établissements
Question de :
Mme Marie-Françoise Clergeau
Loire-Atlantique (2e circonscription) - Socialiste
Mme Marie-Françoise Clergeau interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la réalisation du programme de construction de nouveaux établissements pénitentiaires. En effet, la surpopulation carcérale, qui ne cesse de croître depuis dix-huit mois, atteint des chiffres record. À Nantes, par exemple, la maison d'arrêt située en plein centre ville compte 400 détenus pour 290 places. Les conditions de travail du personnel pénitentiaire et les conditions de vie quotidienne des détenus s'en trouvent considérablement dégradées. Pour Nantes, deux mesures sont annoncées : la construction d'un établissement pour mineurs d'une capacité de 60 places et la livraison d'une cinquantaine de places pour la maison d'arrêt. Elle lui demande de bien vouloir lui donner des précisions sur ces projets.
Réponse en séance, et publiée le 25 février 2004
ÉTAT D'AVANCEMENT DU PROGRAMME DE CONSTRUCTION D'ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES À NANTES
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour exposer sa question n° 630, relative à l'état d'avancement du programme de construction d'établissements pénitentiaires à Nantes.
Mme Marie-Françoise Clergeau. Madame la secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, je souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux sur la réalisation du programme de construction de nouveaux établissements pénitentiaires, et plus précisément sur l'avenir de la maison d'arrêt de Nantes.
Vous le savez, il s'agit d'un établissement ancien, dont la conception date du xixe siècle. Il n'est plus adapté aux normes de sécurité actuelles. Les conditions de travail du personnel pénitentiaire se dégradent dans des proportions alarmantes du fait de la vétusté de l'établissement et de la surpopulation grandissante. Les 109 cellules prévues pour 290 détenus sont aujourd'hui occupées, dans des conditions inhumaines, par une moyenne record de 420 détenus.
Récemment, afin de répondre aux critiques concernant le nombre croissant de matelas posés à même le sol, une trentaine de lits a été rajoutée dans des cellules déjà surpeuplées : que six détenus se retrouvent dans une cellule de quinze mètres carrés n'a rien d'exceptionnel. Au contraire, une telle situation est devenue la norme. Elle signifie concrètement six lits, six chaises, deux armoires et une table. L'espace restant disponible est inadapté à la vie quotidienne de six personnes. Sur l'ensemble de la maison d'arrêt, une telle situation se traduit par un accès réduit aux douches, par une promiscuité génératrice de tensions et de bagarres et par une dégradation générale des conditions de vie.
Je tiens à rappeler que Mme Marylise Lebranchu, prédécesseur de M. Perben au ministère de la justice, avait prévu et annoncé publiquement au nom de l'Etat la fermeture de cet établissement et la construction d'une nouvelle maison d'arrêt à Nantes.
J'ai interrogé à deux reprises, en juillet et en décembre 2003, M. Bédier, votre prédécesseur au secrétariat d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, sur l'avenir de la maison d'arrêt de Nantes. Le 24 décembre dernier, il m'a répondu que la construction sur le territoire de la commune de Nantes d'un établissement pour mineurs d'une capacité de soixante places était prévue, ainsi que la livraison avant la fin de l'année 2004 d'une cinquantaine de places pour la maison d'arrêt.
Je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, de bien vouloir apporter quelques précisions concernant ce projet.
En effet, l'actuel quartier des mineurs de la maison d'arrêt compte seize places. Or, la moyenne d'occupation est de treize personnes mineures détenues. Pourquoi dès lors prévoir un établissement de soixante places ? Devons-nous comprendre qu'il intégrera les détenus mineurs de toute la région au risque de les éloigner géographiquement de leurs familles, ce qui réduira la fréquence des visites de leurs proches ? Or, chacun le sait, le maintien du lien familial contribue à la réussite d'une future réinsertion.
De même, l'annonce de la création de cinquante places supplémentaires pour la maison d'arrêt suscite des interrogations : devons-nous supposer que vous envisagez la rénovation de l'établissement actuel ou que vous créez cinquante nouvelles places ? Dans ce dernier cas, quelle sera la structure ?
