chefs d'entreprise
Question de :
M. François de Rugy
Loire-Atlantique (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2009
PLAFONNEMENT DES SALAIRES DES DIRIGEANTS
M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.M. François de Rugy. Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a déclaré à la télévision, après le sommet social du 18 février, que la priorité devait désormais aller à la justice sociale. Il y a cependant un sujet qu'il a totalement évacué : celui des écarts de salaire et de revenu. Pourtant, depuis dix ans, en France, le patrimoine des 10 % des foyers les plus aisés a augmenté dix fois plus que celui des 10 % des foyers les moins aisés. Plus concrètement encore, concernant les salaires, la presse s'est récemment fait l'écho des rémunérations des dirigeants, dans le secteur des banques par exemple : plus de 3 millions d'euros pour le patron de la BNP, plus de 1,5 million pour celui du Crédit Agricole, ou encore 850 000 euros pour celui de la Société Générale.
Il est vrai que votre gouvernement ne donne pas l'exemple, monsieur le Premier ministre : on se souvient que, quelques mois après son installation à l'Élysée, Nicolas Sarkozy a demandé, et obtenu, que son salaire soit triplé. (" Démago ! " sur les bancs du groupe UMP.) Tout récemment encore, un ancien ministre, devenu président de l'Autorité des marchés financiers, a également demandé à ce que son salaire soit augmenté. Avant lui, - comble de l'indécence ! - c'était le dirigeant de la structure qui a remplacé l'ANPE qui avait fait de même.
Au moment même où les Français voient se multiplier les chômages partiels et les licenciements, qui entraînent inévitablement des pertes importantes de revenus, que comptez-vous faire sur ce front ?
Aux États-Unis, le Président Obama a déclaré que les salaires des dirigeants des organismes publics, para-publics ou de toute entreprise ayant bénéficié d'une aide publique devraient désormais être plafonnés à 500 000 dollars, soit 380 000 euros. Monsieur le Premier ministre, pour rétablir un minimum d'équité salariale dans notre pays, envisagez-vous de prendre la même mesure ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur de Rugy, sur la question de la rémunération des dirigeants, la position du Gouvernement, sous l'autorité de François Fillon, est très simple : la rémunération est la contrepartie de la performance. (Rires et vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Quand la performance est bonne, il n'y a pas de honte à ce que la rémunération le soit aussi ;...
M. Frédéric Cuvillier. Et Pérol ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. ...si la performance n'est pas bonne, il est alors parfaitement injuste qu'il y ait une bonne rémunération. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. - " Et Pérol ?" sur les bancs du groupe SRC.) Qu'a fait le Gouvernement ?
Tout d'abord, il a proposé, et vous l'avez voté, le principe selon lequel il ne doit pas y avoir d'indemnités de départ quand les critères de performance n'ont pas été respectés. C'est inscrit dans la loi.
Deuxièmement, chaque fois que le concours de l'État a été sollicité, qu'il s'agisse des banques ou du secteur automobile - et ce sera la même chose dans tous les autres secteurs -, nous demandons en contrepartie des engagements de la part des dirigeants, et qu'ils renoncent à la part variable ou au bonus qu'ils reçoivent.
Nous sommes même allés plus loin puisque nous avons demandé au MEDEF et à l'association des banques de mener un certain nombre de travaux pour établir des principes éthiques. Ces principes ont été transcrits dans un code de bonne conduite, qui a été adopté par le MEDEF. Nous avons enjoint à toutes les sociétés du CAC 40 et à toutes les autres sociétés cotées d'inscrire dans leurs délibérations de conseil d'administration et dans leurs statuts les principes prévus par ce code éthique : pas d'indemnités de départ en cas de mauvaise performance, plafonnement des indemnités de départ, comité des rémunérations.
M. Frédéric Cuvillier. Et la déontologie, où est-elle ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. J'ajoute que nous avons demandé aux banques de procéder de même, et pas seulement pour leurs dirigeants, mais également pour les traders, c'est-à-dire pour les opérateurs de marché. En effet, ceux-ci sont bien souvent rémunérés grassement au moment de la réalisation de l'opération avant, bien sûr, que celle-ci ne soit dénouée. Nous avons donc demandé à leur égard la même chose : des règles éthiques, étendues à l'ensemble du secteur bancaire.
Vous le voyez, qu'il s'agisse de la loi que nous proposons ou des prescriptions que nous formulons, nous suivons un principe : pas de rémunération qui serait excessive dès lors qu'il n'y a pas de performance. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. André Chassaigne. C'est un baratin indécent !
Auteur : M. François de Rugy
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi
Ministère répondant : Économie, industrie et emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2009