Sri Lanka
Question de :
M. Armand Jung
Bas-Rhin (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 11 juin 2009
SITUATION DU PEUPLE TAMOUL
M. le président. La parole est à M. Armand Jung, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Armand Jung. Au Sri Lanka, monsieur le ministre des affaires étrangères, la " chasse aux Tigres " s'est achevée dans un bain de sang. Selon des témoignages convergents, ce sont près de 20 000 Tamouls qui, depuis le mois de janvier, ont trouvé la mort dans ce conflit qui les oppose depuis plusieurs décennies au pouvoir sri-lankais. Les massacres se sont transformés en véritables pogroms - pour reprendre votre propre expression, monsieur le ministre. Selon les termes mêmes du pouvoir en place à Colombo, les derniers rebelles ont été " achevés ".
La population tamoule a pour seul tort d'être tamoule, de vivre au Sri Lanka et d'avoir fait confiance à des dirigeants extrémistes et irresponsables. Rien ne justifie cette " solution finale ", cette guerre sans caméras dont on tente aujourd'hui de museler les rares témoins. La situation humanitaire est catastrophique et les populations civiles en paient le prix fort.
L'issue de ce conflit laisse un goût amer de sang et de larmes, dans l'indifférence quasi générale de l'opinion publique et de la communauté internationales. Le Conseil de sécurité de l'ONU et son triste Conseil des droits de l'homme se sont illustrés par leur impuissance et par un silence terrifiant.
Je voudrais exprimer ma profonde compassion et ma solidarité aux Tamouls qui vivent pacifiquement en France, et qui ont fait preuve d'une très grande dignité durant tout le conflit.
Face à cette situation dramatique, le devoir d'ingérence humanitaire, qui vous est cher, monsieur le ministre, doit aujourd'hui s'appliquer dans toute sa plénitude. Quels moyens supplémentaires la France compte-t-elle mettre à disposition des 300 000 Tamouls actuellement parqués dans des camps de réfugiés ? Au plan diplomatique, la France envisage-t-elle de s'associer à la demande du gouvernement britannique de créer une commission d'enquête internationale pour violation du droit international et crimes de guerre, visant tant l'armée sri-lankaise que les Tigres tamouls ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Patrick Roy. Un homme de conviction ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur Jung, je vous remercie de n'avoir pas confondu les Tigres tamouls et le peuple tamoul. Ce que vous avez décrit est tout à fait exact et je n'ai rien à y ajouter, sinon que la fin du conflit a été plus tragique encore que vous ne l'avez dit.
Qu'avons-nous fait ?
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Rien ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères. Je ne peux vous laisser dire cela : nous avons fait plus que d'autres. Nous sommes à l'origine de l'envoi d'un hôpital mobile, qui a pu accueillir 2 500 blessés. Nous avons renforcé notre aide au Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés et avons protesté, de concert avec le ministre britannique, afin qu'un accès soit réservé aux agences des Nations unies et aux ONG. Nous allons continuer en ce sens.
Nous avons soutenu l'initiative d'une déclaration européenne, nous avons également ajouté notre voix à celle des Britanniques pour demander une enquête internationale. Je regrette comme vous que l'action du Conseil des droits de l'homme de Genève ait été bloquée, au prétexte - légitime, d'une certaine façon - qu'il s'agissait d'un conflit intérieur et non d'une guerre internationale. Il est à noter toutefois que, pour la première fois, le Conseil de sécurité des Nations unies a fait une déclaration à ce sujet, même si celle-ci, c'est vrai, n'est pas suffisante.
Que pouvons-nous faire à présent ? Nous devons continuer d'exercer une pression sur le gouvernement de M. Rajapakse. Il faut absolument que les 200 000 à 300 000 réfugiés puissent rentrer chez eux, ce qui exige un effort de reconstruction des villages. Les impératifs liés au déminage sont souvent invoqués comme obstacle à leur retour, mais ce n'est pas vrai partout.
Enfin, je regrette comme vous que la communauté internationale, contrairement à la France, se soit détournée de ce problème gravissime. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. Armand Jung
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 11 juin 2009