Question au Gouvernement n° 1028 :
croissance

13e Législature

Question de : M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2009

CRISE ÉCONOMIQUE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, chaque minute qui passe, un salarié français perd son emploi. La récession frappe désormais tout le monde, sur tous les territoires. Elle entraîne chaque jour la fermeture de cent entreprises. Elle creuse chaque semaine le déficit public d'un milliard d'euros. Elle accroît chaque mois la dette de 20 milliards d'euros.
Vous reconnaissez enfin que la récession sera longue ; mais là où les États-Unis et l'Allemagne consentent un effort jamais vu, à la mesure de ce défi historique, votre plan de relance reste totalement insuffisant et se trouve largement dépassé par l'ampleur de la crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ce n'est pourtant pas faute, monsieur le Premier ministre, de vous avoir alerté et de vous avoir présenté nos propositions - propositions que vous avez ignorées au lieu d'en débattre avec nous. La réécriture du budget à laquelle vous êtes désormais contraint pourrait représenter une opportunité mais ce sera, encore une fois, une occasion manquée.
Vous refusez d'admettre vos erreurs. Vous persistez à défendre vos expériences hasardeuses, celles qui, hier, ont freiné la croissance et qui, aujourd'hui, étouffent la relance : le paquet fiscal, le bouclier fiscal, l'encouragement aux heures supplémentaires plutôt que le soutien à l'emploi, la destruction massive de l'emploi public, le gel des salaires.
Eh bien, monsieur le Premier ministre, votre urgence à vous est la révision complète de vos dogmes libéraux. Combien faudra-t-il de licenciements, de faillites, de déficits, (" Cinq, quatre, trois... " sur les bancs du groupe UMP), pour que vous libériez la France des boulets (" ...deux, un, zéro ! " sur les mêmes bancs) que vous lui avez mis au pied ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, dans quelques jours vous allez discuter du collectif budgétaire qui permettra le financement des mesures décidées à l'issue de la négociation sociale du 18 février dernier. Avec ce collectif, le déficit pour 2009 frôlera les 100 milliards d'euros, soit 50 milliards d'euros supplémentaires, dont 30 milliards liés aux dépenses du plan de relance et 20 milliards à un défaut de recettes consécutif à la situation économique.
Je tire de ces chiffres deux observations.
D'abord, avec 30 milliards d'euros de crédits budgétaires inscrits en 2009 pour la relance, contrairement à ce que vous dites, nous faisons jeu égal avec les plans de relance de l'Allemagne et du Royaume Uni. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Maxime Gremetz. Oui, ce n'est pas plus brillant !
M. François Fillon, Premier ministre. Or, dans le même temps, tous les experts prévoient une baisse du PIB de l'ordre de 1,5 % en France, contre 3 % en Allemagne, 3,1 % au Royaume Uni ; aux États-Unis, qui vont connaître leur seconde année consécutive de récession, la baisse sera de 1,9 % ; et je ne m'étendrai pas sur la panne de croissance du moteur asiatique, sinon pour mentionner la baisse prévue de 6,6 % du PIB japonais.
Vous conviendrez avec moi, monsieur Ayrault, qu'il est curieux que les plans de relance que le parti socialiste porte aux nues en permanence (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) aboutissent à des résultats, en termes de croissance, inversement proportionnels à l'effort que vous nous appelez à consentir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ensuite, je tiens à souligner avec gravité (" Cinq, quatre, trois, deux... " sur les bancs des groupes SRC et GDR)...
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, le Premier ministre peut s'exprimer le temps qu'il souhaite ; c'est une constante sous la Ve République. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Maxime Gremetz. C'est scandaleux !
M. le président. Il n'y a jamais eu d'exception !
Poursuivez, monsieur le Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Je tiens donc à faire une seconde remarque avec gravité.
Avec les plans de relance mis en oeuvre, les déficits publics vont atteindre des records : plus de 10 % du PIB aux États-Unis, près de 10 % au Royaume Uni et plus de 5 % en France.
La crise est née d'un excès d'endettement des ménages. (Vives protestations sur les bancs du groupe GDR.)
Mme Jacqueline Fraysse. C'est honteux !
M. François Fillon, Premier ministre. Aux Etats-Unis !
Vous conviendrez donc avec moi, monsieur Ayrault, qu'il serait bien curieux que la solution de cette crise réside dans un excès d'endettement des États. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Certes, cette crise va être longue. Dans le monde entier, on jugera les dirigeants à leur honnêteté, à leur sang-froid et à leur courage. Les dirigeants, monsieur Ayrault, ce sont d'abord les gouvernements qui sont responsables, ce sont les majorités qui les soutiennent, mais c'est aussi l'opposition que j'appelle, en l'occurrence, à davantage de responsabilité. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Ayrault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique économique

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2009

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