Question orale n° 629 :
accidents

12e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Kucheida
Pas-de-Calais (12e circonscription) - Socialiste

M. Jean-Pierre Kucheida interroge M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la sécurité routière. Récemment, M. le Premier ministre a déclaré que la mortalité sur les routes françaises avait diminué et annoncé des chiffres destinés à doper la cote de popularité de son Gouvernement, ce qui l'amène à intervenir sur les lacunes des statistiques de sécurité routière. Pour la convention de Vienne de 1968, une victime de la route « est considérée comme tuée si elle décède sur le coup ou dans les trente jours qui suivent l'accident ». La plupart des pays utilisent cette définition, sauf la France et le Portugal, où la mort est prise en compte si elle survient dans un délai de six jours. Or on estime qu'il faut rajouter près de 6 % de décès qui surviennent ultérieurement, jusqu'à trente jours après l'accident. Il en résulte une sous-estimation de la morbidité routière de l'ordre de 6 à 9 %. Ce qui signifie que, au lieu de comptabiliser 6 000 tués chaque année sur les routes, la France pourrait en comptabiliser 500 à 700 de plus. Il paraît donc important que soient publiés les chiffres à trente jours, et non une donnée pondérée par un coefficient, peu fiable en définitive, et ce afin que la population française soit en mesure d'avoir une vue plus large et plus juste sur l'ensemble des victimes de la route. On peut penser que lorsqu'on pourra établir un bilan exhaustif de la morbidité routière l'insécurité routière sera reconnue par une part plus importante de l'opinion publique comme un problème majeur de santé publique, justifiant des mesures, des moyens et des contraintes d'une autre ampleur que celles d'aujourd'hui. Il lui demande ce qu'il compte faire à ce sujet.

Réponse en séance, et publiée le 25 février 2004

MODE D'ÉLABORATION DES STATISTIQUES
SUR LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Kucheida, pour exposer sa question n° 629, relative au mode d'élaboration des statistiques sur la sécurité routière.
M. Jean-Pierre Kucheida. Monsieur le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, il faudra dire à M. le ministre des transports que, si j'ai un peu de retard, c'est parce que j'ai mis quarante-cinq minutes pour aller de Roissy jusqu'à Saint-Michel, c'est-à-dire la moitié du temps qu'il m'a fallu pour venir de ma dernière escale, Rome, jusqu'à Paris. C'est vous dire qu'il y a dans le domaine des transports encore beaucoup de choses à faire, en particulier pour améliorer les liaisons entre les aéroports et le centre de la capitale. (Sourires.)
M. le Premier ministre a récemment annoncé une diminution de la mortalité sur les routes françaises, en s'appuyant sur des chiffres destinés à doper la cote de popularité de son gouvernement. Ma question porte sur ces chiffres et sur ce que l'on peut appeler les lacunes des statistiques de sécurité routière.
Selon la Convention de Vienne, signée en 1968, une victime de la route est considérée comme tuée si elle décède sur le coup ou dans les trente jours qui suivent l'accident. La plupart des pays utilisent cette définition, sauf, monsieur le ministre, la France et le Portugal, pour qui la mort est prise en compte si elle survient dans un délai de six jours. Or, on estime que près de 6 % de décès surviennent ultérieurement, jusqu'à trente jours après l'accident. Il en résulte donc une sous-estimation de la mortalité routière de 6 à 9 %, ce qui signifie qu'au lieu de 6 000 tués chaque année sur les routes, la France devrait en comptabiliser de 500 à 700 de plus.
Il me paraît important que soient publiés les chiffres de la mortalité à trente jours. Je pense que nous devrions nous aligner sur la plupart des pays européens et ne plus nous baser sur une donnée pondérée par un coefficient, peu fiable en définitive, pour offrir à la population française une vision plus large et plus juste du nombre des victimes de la route.
Naturellement, je me réjouis de la baisse de la mortalité routière, qui est réelle, je tiens à le dire, mais on peut penser que, lorsqu'elle disposera d'un bilan exhaustif, l'opinion publique reconnaîtra encore plus largement l'insécurité routière comme étant un problème majeur de santé publique, justifiant des mesures, des moyens et des contraintes d'une autre ampleur que ceux qui lui sont consacrés aujourd'hui.
Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement à ce sujet ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, c'est à la place de M. Gilles de Robien que je répondrai à votre question concernant la clarification des statistiques en matière de mortalité routière.
Les conséquences des accidents de la route, effectivement, ne s'arrêtent pas aux accidents immédiatement constatés, puisque de nombreuses victimes - malheureusement - décèdent plusieurs jours après l'accident, parfois même longtemps après.
La définition du tué dans les statistiques de sécurité routière pose un problème réel. La Convention de Vienne, qui date de 1968, précise qu'une victime d'un accident de la route est considérée comme tuée « si elle décède sur le coup ou dans les trente jours qui suivent l'accident ».
La France, quant à elle, comptabilise les tués des accidents de la route jusqu'à six jours après la date de l'accident. On peut penser que ce choix a été fait afin de concilier la précision et l'exigence de mise à disposition rapide du fichier des accidents. En effet, tenir compte des décès dans les trente jours implique une remontée jugée souvent trop tardive des informations et des contraintes de suivi très importantes pour les forces de l'ordre chargées de collecter les données.
Face à ces différences de définition et afin de permettre des comparaisons internationales, la France, comme vous le soulignez, utilise un coefficient correctif de 5,7 %. Ainsi, selon des données provisoires, d'après les 5 732 tués décédés dans les six jours qui ont été enregistrés en 2003, on estime à 6 059 le nombre des tués à trente jours, soit 327 de plus.
En termes de statistiques, il faut comparer des choses comparables, et le Gouvernement, pour annoncer au début de l'année la forte baisse du nombre de tués sur les routes françaises, a utilisé les mêmes données statistiques et les mêmes correctifs qu'en 2002, et non, bien sûr, le nombre des tués à trente jours. La comparaison est donc valable.
La plupart des pays européens ont adopté la définition que vous préconisez, fixant le délai de la mort à trente jours. Il est donc difficile pour la France de rester isolée au milieu de ses voisins.
C'est la raison pour laquelle le comité interministériel de sécurité routière, qui s'est tenu le 13 janvier 2004, a décidé d'adopter la définition du tué à trente jours dans le recueil des statistiques de sécurité routière, à compter de 2005. Ce délai permettra, entre autres, la mise aux normes des logiciels de saisie des accidents corporels.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Kucheida.
M. Jean-Pierre Kucheida. Monsieur le ministre, je me réjouis de cette nouvelle importante, que j'ignorais. Nous savons en effet qu'un coefficient correctif n'est que plus ou moins correctif.
La nouvelle mesure apportera la transparence nécessaire aux statistiques et permettra une juste comparaison des différentes statistiques européennes.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Kucheida

Type de question : Question orale

Rubrique : Sécurité routière

Ministère interrogé : équipement, transports et logement

Ministère répondant : équipement, transports et logement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 février 2004

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