budget : services du Trésor
Question de :
M. Pierre Cohen
Haute-Garonne (3e circonscription) - Socialiste
M. Pierre Cohen attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le malaise généralisé qui touche l'ensemble des élus des collectivités territoriales. Dans le seul département de la Haute-Garonne, six perceptions sont en effet appelées à disparaître dès le début de l'année 2004. Le démantèlement du Trésor public est en route. Or la plupart de ces perceptions, comme celles de Verfeil et de Lanta par exemple, se situent en zone périurbaine de l'agglomération toulousaine où la mise en application du SCOT va accroître le phénomène de l'urbanisation. Le dernier recensement du canton de Lanta a d'ailleurs permis de mettre à jour un accroissement de population non négligeable (47 % depuis 1990), ce qui a amené la récente construction d'un collège de 700 élèves et autres services à la population (maison de retraite en cours de construction...). Le service public fait partie d'un mode d'organisation de notre société ancré dans les valeurs de la République, qui permet de lutter contre les déséquilibres territoriaux et répond à des demandes de proximité de plus en plus pressantes. Or on constate à présent une situation paradoxale avec de la part de l'Etat différentes menaces permanentes de réduction de l'offre de service public avec le non-remplacement des fonctionnaires et une forte mobilisation de la part des usagers qui réclament des services de qualité. Sous prétexte de modernisation du Trésor public, c'est l'ensemble du territoire que l'on « déménage » sans concertation et avis préalables des élus locaux, des usagers et du personnel. Des expérimentations sont menées dans quelques départements avec pour but de définir de nouvelles formes d'organisation de l'offre de service avec notamment un décloisonnement des services et une multiplication de partenariats. Aussi il lui demande de bien vouloir geler les décisions de fermeture de ces établissements tant qu'un bilan ne sera pas tiré des expériences en cours d'application et de réunir tous les acteurs concernés afin qu'un véritable dialogue puisse en amont nourrir la réflexion de la direction générale de la comptabilité publique.
Réponse en séance, et publiée le 7 janvier 2004
FERMETURES DE PERCEPTIONS EN HAUTE-GARONNE
M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen, pour exposer sa question, n° 531, relative aux fermetures de perceptions en Haute-Garonne.
M. Pierre Cohen. Monsieur le président, le Gouvernement ne prend pas au sérieux les questions orales. J'en suis étonné, voire choqué ! L'avantage de cette procédure par rapport à celle des questions écrites est de pouvoir échanger avec le ministre en charge du sujet. Certes, le ministre concerné peut avoir des difficultés à être présent. Mais je trouve triste que, sur plusieurs questions aussi différentes et aussi importantes les unes que les autres, un seul ministre - qui, je le comprends, ne peut être compétent dans tous les domaines - soit là pour nous répondre.
Ma question d'aujourd'hui s'adresse à M. Francis Mer qui a réponse à tout au cours des questions d'actualité (Sourires) et qui aurait pu nous offrir l'occasion d'un échange particulièrement intéressant.
Elle concerne les inquiétudes éprouvées par les maires de ma circonscription, représentatives alors du climat de malaise généralisé qui règne parmi les élus des collectivités territoriales : un cadre budgétaire particulièrement tendu depuis quelques mois, un contexte d'incertitude liée à la décentralisation, auxquels sont venues s'ajouter récemment la restructuration de La Poste et des perceptions, le désengagement de l'Etat dans le financement des transports en commun des agglomérations et bien d'autres décisions...
Dans le seul département de la Haute-Garonne, six perceptions - après les douze fermetures dans l'Hérault - disparaîtront dès le début de l'année 2004. Le démantèlement du Trésor public est en route ! Or la plupart de ces peceptions, comme celles de Verfeil et de Lanta, qui sont dans ma circonscription, se situent en zone périurbaine de l'agglomération toulousaine, où la mise en application du schéma directeur, et maintenant du SCOT, va accroître le phénomène d'urbanisation. Dans le canton du Lanta, le dernier recensemenent a permis de mettre en lumière un accroissement de population non négligeable, de près de 50 % depuis 1999 - d'où la récente construction d'un collège de 700 élèves, et l'organisation de différents services à la population. Cela prouve que les collectivités locales entérinent ce phénomène urbain, tandis que l'Etat agit en sens inverse.
Est-il nécessaire de rappeler que le service public fait partie d'un mode d'organisation de notre société ancré dans les valeurs de la République ? Il permet de lutter contre les déséquilibres territoriaux et répond aux demandes de proximité de plus en plus pressantes de nos concitoyens. Or, paradoxalement, l'Etat fait peser en permanence des menaces sur l'offre de services publics en ne remplaçant pas les fonctionnaires - un sur deux, d'après les ministres, qui s'en glorifient et considèrent qu'ils relèvent ainsi une sorte de défi - tandis que les usagers se mobilisent pour réclamer des services de qualité.
Sous prétexte de moderniser le Trésor public, c'est l'ensemble du territoire que l'on « déménage », sans concertation et avis préalable des élus locaux, des usagers et même du personnel.
Des expérimentations, dans le cadre de l'avant-dernier CIADT, avaient été proposées par le Gouvernement. Quatre départements avaient été désignés.
Monsieur le ministre, pouvez-vous transmettre ma question à M. Mer ? Serait-il possible de geler les décisions de fermeture de ces établissements tant qu'un bilan des expérimentations n'aura pas été dressé ? Ainsi pourrait-on connaître exactement les réflexions et le propositions auxquelles un véritable dialogue avec les acteurs concernés pourrait aboutir.
