalauréats professionnels et technologiques ; enfin, une réorientation vers des actions ciblées, moins fondées sur la répartition uniforme des moyens, semble nécessaire.
Au vu de ces conclusions et pour une plus grande efficacité, le plan de développement 2002-2005, présenté le 31 janvier 2003 au conseil départemental de l'éducation, s'articule cette fois-ci autour de trois priorités : premièrement, l'amélioration de l'offre de formations ; deuxièmement, la prise en charge accrue des publics dont les besoins sont spécifiques, qui ont des exigences particulières ; troisièmement, l'accompagnement des personnels dans l'accomplissement de leur métier. Je pense, monsieur le député, que vous avez eu communication de ce plan d'urgence.
Ce projet est mis en oeuvre grâce à un maintien des moyens issus du plan et au recours à une organisation permettant une évolution de l'offre de formation en lycée et un meilleur accueil des enfants nouvellement arrivés sur le territoire national.
Monsieur le député, c'est par une action concertée et prolongée que nous améliorerons les structures éducatives du département de Seine-Saint-Denis. C'est d'ailleurs le sens de la politique que nous menons là comme partout. Vous ne devez pas douter de notre volonté d'aider la Seine-Saint-Denis à rejoindre, en termes d'offre comme en termes de résultats, le niveau général de l'ensemble des écoles de la nation.
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
M. Bruno Le Roux. Merci, monsieur le ministre, pour votre réponse. Je serais très heureux de recevoir le rapport dont nous avons parlé, car j'ai eu du mal à me le procurer.
Loin des débats qui s'expriment aujourd'hui dans la rue, la préoccupation qui se manifeste en Seine-Saint-Denis, c'est celle de savoir si une véritable politique de lutte contre l'échec scolaire va être poursuivie dans la durée. A l'extérieur de l'école, des processus d'aide ont été mis en place, qui reposent en grande partie sur les moyens donnés aux établissements scolaires. Je suis donc très inquiet, car le maintien du niveau de moyens que vous annoncez pour ce département risque de se traduire par des dotations horaires globales légèrement en baisse, ce qui entraînera des ruptures, non dans le programme, mais dans les politiques de prise en charge de l'échec scolaire. Je pense notamment aux groupes de soutien, qui tendent à disparaître dans la quasi-totalité des collèges de la circonscription. Je souhaitais attirer votre attention sur cette question.
Auteur : M. Bruno Le Roux
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : jeunesse et éducation nationale
Ministère répondant : jeunesse et éducation nationale
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2003