divorce
Question de :
M. Michel Issindou
Isère (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. Michel Issindou attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation suivante : avant la loi de juin 2000 sur le divorce, les prestations compensatoires ont été essentiellement demandées sous forme de rente viagère par les juges. La nature de cette prestation compensatoire, conçue comme une dette forfaitaire par le législateur, est alors devenue une dette alimentaire à vie. Elle est actuellement payée par 56 000 « débirentiers », dont 98 % ont plus de 80 ans et versent depuis plus de 20 ans un montant médian de 457 € par mois (source : ministère de la Justice). Malheureusement le montant des rentes viagères de prestation compensatoire n'a jamais été fixé en fonction des trois critères qui régissent habituellement ce type d'indemnisation, à savoir l'âge du créancier, son espérance de vie et le montant du capital à servir. Si les juges avaient déterminé ces rentes selon de tels critères et notamment en fonction du capital aliéné, les sommes demandées auraient été nettement inférieures. En effet, à situation financière égale, la moyenne des prestations compensatoires versées sous forme de capital par les nouveaux divorcés est de l'ordre de 55 088 €, alors que la moyenne des sommes versées sous forme de rentes viagères est de plus de 156 000 € et correspond à un capital moyen aliéné de 130 000 €. En instituant un barème de conversion en capital à partir de calculs utilisés pour les rentes capitalistiques classiques, la loi sur le divorce du 28 mai 2004 a contribué à aggraver encore cette situation. En effet, en appliquant ce barème, le capital moyen à verser est de 150 000 €, soit par le débirentier lui-même, soit par prélèvement sur héritage, même si celui-ci a été constitué avec l'aide de sa seconde épouse. Malgré les difficultés financières que connaissent de nombreux débirentiers, les possibilités de révision sont très peu utilisées (moins de 2 % des cas) et la conversion en capital joue en la matière un rôle dissuasif. Les révisions sont d'ailleurs fréquemment refusées, au prétexte que les débirentiers peuvent compter sur les revenus de leur seconde épouse, alors que l'évolution de la situation de la première épouse souvent remariée ou vivant en concubinage n'est pas toujours prise en considération. Compte tenu de cette situation, et se faisant le relais des associations de réforme de la prestation compensatoire, il lui demande si, compte tenu des charges financières disproportionnées qu'elle fait peser sur les débirentiers, une révision du barème institué par la loi de 2004 ne serait pas souhaitable. Il désire également connaître les mesures envisagées pour mieux prendre en compte les changements intervenus dans les situations matrimoniales des ex-époux, afin de garantir l'équité des jugements prononcés lors des demandes de révision.
Réponse publiée le 7 octobre 2008
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce prévoit que les prestations compensatoires versées sous forme de rente peuvent être converties en capital à la demande du débiteur, en application de l'article 276-4 du code civil. Le décret n° 2004-1157 du 29 octobre 2004 détermine les modalités de calcul du montant du capital substitué à la rente. Cette substitution n'étant en aucun cas une révision, il est nécessaire que le montant du capital substitué soit équivalent à la rente. Pour ce faire, la substitution d'un capital à la rente ne s'opère techniquement qu'à la date de l'événement y ouvrant droit, en fonction de l'espérance de vie du créancier. Toute autre solution aurait abouti à remettre en cause l'autorité de la chose jugée, l'équilibre des droits fixés par le jugement du divorce et aurait ainsi porté atteinte à la sécurité juridique. Par ailleurs, la réforme précitée a profondément assoupli les conditions dans lesquelles les prestations compensatoires versées sous forme de rente peuvent être révisées. Ainsi, la révision, la suspension ou la suppression de la rente peut être demandée en cas de changement important dans la situation de l'une ou l'autre des parties. Toutefois, la révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement. La représentation nationale, qui a examiné cette question à deux reprises, n'a pas estimé que la rente devait être automatiquement supprimée en cas de remariage du créancier. En effet, le remariage, le PACS ou le concubinage notoire du créancier ne sont pas toujours synonymes d'amélioration de sa situation financière. Cet élément nouveau doit dès lors être apprécié au vu des circonstances propres à chaque cas d'espèce, dans le cadre d'une demande en révision fondée sur l'existence d'un changement important dans la situation de l'une ou l'autre des parties. Par ailleurs, la réforme intervenue en 2004 a créé un nouveau cas de révision, qui s'ajoute au cas précité, depuis le 1er janvier 2005, lorsque le maintien de la rente, fixée sous l'empire de la loi du 11 juillet 1975, produirait un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil, c'est-à-dire en fonction de l'âge, de l'état de santé et de la capacité du bénéficiaire à subvenir à ses besoins. Ces mesures paraissent de nature à concilier de façon satisfaisante les attentes des débiteurs de prestation compensatoire avec la protection des intérêts des créanciers et à répondre au souci de l'honorable parlementaire.
Auteur : M. Michel Issindou
Type de question : Question écrite
Rubrique : Famille
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 22 avril 2008
Réponse publiée le 7 octobre 2008