Question orale n° 892 :
établissements

12e Législature

Question de : M. Bernard Depierre
Côte-d'Or (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Bernard Depierre souhaite attirer l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conséquences économiques pour certaines petites entreprises spécialisées dans la distribution automatique, de l'article 30 de la loi de santé publique. Cet article vise à interdire, au 1er septembre 2005, les distributeurs automatiques de boissons sucrées et de friandises dans les écoles. Cette mesure menace la vie de nombreuses entreprises. Certaines réalisent 100 % de leur chiffre d'affaires dans les écoles. A l'échelle nationale, les professionnels estiment à 1 300 le nombre des emplois qui pourraient disparaître. A l'instar des buralistes, les entreprises de distribution automatique demandent si une aide de l'État pourrait accompagner leur reconversion, compte tenu de la date rapprochée de mise en oeuvre de l'interdiction et de la perte de valeur de leurs fonds. Deux mesures pourraient être étudiées : le report de la date d'application de la loi du 18 septembre 2005 à la fin de chaque contrat établi entre l'entreprise et l'établissement scolaire, pour lui laisser le temps de réorienter sa production et de trouver de nouveaux marchés, mais aussi pour éviter les procédures de rupture de contrat ; la reconnaissance des distributeurs comme points de vente de produits à emporter pour permettre l'abaissement du taux de TVA de 19,6 % à 5,5 % et permettre aux entreprises les plus touchées de dégager des liquidités pour réinvestir, redéployer leur activité et contrer pour partie la perte de valeur de leur fonds de commerce.

