droits d'auteur
Question de :
M. Patrick Bloche
Paris (7e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 17 juin 2009
LOI HADOPI
M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Patrick Bloche. Ma question sera moins consensuelle, je le regrette.
Monsieur le premier ministre, pendant des semaines, dans cet hémicycle, nous n'avons eu de cesse de vous avertir que le projet de loi Hadopi était un texte inutile, inefficace et contraire à la Constitution. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Alternant mépris et caricature, vous avez refusé d'entendre nos arguments. Vous avez eu tort. (" Eh oui ! " sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Mercredi dernier, en effet, le Conseil constitutionnel nous a donné raison en annulant le dispositif que votre majorité avait voté à reculons. Nier cette évidence serait faire preuve d'une particulière mauvaise foi.
La censure du Conseil constitutionnel, saluée par les députés européens et la Commission européenne, est aussi claire que sévère pour le Gouvernement. Il est ainsi rappelé - ce n'est pas rien - que nous vivons dans un État de droit dans lequel la présomption d'innocence est la règle, et que nos concitoyens, via Internet, exercent tout simplement leur liberté d'expression et de communication. (" Très bien ! " sur quelques bancs du groupe SRC.)
Malgré ce cinglant camouflet, le Gouvernement, sous pression élyséenne, s'entête, pour ne pas dire s'enferre. Plutôt que de reconnaître qu'il a fait fausse route, il persévère en mettant en place, contre toute logique, une haute autorité devenue inutile, financée chaque année - tenez-vous bien - à hauteur de 7 millions d'euros, pour envoyer les mails les plus chers du monde !
N'est-il pas temps, monsieur le Premier ministre, d'arrêter les frais, d'autant que votre loi, rappelons-le, n'apportera pas un euro de plus à la création ? N'est-il pas temps de prendre en compte notre proposition de contribution créative, qui est la seule à assurer un nouveau financement pour la culture à l'heure d'Internet ?
M. Jean Glavany. Ce serait le bon sens !
M. Patrick Bloche. N'est-il pas temps, enfin, en mettant tout le monde autour d'une table, de rédiger une autre loi qui rassemble les créateurs et les internautes, c'est-à-dire les artistes et leur public ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, pour dire les choses clairement et franchement (Rires sur les bancs du groupe SRC), la semaine dernière, la loi a été validée à 90 % par le Conseil constitutionnel. (Exclamations et huées sur les mêmes bancs.)
M. le président. Je vous en prie !
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. Parfaitement ! C'est pourquoi la loi va être promulguée. La Haute autorité sera créée au cours de l'été...
M. Albert Facon. C'est votre dernière séance de questions !
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. ...et, dès l'automne, partiront des mails d'avertissement, des lettres recommandées, ce qui n'est pas rien. J'observe en effet qu'en Grande-Bretagne, 60 % des internautes qui ont reçu un mail d'avertissement ont arrêté de pirater...
M. Patrick Bloche. C'est faux !
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. ...et qu'en Suède, depuis l'entrée en vigueur de la loi, on assiste à un essor de l'offre légale et à une baisse sensible du piratage. C'est donc que la pédagogie marche.
S'agissant de la sanction, nous avions proposé et fait voter qu'à l'instar de très nombreuses hautes autorités indépendantes, l'Hadopi puisse prononcer des sanctions. Je rappelle que l'Autorité des marchés financiers, la CNIL, le CSA, l'Autorité contre le dopage prononcent des sanctions très dures,...
M. Patrick Bloche. Ça n'a rien à voir !
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. ...jusqu'à l'interdiction d'exercer des professions à vie, jusqu'à des centaines de milliers d'euros d'amende. Ce sont des sanctions plus sévères qu'une suspension d'accès à Internet qui, de toute façon, peut être coupé dès lors que vous ne payez pas votre facture.
Tout le processus avait été validé en assemblée générale par le Conseil d'État. Le Conseil constitutionnel a jugé que cette sanction devait être prononcée par un juge.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n'est pas faute de vous l'avoir expliqué !
Mme Christine Albanel, ministre de la culture. Parallèlement à la promulgation de la loi, nous allons présenter un texte de loi très court pour articuler la fonction pédagogique de l'Hadopi avec l'intervention du juge, pour donner à celui-ci les moyens d'agir et pour permettre des procédures accélérées.
Nous allons continuer à nous battre pour le droit des auteurs, contre la démagogie et contre le jeunisme, je peux vous l'assurer ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. Patrick Bloche
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Propriété intellectuelle
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère répondant : Culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 juin 2009