Question orale n° 804 :
fonctionnement

12e Législature

Question de : M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste

M. Bruno Le Roux souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l'évolution des effectifs de la police nationale dans la première circonscription de Seine-Saint-Denis. L'abandon du dispositif de la police de proximité n'a eu pour autre conséquence que de renforcer le sentiment d'insécurité dans ces quartiers. Sentiment d'autant plus justifié que certaines villes ont constaté une hausse de la délinquance entre 2002 et 2003 (Epinay-sur-Seine : + 2.32 %). Les commissariats de cette circonscription manquent actuellement d'effectifs pour assurer au mieux leur mission de service public. De ce fait, dans les quartiers populaires et dans des lieux aussi attrayants que le Stade de France ou le marché aux puces de Saint-Ouen, cette carence affecte nos concitoyens tout comme les fonctionnaires de police. 214 gardiens de la paix stagiaires devaient être affectés en Seine-Saint-Denis avant le 1er janvier 2004, 160 autres étaient annoncés avant le 1er avril dernier. En premier lieu, il souhaiterait savoir quelles suites ont été données à ces annonces. Ensuite, quelle est la répartition de ces nouveaux effectifs sur la 1re circonscription de Seine-Saint-Denis. Également, peut-on espérer que des personnels expérimentés pourront être affectés dans cette circonscription difficile afin de renforcer les effectifs actuels des commissariats de Saint-Ouen, Épinay-sur-Seine et Saint-Denis ? Enfin, les travaux prévus pour les commissariats de Saint-Ouen et de la Plaine-Saint-Denis semblent avoir pris du retard par rapport aux dates qui avaient été annoncées. Il souhaiterait donc savoir à quelles dates est désormais attendue leur échéance.