Réponse en séance, et publiée le 6 octobre 2004

CONSÉQUENCES DE L'INTERDICTION
DES DISTRIBUTEURS AUTOMATIQUES
DANS LES ÉCOLES

M. le président. La parole est à M. Bernard Depierre, pour exposer sa question, n° 892, relative aux conséquences de l'interdiction des distributeurs automatiques dans les écoles.
M. Bernard Depierre. Je souhaite attirer l'attention de M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire sur les conséquences économiques et sociales de l'article 30 de la loi de santé publique qui peuvent s'avérer fatales pour de nombreuses petites entreprises spécialisées dans la distribution automatique.
En effet, la motivation de cette mesure, qui vise à interdire, au 1er septembre 2005, les distributeurs automatiques dans les écoles est peut-être louable dans le cadre de la lutte contre l'obésité compte tenu de la nature des produits. Cependant, les modalités de mise en oeuvre, notamment avec les ruptures de contrat qu'elle ne va pas manquer d'entraîner, suscitent nombre de débats. En Côte-d'Or, environ quinze entreprises réalisent entre 30 et 90 % de leurs chiffres d'affaires sur le segment des distributeurs placés dans les écoles et, à l'échelle nationale, la chambre syndicale et les professionnels estiment à environ 1 300 le nombre d'emplois appelés à disparaître.
Ces entreprises demandent simplement un accompagnement de l'État à la reconversion de leur activité puisqu'on leur interdit une activité qui était parfaitement codifiée.
Deux mesures pourraient être envisagées : d'une part, le report de la date d'application de la loi du 1er septembre 2005 à la fin des contrats en cours entre les entreprises et les établissements scolaires, qui sont souvent conclus pour deux ou trois ans ; d'autre part, la reconnaissance des distributeurs comme points de vente de produits à emporter, ce qui permettrait aux entreprises d'appliquer, comme d'autres métiers, un taux de TVA de 5,5 % au lieu de 19,5 %. Aujourd'hui, les distributeurs automatiques sont soumis au taux de TVA appliqué aux ventes de produits alimentaires à consommer sur place dès lors que les lieux publics où se trouvent ces distributeurs sont aménagés pour la consommation sur place. Or un ancien arrêt du Conseil d'État, en date du 27 novembre 1957, caractérise la vente à consommer sur place par l'existence d'un service rendu aux consommateurs par le personnel de l'exploitant. Manifestement, les distributeurs n'entrent pas dans cette définition réglementaire.
La conjoncture difficile qui s'annonce pour cette profession est l'occasion de lever cette incohérence réglementaire. Compte tenu des répercussions économiques de l'application de la loi de santé publique, ce serait une aide déterminante pour ces entreprises que de reconnaître leur activité comme une vente de produits à emporter.
Aussi, monsieur le secrétaire d'État, vous serais-je reconnaissant de nous préciser ce que le Gouvernement peut envisager pour soutenir ces entreprises dans cette période de reconversion, notamment si un taux abaissé de TVA pourrait être appliqué sur leurs ventes à venir et si la condamnation de leur activité pourrait intervenir au terme des contrats et non pas, de manière brutale, le 1er septembre 2005.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, vous avez évoqué le mauvais côté d'une mesure qui répond à un objectif de santé publique : la prévention de l'obésité chez les enfants. Cette mesure a été décidée à la suite d'études scientifiques qui ont montré que la prévalence de l'obésité chez les enfants de six à treize ans avait doublé en vingt ans et que les causes n'étaient pas uniquement génétiques mais également le résultat, nous le voyons bien les uns et les autres autour de nous, de nouveaux comportements alimentaires.
Dans ce contexte, le Gouvernement a engagé des actions de prévention, à la fois sous forme d'information et de sensibilisation du public mais aussi d'orientation du comportement alimentaire des enfants, et l'interdiction des distributeurs automatiques de friandises et de boissons dans les écoles s'intègre pleinement dans ce plan d'action.
L'article 30 de la loi de santé publique n'aura qu'un impact limité pour cette profession, qui réalise en effet l'essentiel de son activité dans les entreprises - 75 % de sa clientèle et 65 % de son chiffre d'affaires selon les professionnels eux-mêmes. En outre, vous l'avez rappelé vous-même, la loi s'applique de manière différée, pour permettre aux exploitants de distributeurs de reporter une partie de leur activité vers d'autres clients que les écoles.
À cet égard, il n'est pas envisageable, vous l'aurez compris, de différer au-delà du 1er septembre 2005 l'entrée en vigueur de la loi. Un tel report créerait en outre des distorsions de concurrence entre professionnels.
L'application généralisée du taux de TVA à taux réduit à 5,5 % que vous évoquez n'est pas non plus possible car le régime fiscal en matière de restauration est déterminé, vous l'avez vous-même rappelé, par les conditions de la vente et nous ne pouvons malheureusement qu'appliquer le taux de 19,6 %.
Cependant, votre préoccupation est légitime et je ne veux pas fermer toute porte au dialogue. Si ces deux mesures me paraissent difficiles à mettre en oeuvre, nous pouvons certainement réfléchir ensemble pour envisager d'autres pistes. Je vous propose donc de recevoir rapidement la profession avec vous-même et les ministres concernés, en particulier ceux de l'éducation nationale, du budget et de la consommation, afin de rechercher ensemble des solutions qui répondent aux préoccupations de vos interlocuteurs.
M. le président. La parole est à M. Bernard Depierre.
M. Bernard Depierre. Je voudrais d'abord remercier M. le secrétaire d'État pour son ouverture sur ce sujet, qui, comme d'autres, pose le problème de la réflexion avant l'action. Je suis en effet persuadé que si cette mesure de lutte contre l'obésité figurant dans la loi de santé publique, que j'ai votée, est essentielle, l'on n'a pas mesuré ses conséquences économiques dans cet hémicycle, et encore moins en commission mixte paritaire.
Lutter contre l'obésité, contre la mauvaise qualité des produits, doit être un souci partagé, mais les entreprises assurant la mise en place de ces distributeurs, qui rapportent des subsides aux caisses des écoles et permettent notamment de financer les voyages scolaires, n'auraient pas dû être mises en cause. Ce qui aurait dû être mis en cause, c'est la qualité des produits, car ceux qui sont actuellement distribués de manière automatique dans les collèges, les lycées, seront demain en vente libre dans les commerces de proximité. C'est un vrai problème économique qui résulte d'une absence de réflexion avant l'action.

Données clés

Auteur : M. Bernard Depierre

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 octobre 2004

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