Question écrite n° 78073 :
maladies psychiatriques

13e Législature

Question de : M. Gérard Bapt
Haute-Garonne (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Gérard Bapt appelle l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur le projet de réforme de la loi du 27 juin 1990, relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation. En effet, ses récentes annonces suscitent de nombreuses craintes dans les milieux associatifs, craintes relatives notamment à la possibilité qui serait donnée aux psychiatres de procéder à l'internement d'un patient non consentant sans l'accord d'un tiers, ainsi qu'à la possibilité de refuser la sortie d'un patient même si un tiers la demande. Cette volonté de renforcer le pouvoir psychiatrique ne semble pas accompagnée d'une volonté de renforcer les contrôles sur les procédures d'internement, contrôles déjà insuffisants dans la pratique puisque, selon différentes études, les visites de contrôles prévues à l'article L. 3222-4 du code de la santé publique ne sont pas suffisamment effectuées. Elle a plusieurs fois répété son attachement au respect des droits fondamentaux et des libertés individuelles des patients atteints de troubles mentaux. Or, en l'état actuel des annonces, il ne semble pas que ces droits fondamentaux et ces libertés individuelles puissent être convenablement garantis par la future réforme. Il souhaite donc connaître ses intentions quant aux dispositions qui garantiront le respect des droits fondamentaux, des libertés individuelles et de la dignité des patients dans la future réforme.

Réponse publiée le 26 octobre 2010

Le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, déposé le 5 mai 2010 à l'Assemblée nationale, a été élaboré en concertation avec les associations de patients, de familles de patients et de représentants des psychiatres et s'inscrit dans les recommandations des évaluations menées par les inspections générales des différents ministères concernés. Sans remettre en question les fondements du dispositif actuel qui permet une prise en charge, soit à la demande d'un tiers, le plus souvent un membre de la famille, soit sur décision du préfet, il a pour principal objectif de remédier aux carences du dispositif légal actuel et de garantir l'accès et la continuité des soins des personnes présentant un trouble mental qui ne ressentent pas la nécessité de ces soins ou ne peuvent en exprimer le besoin en raison de leurs troubles. Parmi les mesures retenues en ce sens, il est proposé de remédier à l'absence de tiers, ce problème ayant été identifié par les rapports d'évaluation de la loi du 27 juin 1990 et par nos partenaires comme un défaut majeur du dispositif auquel il importait de remédier. En effet, deux situations problématiques se rencontrent fréquemment sur le terrain : l'impossibilité d'identifier un proche en raison de l'isolement social du patient ou le refus de l'entourage du patient à assumer la responsabilité d'une demande d'enfermement, par crainte d'une détérioration du lien affectif avec le patient ou de la relation de confiance avec lui. C'est pourquoi, après avoir expertisé différentes solutions qui se sont avérées peu fonctionnelles, il est proposé qu'en l'absence de tiers, le patient puisse désormais être admis dans un établissement de santé dans le cadre d'une disposition spécifique visant les seules situations de péril imminent. Ce dispositif exceptionnel s'accompagne de garanties particulières : trois avis médicaux différents seront requis dans les trois premiers jours des soins. En outre, les directeurs d'établissement devront rechercher et informer dans les vingt-quatre premières heures toute personne susceptible d'agir dans l'intérêt du patient, dans le respect du secret médical. Enfin, les commissions départementales des soins psychiatriques, qui se substitueront aux actuelles commissions départementales des hospitalisations psychiatriques, seront immédiatement informées du recours à cette procédure exceptionnelle. Une autre mesure du projet de loi vise à résoudre une seconde difficulté concernant le dispositif actuel de l'hospitalisation sur demande d'un tiers (HDT). Ce dernier prévoit que la levée de l'hospitalisation est acquise dès lors qu'elle est demandée par certains membres de la famille ou par le tiers ayant formulé la demande d'hospitalisation, même si le psychiatre traitant est persuadé que la personne a encore besoin de soins et qu'elle n'est toujours pas apte à y consentir. Face à cette situation, le droit ne laisse aujourd'hui comme alternative que la sortie du patient, ou la transformation de l'HDT en hospitalisation d'office (HO), si les critères de cette dernière sont remplis (sûreté des personnes compromise ou trouble grave à l'ordre public). Dans la négative, la sortie du dispositif de l'HDT risque de s'accompagner d'une interruption du traitement du fait du patient. Ces dispositions posent donc un réel problème au regard de la continuité des soins nécessaires, susceptible d'inciter les médecins à demander la poursuite des soins sous la forme d'une HO. C'est pourquoi le projet de loi permet de maintenir la mesure de soins sans consentement lorsque le psychiatre est d'avis que la levée de la mesure demandée par un tiers mettrait en danger la santé du malade. Toutefois le maintien de la mesure s'accompagne de l'obligation faite au directeur d'informer par écrit le demandeur sur les voies de recours et notamment sur le droit de saisir le juge des libertés et de la détention pour demander la sortie immédiate de la personne maintenue en hospitalisation. Ces assouplissements apportés par le présent projet en faveur de l'accès aux soins des personnes en souffrance exigent en contrepartie un renforcement des droits de ces personnes et des garanties du respect de leurs libertés individuelles. Sur ce point, le texte prend en considération les recommandations européennes et celles du contrôleur général des lieux de privation de liberté. À ce titre, il prévoit l'information régulière des patients sur leurs droits, notamment de recours, et sur leur état de santé, ainsi que la possibilité de formuler des observations sur les décisions les concernant ; il recentre par ailleurs le rôle des actuelles commissions départementales des hospitalisations psychiatriques en prévoyant l'examen systématique des situations les plus sensibles, consacre la définition jurisprudentielle du tiers et renforce les conditions de révision de la situation des patients en soins sans consentement sur demande d'un tiers en imposant un examen collégial au bout d'un an. Enfin, dans tous les cas de soins sans consentement à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent, la levée des soins est de droit si elle est demandée par la commission départementale des soins psychiatriques, par le juge des libertés et de la détention ou par le représentant de l'État dans le département.

Données clés

Auteur : M. Gérard Bapt

Type de question : Question écrite

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : Santé et sports

Ministère répondant : Santé et sports

Dates :
Question publiée le 4 mai 2010
Réponse publiée le 26 octobre 2010

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