Réponse en séance, et publiée le 9 juin 2004

EFFECTIFS DE POLICE DANS LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION DE SEINE-SAINT-DENIS

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour exposer sa question, n° 804, relative aux effectifs de police dans la première circonscription de Seine-Saint-Denis.
M. Bruno Le Roux. Je tiens à préciser que la question que je vais poser était préparée depuis plusieurs semaines et n'est donc pas liée aux événements dramatiques survenus dans la ville d'Épinay-sur-Seine et à la terreur qui a suivi les cinq agressions qui y ont eu lieu.
Monsieur le ministre délégué à l'intérieur, ma question traduit mon inquiétude face à l'abandon ou, tout au moins, au retrait du dispositif de police de proximité dans les quartiers de la première circonscription de Seine-Saint-Denis, qui n'est pas pour réduire le sentiment d'insécurité chez nos concitoyens ni l'insécurité objectivement mesurée. Dans la ville d'Épinay-sur-Seine, on a même constaté une hausse de la délinquance ces derniers mois malgré la mise en place d'une police municipale et l'annonce par le ministre de l'intérieur de nouveaux efforts, en réponse à une de mes questions précédentes.
Ma question est triple.
Elle porte tout d'abord sur les effectifs. Des annonces avaient été faites à ce sujet : 214 gardiens de la paix devaient être affectés en Seine-Saint-Denis avant le 1er janvier 2004 et 160 autres étaient annoncés avant le 1er avril dernier. Les contacts que je peux avoir me laissent penser qu'ils n'ont pas tous trouvé le chemin de ce département ou qu'ils ne sont pas encore arrivés dans ses commissariats. En tout cas, la présence policière sur le terrain ne témoigne pas d'une augmentation d'effectifs, comme annoncé.
Deuxième constatation : il existe une dramatique carence en matière d'encadrement. Elle n'est pas propre à cette circonscription. C'est souvent le lot aujourd'hui des zones les plus sensibles. Mais, à certains moments, notamment la nuit, si les effectifs de police sont normaux, on constate un grave sous-encadrement de ceux-ci. La réforme que vous envisagez d'appliquer pourra peut-être y remédier. Est-il prévu des changements significatifs ? Il est important à la fois pour les policiers et nos concitoyens que des personnels expérimentés soient affectés dans ces secteurs difficiles.
Ma question porte enfin sur les conditions matérielles d'exercice de la police. J'avais interrogé votre prédécesseur, il y a quelques mois, sur l'état d'avancement des travaux concernant les commissariats de Saint-Ouen et de la Plaine-Saint-Denis. Des retards semblent avoir été pris. Ils sont pour partie bien compréhensibles, notamment pour le second commissariat mais pouvez-vous me préciser à quelles dates est maintenant prévue l'ouverture ou la réouverture de ces commissariats qui permettront aux policiers de travailler dans les meilleures conditions dans la première circonscription de la Seine-Saint-Denis ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement.
M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement. Avant toute chose, permettez-moi, monsieur le député, d'exprimer à nouveau, au nom du Gouvernement, notre indignation et notre colère devant l'agression barbare dont a été victime le jeune Israël à Épinay-sur-Seine et de réaffirmer notre détermination dans la lutte contre l'antisémitisme et le racisme. L'appel à la mobilisation dépasse, vous le savez, la seule action gouvernementale ; elle engage chacune et chacun de nos concitoyens au nom des valeurs de la République.
Dès vendredi, Dominique de Villepin s'est rendu sur les lieux et les patrouilles ont été intensifiées autour de l'établissement Mekor et des autres lieux de culte ou d'enseignement israélites.
Vous vous préoccupez, légitimement, de la sécurité dans votre circonscription et avez indiqué vos attentes en la matière ainsi que le chemin qui reste à parcourir. Je rappellerai que beaucoup a déjà été fait depuis deux ans dans un domaine où, il est vrai, nous partions de loin.
Tout d'abord, permettez-moi de constater avec vous qu'en 2003, la Seine-Saint-Denis a enregistré un recul de la délinquance générale de 1,4 %. Il est certes faible mais il succédait à une hausse importante les années précédentes. Cette diminution a également été constatée dans les trois circonscriptions de sécurité publique qui vous préoccupent. Je reconnais cependant, que, pour la seule commune d'Épinay-sur-Seine, une hausse de la délinquance générale de 2,3 % a été constatée en 2003.
Dominique de Villepin et moi-même avons reçu hier les élus, toutes tendances confondues, de votre département et avons abordé très librement ces questions et évoqué avec eux les mesures à prendre.
Vous avez rappelé, monsieur le député, l'annonce de deux vagues d'affectations de gardiens de la paix. Ces annonces ont été suivies d'effet : 264 gardiens de la paix stagiaires ont été affectés en Seine-Saint-Denis durant le dernier trimestre de 2003 et 161 autres ont pris leurs fonctions au cours des quatre premiers mois de l'année 2004. Les personnels déployés sont ainsi passés, entre le 1er janvier 1997 et le 1er mai 2004, de 204 à 232 pour Saint-Denis ; de 121 à 139 pour la circonscription de Saint-Ouen et de 134 à 160 pour la circonscription d'Épinay-sur-Seine.
Par ailleurs, les unités départementales et les forces mobiles en renfort sur le département de la Seine-Saint-Denis permettent de consolider le dispositif de sécurité de cette circonscription.
Vous regrettez que des personnels expérimentés ne soient pas présents en assez grand nombre dans le département. Je partage votre analyse : la bonne connaissance du territoire et de la population est en effet un élément important dans le succès des missions confiées aux policiers. Je le constate dans mon propre département de Seine-et-Marne, et c'est vrai pour tous les secteurs qui connaissent ce type de difficultés. La rotation rapide des personnels résulte, vous le savez comme moi, des choix de vie faits par les policiers, qui, après plusieurs années de service, optent pour d'autres départements. Elle résulte aussi du principe de mobilité dans l'administration.
Oui, Dominique de Villepin et moi-même sommes extrêmement attachés à ce que les conditions de travail des policiers soient améliorées afin d'attirer durablement les policiers en Seine-Saint-Denis. Une sous-direction à l'action sociale vient d'être créée à cet effet au sein du ministère. Sa première mission sera de travailler en liaison avec les préfets d'Ile-de-France à la recherche de logements adaptés aux demandes des fonctionnaires de police.
La construction d'un nouveau commissariat dans le quartier de La Plaine-Saint-Denis et l'extension du commissariat de Saint-Denis participent également de cette exigence.
S'agissant du commissariat de Saint-Denis, une estimation du coût de l'opération a pu être faite. Aussi, a-t-il été demandé à la direction de l'évaluation, de la performance et des affaires financières et immobilières d'étudier le financement de cette opération, à hauteur de 1 100 000 euros.
Pour ce qui est du commissariat de La Plaine-Saint-Denis, il s'agit d'une opération d'ampleur, budgétée à hauteur de 5,9 millions d'euros. Le calendrier de cette opération a malheureusement été retardé de quelques mois pour des raisons étrangères au ministère. Des métaux lourds ont en effet été découverts dans le sous-sol de l'emprise de La Plaine-Saint-Denis, nécessitant des études et investissements pour dépolluer le site. De plus, l'appel d'offre, lancé en septembre 2003, a été déclaré infructueux en raison d'un dépassement très important du coût prévisionnel. Cela étant, la notification du marché devrait intervenir au dernier trimestre de cette année et les travaux démarrer au plus tard au début de l'année 2005.
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
M. Bruno Le Roux. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces précisions. Elles fixent un horizon pour l'amélioration des conditions de travail des policiers de ce département.
Permettez-moi de revenir sur deux points.
Premièrement, l'encadrement de la police, est, vous l'avez bien noté, un élément essentiel. Je souhaiterais que, dans la réforme des corps en préparation, puisse être prévu, pour contrebalancer l'aspiration légitime des fonctionnaires à une certaine mobilité, d'accorder certains avantages aux personnels expérimentés qui accepteraient de rester dans une circonscription difficile.
Deuxièmement, si la délinquance générale a reculé dans la première circonscription de Seine-Saint-Denis, il n'en est pas de même des voies de fait les plus traumatisantes pour nos concitoyens, celles qui les marquent le plus et qui sont pour eux la marque par excellence de l'insécurité : à savoir les violences faites aux personnes. Nous avons encore là un combat à mener.

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Roux

Type de question : Question orale

Rubrique : Police

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 juin 2004

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