Question au Gouvernement n° 1729 :
modes de scrutin

13e Législature

Question de : M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 19 novembre 2009

MODE DE SCRUTIN POUR L'ÉLECTION
DES CONSEILLERS TERRITORIAUX

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Bruno Le Roux. Monsieur le Premier ministre, adossé à votre réforme des collectivités territoriales ; réforme au sujet de laquelle je veux d'ailleurs vous dire que vous mentez aux Français (Vives protestations sur les bancs des groupes UMP et NC - Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)...
M. Richard Mallié. Allégation scandaleuse !
M. Bruno Le Roux. Les Français doivent savoir que les communiqués de victoire du MEDEF pèsent pour 6 milliards d'euros supplémentaires sur les factures des ménages de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Adossé à la réforme des collectivités territoriales, disais-je, vous voulez malheureusement une nouvelle fois - mais il s'agit chez vous d'une habitude - tripatouiller les modes de scrutin. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Que voulez-vous faire ? Un scrutin majoritaire uninominal à un seul tour. Cela nécessite quelques explications car les Français aiment que les modes de scrutin soient clairs. Or, en l'espèce, il s'agit d'un scrutin étrange et injuste : pour la première fois dans notre histoire, celui qui sera élu n'aura pas la majorité des voix, il ne disposera donc pas de cette majorité qui lui permet aujourd'hui d'asseoir sa légitimité.
Pire encore, avec ce mode de scrutin, la plupart des futurs conseillers territoriaux seront élus alors même qu'une majorité d'électeurs ne leur aura pas accordé sa confiance.
M. François Grosdidier. Menteur !
M. Bruno Le Roux. Ajoutez à cela une fausse proportionnelle, complexe car dépendant seulement d'une partie des voix des électeurs, et vous obtenez un mode de scrutin incompréhensible et antidémocratique, entraînant un recul majeur de la parité, et jugé anticonstitutionnel, notamment par le Conseil d'État.
Ce mode de scrutin est en effet jugé comme portant atteinte à l'égalité comme à la sincérité du suffrage, rien de moins ! Il avait même été condamné à une autre époque, par Nicolas Sarkozy, pour qui il était " brutal, sauvage et peu démocratique ". Pourtant, monsieur le Premier ministre, vous ne renoncez pas !
Aujourd'hui, deux modes de scrutin sont bien compris par les Français : celui qui leur permet d'élire leur maire et celui qui leur permet d'élire le Président de la République. Allez-vous persévérer à vouloir instaurer un mode de scrutin tripatouillage ou respecterez-vous la démocratie, en vous inspirant de ces scrutins ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. (" Magouilleur ! Charcuteur ! " sur les bancs du groupe SRC, dont de nombreux députés miment un découpage aux ciseaux.)
Mes chers collègues, je vous prie d'écouter la réponse du secrétaire d'État. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur Bruno Le Roux, le mode de scrutin que nous avons retenu est un scrutin mixte qui se déroulera dans le cadre traditionnel du canton. Il s'agira d'un scrutin majoritaire pour 80 % des sièges, et d'un scrutin proportionnel pour les 20 % restants. (Bruit sur les bancs du groupe SRC.) La répartition de cette dernière partie des sièges se fera au plus fort reste, elle bénéficiera ipso facto aux plus petites formations politiques, qui n'étaient pas représentées jusqu'à maintenant. (Brouhaha )
Des modalités similaires ont déjà été mises en oeuvre, notamment par la gauche, dans de nombreux pays. Ce fut le cas en Italie, à l'époque du gouvernement socialiste de M. Ciampi, puis alternativement par des gouvernements de gauche et de droite. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Jean Glavany. Parce que maintenant, l'Italie est votre modèle !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Ces modalités ne peuvent évidemment s'appliquer qu'avec un scrutin à un tour : nous ne sommes pas dans le schéma allemand.
Pour notre part, nous avons voulu rester dans le cadre du département en conservant des cantons à taille humaine. Il y aura ainsi un minimum de quinze cantons par département, et donc quinze élus au moins pour les plus petits départements.
Certes, dans notre pays, les élections utilisant un mode de scrutin majoritaire ont toujours été à deux tours. Mais ne pas respecter cette règle n'est pas injuste. Il ne s'agit pas d'une règle constitutionnelle, et il n'est pas interdit de la changer. Vous ne vous êtes d'ailleurs pas privés de le faire durant des années, à l'époque où M. Mauroy ou M. Fabius était Premier ministre.
En outre, il faut relativiser les conséquences d'un tel changement. J'ai examiné les résultats des dernières élections cantonales de mars 2008 : plus de 90 % des candidats élus étaient soit des élus du premier tour, soit des élus qui se situaient en tête au premier tour. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. Bruno Le Roux. Personne n'y comprend rien !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. En conclusion...
M. le président. Merci, monsieur le secrétaire d'État.

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Roux

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Élections et référendums

Ministère interrogé : Intérieur et collectivités territoriales

Ministère répondant : Intérieur et collectivités territoriales

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 novembre 2009

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