M. le président. la parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député Cohen, je suis en effet chargé de représenter M. Francis Mer, qui n'a pas pu venir ce matin. Croyez bien que j'aurai à coeur de lui faire part de vos réflexions. Je vais déjà vous donner des éléments de réponse concernant le cas de la Haute-Garonne, qui vous préoccupe.
La fermeture de six trésoreries a effectivement eu lieu au 1er janvier 2004, en application d'arrêtés ou de décrets pris au cours de l'année dernière. Il s'agit d'abord des postes comptables de Saint-Martory, Le Fousseret et Lanta, qui disposaient de deux emplois de catégorie B ou C et faisaient déjà l'objet d'une gestion conjointe avec Saliès-du-Sarlat, Carbonne et Caraman, depuis plusieurs années. La fermeture de ces trois postes permet de renforcer les trois postes principaux auxquels ils étaient rattachés et la qualité du service rendu à l'usager. A la suite de la fermeture du poste de Cadours, le poste de Grenade dispose désormais de neuf agents pour exercer l'ensemble de ses missions. Par ailleurs, un dispositif de permanences sera prochainement mis en place à Cadours.
Toujours dans votre département, un nouveau centre des impôts a été installé dans le même bâtiment que le poste comptable de Balma. Ce réaménagement permet aux usagers de trouver en un lieu unique la réponse à leurs interrogations, tant sur l'assiette que sur le recouvrement de leurs impôts. C'est pour cette raison que le recouvrement des impôts des trésoreries de Villemur-sur-Tarn, Verfeil et Montastruc-la-Conseillère a été rattaché à la trésorerie de Balma.
Ces trois trésoreries, qui voient leur activité réduite, sont supprimées, mais un nouveau poste a été implanté à Montastruc, site retenu en raison de sa position géographique centrale. Le ressort de ce nouveau poste spécialisé dans le service public local permet de répondre à la logique actuelle de la construction intercommunale. Enfin, un dispositif de permanences sera mis en place à Villemur.
Ces réorganisations visent à améliorer la qualité du service aux usagers, ainsi que l'efficacité du travail des agents. De nombreuses démarches peuvent aujourd'hui s'effectuer par informatique, par prélèvement mensuel, et il n'y a plus de placements CNP depuis le 1er janvier, ce qui fait que l'activité de ces installations est en diminution importante. Certains sites ne pratiquent que deux ou trois actes par jour. La concertation a eu lieu avec les agents au niveau des commissions techniques paritaires et avec les maires concernés par l'intermédiaire du TPG.
On rejoint là le projet de réforme du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, « Bercy en mouvement », qui comporte un important volet de réorganisation des services déconcentrés. Ce volet territorial n'a pas pour objectif principal de faire des économies en termes d'emplois, mais d'adapter l'organisation et l'implantation des services aux besoins des usagers et aux évolutions réglementaires, technologiques et urbanistiques. Une démarche visant à adapter les modes de présence du Trésor public aux attentes de ses partenaires est ainsi engagée. Le regroupement des activités sur une trésorerie plus importante doit permettre d'optimiser le fonctionnement des services en constituant des entités dotées d'équipes renforcées, où le comptable et ses collaborateurs seront plus disponibles pour les usagers. C'est le cas pour les six trésoreries de la Haute-Garonne.
Ensuite, des permanences peuvent être organisées selon une périodicité adaptée aux attentes des partenaires du Trésor public afin de préserver la proximité et l'accessibilité des services. Les opérations de réorganisation sont conduites en concertation avec les élus pour que chaque projet de restructuration aboutisse au dispositif le mieux adapté à la situation locale. C'est ce qui a été fait dans votre département avec tous les maires concernés.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen.
M. Pierre Cohen. Monsieur le ministre, vous ne pouvez évidemment pas connaître ce dossier et vous n'avez fait que lire la note technique du ministère des finances, mais la réponse que vous m'avez communiquée est complètement absurde pour plusieurs raisons.
D'abord, parce que les quelques renforts qu'elle mentionne ne compensent en rien les effets destructeurs des fermetures de trésoreries. On ne peut donc pas parler de renforcement de l'efficacité et d'amélioration du service en l'adaptant à la situation locale ; compte tenu des caractéristiques de ce bassin de vie, je considère même qu'un tel raisonnement est caricatural. Ce canton qui appartient à la couronne de l'agglomération toulousaine a en effet connu, ces dix dernières années, une augmentation de 50 % de sa population et l'essor démographique ne fera que s'amplifier dans les années qui viennent. L'argument classique de la désertification rurale ne tient absolument pas.
Deuxièmement, je connais très bien les élus et je peux vous garantir qu'ils n'ont été informés du projet que le jour même où la décision de fermeture a été annoncée. L'argument du débat public est donc tout aussi faux. Ce que vous proposez aux élus, c'est une pseudo-concertation. Les salariés, n'en parlons pas !
Il faut le dire, le seul motif est la recherche de rentabilité, et puisque vous êtes solidaire de votre gouvernement, donc favorable au remplacement d'un seul départ à la retraite sur deux, vous auriez pu au moins sauter la phrase indiquant que cette opération-là n'est pas faite pour accompagner la diminution du nombre de fonctionnaires.
Sur la forme aussi bien que dans le contenu, cette réponse me semble déplorable.
Auteur : M. Pierre Cohen
Type de question : Question orale
Rubrique : Ministères et secrétariats d'état
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 janvier 2004