C'est la raison pour laquelle, madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de nous préciser votre programme en répondant aux trois questions suivantes. Première question : les soixante places pour mineurs concernent-elles toutes la région Ouest ? Deuxième question : quel est l'établissement qui accueillera les cinquante nouvelles places de la maison d'arrêt avant la fin de l'année 2004 ? Troisième question : alors que la ville de Nantes a donné son accord pour la reconstruction de la maison d'arrêt sur un autre site, l'Etat respectera-t-il son engagement relatif à la fermeture de la maison d'arrêt actuelle et à quelle échéance ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice.
Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Madame la députée, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Dominique Perben, garde des sceaux, auquel vous avez posé cette question. Mais je suis heureuse de pouvoir y répondre puisqu'elle entre précisément dans le champ des attributions de mon secrétariat d'Etat.
Vous avez appelé mon attention sur la réalisation du programme de nouveaux établissements pénitentiaires et sur les mesures particulières concernant le territoire de la commune de Nantes.
Le programme de construction de 13 200 places de détention, annoncé le 21 novembre 2002, doit permettre de remédier aux difficultés actuelles de surpopulation carcérale.
Ce programme prévoit la construction de 10 800 places nouvelles, de 2 000 places réservées à de nouveaux concepts d'établissements et de 400 destinées à l'accueil des mineurs.
Dans ce cadre, la construction, dans l'agglomération nantaise, d'un établissement pour mineurs d'une capacité de soixante places a été décidée. Le site d'Orvault a été choisi en concertation avec les élus locaux. Un appel d'offres est en cours et l'achèvement des travaux est prévu pour la fin de l'année 2006.
L'ouverture de cet établissement permettra de ne plus incarcérer de mineurs dans l'actuelle maison d'arrêt et donc de les séparer totalement des détenus adultes. Les jeunes détenus y bénéficieront de programmes éducatifs intensifs pour préparer leur réinsertion.
De plus, sera construit à Nantes un établissement d'une capacité de 150 à 200 places, basé sur un concept pénitentiaire innovant permettant une préparation à la réinsertion encore plus approfondie. Destiné notamment aux détenus adultes purgeant de courtes peines ou en fin de peine et qui sont incarcérés actuellement à la maison d'arrêt de Nantes faute de places en établissements pour peines, ce nouvel équipement constitue une réponse réelle et effective à la surpopulation que connaît aujourd'hui cette maison d'arrêt. Comme vous le savez, les recherches foncières correspondantes se déroulent en étroite concertation avec les collectivités territoriales, et notamment avec la commune de Nantes.
Répondre à la surpopulation, c'est d'abord prévoir le nombre de places suffisant pour permettre l'exécution des peines de prisons prononcées par les tribunaux. Il s'agit ainsi, par la création de nouveaux établissements, d'améliorer les conditions de travail des personnels et d'humaniser les conditions de détention.
Comme vous le savez, madame la députée, ma détermination à répondre au plus vite à ces défis est totale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.
Mme Marie-Françoise Clergeau. Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, pour ces informations, dont la plupart, cependant, m'avaient déjà été communiquées en décembre dernier.
Je remarque que vous ne répondez pas sur les cinquante places complémentaires que vous vous êtes engagée à ouvrir d'ici à la fin de l'année 2004 pour pallier la surpopulation dans la maison d'arrêt. Vous ne mentionnez pas non plus la date prévue pour la construction du nouveau centre pénitentiaire.
La situation de la maison d'arrêt de Nantes constitue toujours un problème très lourd. Je l'ai visitée à deux reprises et vous invite à le faire également : c'est à peine si l'on ose entrer, tant les conditions de détention des prévenus et les conditions de travail du personnel engendrent un sentiment de gêne.
Je n'ai pas trouvé d'élément, dans votre réponse, laissant espérer que vous puissiez, à court terme, d'une part, tenir vos engagements, et, d'autre part, remédier aux conditions inhumaines qui sont vécues actuellement.
Mme la présidente. Souhaitez-vous répondre à Mme Clergeau, madame la secrétaire d'Etat ?
Mme la secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. J'apporterai des précisions ultérieurement à Mme Clergeau.
Auteur : Mme Marie-Françoise Clergeau
Type de question : Question orale
Rubrique : Système pénitentiaire
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 février 2004