Question orale n° 330 :
non titulaires

12e Législature

Question de : M. Henri Sicre
Pyrénées-Orientales (4e circonscription) - Socialiste

M. Henri Sicre souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur la situation des agents contractuels des collectivités territoriales recrutés en application du dispositif « nouveaux services - nouveaux emplois ». Parmi les titulaires de ces postes (près de 50 000), un certain nombre, comme le prévoyait le dispositif réglementaire, ont effectivement été recrutés sur des activités nouvelles, innovantes ou répondant à des besoins non satisfaits dans la fonction publique territoriale. C'est, paradoxalement, pour ceux-là que se pose avec le plus d'acuité le problème de l'intégration car la spécificité de leurs missions ne rentre pas dans les cadres d'emplois existants. On peut citer l'exemple des chargés de missions, agents de développement et autres chefs de projet intervenant sur des politiques contractuelles nouvelles (contrats rural, de développement territorial, de ville ou de rivière...) ; lesquels assument tant la gestion comptable et administrative que la coordination technique et le suivi opérationnel des projets. Ceci est d'autant plus vrai pour les EPCI de taille modeste spécifiquement créés pour la mise en oeuvre de ces procédures et dans lesquels le poste d'emploi jeune a souvent évolué vers un poste de direction (cadre A) devant assurer la mixité des missions administratives et techniques pour le bon fonctionnement de la structure. Ainsi, il n'est pas vraiment possible pour eux de passer un concours portant sur des cadres d'emplois correspondant pleinement à la spécificité de leurs missions d'autant que la réforme du concours d'ingénieur a supprimé l'option généraliste alors que le concours d'attaché demeure très spécialisé en droit, administration et finances publiques. Par conséquent, il lui demande quelles mesures il pourrait prendre pour la création de spécialités complémentaires tant dans la filière administrative que technique permettant une meilleure adéquation aux besoins des collectivités et, éventuellement, compte tenu de la difficulté et du coût de l'organisation de nouveaux concours, quelles dispositions sont envisageables pour simplifier l'accès à certains métiers par l'instauration de concours sur titres dont la phase d'admissibilité pourrait consister en une sélection sur dossier (formation initiale, expérience professionnelle et motivation du candidat) complétée par une épreuve d'admission comportant un entretien avec un jury.

Réponse en séance, et publiée le 21 mai 2003

INTÉGRATION DES AGENTS CONTRACTUELS
DES COLLECTIVITÉS LOCALES
RECRUTÉS EN APPLICATION DU DISPOSITIF
« NOUVEAUX SERVICES - NOUVEAUX EMPLOIS »

