Question écrite n° 30759 :
Distilbène

13e Législature

Question de : Mme Danielle Bousquet
Côtes-d'Armor (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Danielle Bousquet attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur les conséquences de l'absence en France de législation spéciale en matière de responsabilité des médicaments. En effet, trois récentes décisions rendues par la cour d'appel de Versailles le 7 octobre 2007 mettent en avant les lacunes du droit français à ce sujet. La cour a estimé que la preuve du rôle causal de la molécule du distilbène (DES) dans la pathologie des plaignants peut valablement résulter des analyses et avis des experts. Mais les victimes du DES n'ont pu fournir les ordonnances datant de trente-cinq ans et n'ont pas pu être indemnisées du préjudice subi. Les caisses d'assurance maladie ayant détruit les archives relatives à ces ordonnances, les victimes n'ont pas eu les moyens de démontrer que le distilbène avait été prescrit à leurs mères, et de ce fait qu'elles ont été exposées in utero à ce médicament. Ainsi, en l'absence de preuves certaines de l'exposition au distilbène durant la grossesse de leur mère, ils n'ont pu prouver la faute des laboratoires, alors même qu'il est attesté que leur handicap est la conséquence du DES. Cette décision, qui crée une situation difficile pour les personnes déboutées, suscite de nombreuses inquiétudes pour toutes les autres victimes de ce médicament. Elle lui demande donc d'indiquer à la représentation nationale ce que le Gouvernement entend faire pour que ces personnes se voient attribuer une juste réparation de leur préjudice, ainsi que pour que cette action en responsabilité ne soit pas fermée aux nombreuses autres victimes.

Réponse publiée le 3 novembre 2009

En France, les victimes d'accidents causés par des médicaments ont la possibilité d'agir sur plusieurs fondements afin d'obtenir réparation de leur préjudices : celui de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle (art. 1382 et suivants du code civil), celui de la responsabilité du fait des produits défectueux issue de la loi n° 8-389 du 19 mai 998 (insérée dans le code civil aux articles 1386-1 à 1386-18), ou encore celui de la responsabilité médicale au titre de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, pour toute personne s'estimant victime d'un accident médical, postérieur au 4 septembre 2001. Ces deux derniers régimes de responsabilité instituent, pour les dommages causés par le défaut d'un produit, une responsabilité de plein droit et ne requièrent donc pas la preuve d'une faute. Devant une juridiction, la victime reste cependant tenue de prouver l'existence des autres conditions de la responsabilité, à savoir le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage, si elle agit sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux. Dans le cadre d'une procédure amiable devant la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI), la victime devra uniquement prouver le dommage et l'utilisation d'un produit de santé susceptible d'avoir provoqué ce dommage. Pour mettre en oeuvre la responsabilité extra contractuelle (art. 1382 et 1383 du code civil), la victime doit prouver une faute du responsable, un dommage et le lien de causalité entre cette faute et le dommage. Pour les victimes du diéthylstilbestrol (DES), la difficulté réside dans la preuve de l'administration à leur mère soit du distilbène fabriqué par la société UCB pharma soit du stilboestrol Borne fabriqué par la société Novartis santé familiale, faute de pouvoir produire des ordonnances datant de plusieurs dizaines d'années. La Cour de cassation a considéré, dans un arrêt du 24 septembre 2009 que, lorsque le lien de causalité entre le DES et la pathologie tumorale avait été constaté, il appartenait alors à chacune des entreprises de prouver que son produit n'était pas à l'origine du dommage. En déterminant ainsi la charge de la preuve, la Cour de cassation prend en compte les difficultés des victimes du distilbène en matière de production de documents probants, contemporains de la grossesse de leurs mères.

Données clés

Auteur : Mme Danielle Bousquet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Santé, jeunesse, sports et vie associative

Ministère répondant : Santé et sports

Dates :
Question publiée le 16 septembre 2008
Réponse publiée le 3 novembre 2009

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