M. le président. La parole est à M. Henri Sicre, pour exposer sa question, n° 330, relative à l'intégration des agents contractuels des collectivités locales recrutés en application du dispositif « nouveaux services - nouveaux emplois ».
M. Henri Sicre. Monsieur le ministre délégué à la famille, lors de la création du dispositif « nouveaux services - nouveaux emplois », près de 50 000 postes ont été créés pour assurer des activités nouvelles, innovantes ou répondant à des besoins non satisfaits dans la fonction publique territoriale. C'était d'ailleurs une obligation, puisque les emploi-jeunes ne devaient pas correspondre à des emplois existants ou à des missions spécifiques des collectivités territoriales. C'est pour ces emplois-jeunes que se pose aujourd'hui le problème de l'intégration.
On peut citer de nombreux exemples de chargés de missions, agents de développement et autres chefs de projet intervenant sur des politiques contractuelles nouvelles - contrats rural, de développement territorial, de ville ou de rivière. Ces collaborateurs assurent la gestion comptable et administrative aussi bien que la coordination technique et le suivi opérationnel des projets. C'est d'autant plus vrai pour les établissements publics de coopération intercommunale de taille modeste spécifiquement créés pour la mise en oeuvre de ces procédures et dans lesquels le poste d'emploi-jeune a souvent évolué sur un poste de direction - cadre A - devant assurer la mixité des missions administratives et techniques pour le bon fonctionnement des structures.
A l'échéance de ce contrat jeune, la structure doit se pérenniser. Il y a donc lieu de créer un emploi, et la difficulté est double. La collectivité ou le groupement de communes crée un poste ; il y a donc publicité de vacance de poste et appel à candidatures. Or il n'y aura pas de candidat dans la mesure où la spécificité demandée ne figure pas dans les fonctions déjà existantes. Je citerai, pour exemple, un syndicat intercommunal à vocation unique qui a souscrit un « contrat rivière » avec l'Etat. S'il fait appel à un ingénieur, ce sera un ingénieur spécialisé dans la voirie et les réseaux divers. S'il fait appel à un agent administratif, un attaché territorial, il sera plutôt spécialisé dans les problèmes de gestion ou de droit. L'établissement public doit donc solliciter une mesure dérogatoire, qu'on accorde souvent quand on connaît la structure, mais pour une période limitée.
Par conséquent, quelles mesures pourraient être prises pour la création de spécialités complémentaires, tant dans la filière administrative que dans la filière technique, afin de permettre une meilleure adéquation aux besoins des collectivités ? Eventuellement, compte tenu de la difficulté et du coût de l'organisation de nouveaux concours, quelles dispositions sont envisageables pour simplifier l'accès à certains métiers par l'instauration de concours sur titres dont la phase d'admissibilité pourrait consister en une sélection sur dossier - formation initiale, expérience professionnelle et motivation du candidat -, complétée par une épreuve d'admission comportant un entretien avec un jury ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la famille.
M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Monsieur le député, je vous prie d'excuser l'absence de Jean-Paul Delevoye, qui préside en ce moment le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Il m'a chargé de vous donner lecture des éléments de réponse suivants.
Le développement local n'est pas absent de certains statuts particuliers de la fonction publique territoriale. Depuis 1994, ce champ est expressément retenu dans les missions que peuvent assumer les cadres A de la filière administrative. Un certain nombre d'employeurs locaux ont ainsi eu recours à des fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des attachés territoriaux ou de celui des administrateurs territoriaux, en vue de leur confier des missions de développement local.
Un groupe de travail paritaire a été créé, au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, en vue du réaménagement des règles relatives aux concours et aux mécanismes de recrutement dans la fonction publique territoriale.
Mon collègue Jean-Paul Delevoye, lors du CSFPT du 16 octobre 2002, a réaffirmé son souhait d'améliorer la mobilité et la souplesse de passage d'une filière ou d'un cadre d'emploi à un autre. Des dispositifs seront proposés dans une loi portant réforme de la fonction publique territoriale à l'automne prochain.
L'un des objectifs prioritaires de ce groupe de travail est de professionnaliser le recrutement des fonctionnaires territoriaux afin d'améliorer l'adéquation entre les besoins des employeurs locaux et le profil des candidats aux concours. Il tend donc à mettre en place des concours sur titres, chaque fois qu'un diplôme professionnalisé peut garantir la compétence recherchée par les employeurs locaux, ce qui conduit à un allégement des épreuves de sélection.
En ce qui concerne plus précisément les « nouveaux emplois », la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001, relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale, a posé, dans son article 18 VI, le principe des troisièmes concours pour l'accès à la fonction publique territoriale, dès lors que le statut particulier des cadres d'emplois le prévoit. Peuvent notamment faire acte de candidature les personnes disposant d'une expérience professionnelle de droit privé. Ces troisièmes concours sont de fait accessibles aux titulaires de contrats « emplois-jeunes » puisque la loi de 1997 a qualifié ces contrats de « droit privé ».
Les troisièmes concours se distinguant des concours sur titres, en ce que les candidats ne doivent pas justifier de la possession d'un titre ou d'un diplôme professionnalisé, les épreuves de sélection doivent permettre de vérifier la capacité du candidat à assumer les missions du cadre d'emploi auquel il souhaite accéder. Elles sont chaque fois définies par le groupe de travail paritaire précité et soumis à l'avis du CSFPT, préalablement à leur publication au Journal officiel.
En outre, un décret n° 2002-872 du 3 mai 2002 a instauré un troisième concours dans le cadre d'emploi des attachés territoriaux et dans celui des administrateurs territoriaux. Pour ce dernier, l'activité professionnelle requise correspond à des fonctions d'encadrement, de conception et de responsabilité dans les domaines de développement économique, social et culturel. Cette prise en compte se traduit, dans les épreuves, par la possibilité pour les candidats de concourir dans une option « développement local et politique de la ville ».
Ces troisièmes concours apparaissent ainsi constituer une voie d'accès privilégiée à la fonction publique territoriale pour les agents relevant du programme « nouveaux services, emplois-jeunes » exerçant dans le domaine du développement local.
Il n'en demeure pas moins que le concours doit rester une règle « républicaine » de l'accès pour tous à la fonction publique. De même, il ne faut pas oublier que l'on ne fera pas toujours le même métier tout au long d'une carrière dans la « territoriale » et qu'il n'est pas inutile de maîtriser quelques connaissances juridiques et économiques.
La question était technique, la réponse l'est aussi !
M. le président. La parole est à M. Henri Sicre.
M. Henri Sicre. Monsieur le ministre, il est évident que nous suivrons les cas particuliers qui ont motivé cette question.
Il est vrai que, dans le cours de leur carrière professionnelle, les agents peuvent être amenés à changer d'activité et doivent donc avoir une certaine polyvalence, mais le problème est aujourd'hui celui des compétences spécifiques que requièrent certains emplois. Sans parler du développement durable, je prendrai l'exemple d'un contrat rivière : un ingénieur spécialisé en voirie et réseaux divers ne pourrait pas plus être recruté pour traiter de questions liées au cours d'un fleuve, au transport des matériaux, à la protection des rives ou aux ripisylves, qu'un attaché dont le concours de recrutement aurait porté sur le droit constitutionnel. Tout en restant attachés, comme vous, au concours comme voie d'accès à la fonction publique territoriale, nous souhaitons qu'il intègre des spécificités qui permettent de répondre à ces nouveaux emplois souhaités par l'Etat - en effet, un contrat rivière représente souvent pour l'Etat un engagement contractuel de plusieurs millions d'euros. Peut-être le concours sur titres ou sur diplômes que vous avez évoqué est-il aussi une bonne formule.
Nous suivrons cette question avec attention. Dans l'immédiat, je vous remercie de votre réponse.

Données clés

Auteur : M. Henri Sicre

Type de question : Question orale

Rubrique : Fonction publique territoriale

Ministère interrogé : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire

Ministère répondant : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2003

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