pouvoir d'achat
Question de :
M. François Hollande
Corrèze (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 21 novembre 2007
POUVOIR D'ACHAT
M. le président. La parole est à M. François Hollande, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Huées sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)M. François Hollande. Monsieur le Premier ministre, le pouvoir d'achat est devenu la première priorité des Français, une priorité lancinante. Au-delà des fonctionnaires, qui se mobilisent fortement aujourd'hui, un grand nombre de nos concitoyens connaissent tout à la fois une stagnation de leurs revenus depuis plusieurs années et une hausse continue du coût de la vie : carburant, alimentation, loyers.
Vous aviez pourtant pris des engagements. Nicolas Sarkozy voulait être le Président du pouvoir d'achat. Président, il l'est depuis six mois, mais le pouvoir d'achat, lui, n'est toujours pas au rendez-vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Roland Muzeau. Sauf le sien !
M. François Grosdidier. C'est la même rengaine chaque semaine !
M. François Hollande. Vous aviez annoncé la croissance : elle n'est pas là. Vous aviez promis des mesures immédiates pour les Français : elles n'ont concerné que les plus favorisés.
M. Michel Herbillon. C'est faux !
M. François Hollande. Quant aux heures supplémentaires, le dispositif, de l'aveu même des chefs d'entreprise, est inapplicable. Il n'est plus temps d'attendre !
C'est pourquoi, au nom des socialistes, je vous fais quatre propositions. (" Ah ! " et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
M. Jean-François Copé. Enfin, des propositions !
M. Yves Nicolin. Alléluia !
M. le président. Veuillez écouter l'orateur, s'il vous plaît.
M. François Hollande. Je vous remercie de saluer cette initiative.
Tout d'abord, une conférence salariale. Grenelle de l'environnement, Grenelle de l'insertion : vous évoquez souvent des " Grenelle ". Eh bien, faites un Grenelle sur le pouvoir d'achat des fonctionnaires et des salariés du secteur privé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Et, pour aider à la négociation, conditionnez les exonérations de cotisations sociales dont bénéficient les entreprises à la conclusion d'accords salariaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Deuxième proposition : la mise en place immédiate d'un chèque transports. La mesure a déjà été votée (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), elle peut être financée par une taxation sur les superprofits des compagnies pétrolières.
M. le président. Posez votre question, monsieur Hollande.
M. François Hollande. Troisième proposition : l'encadrement des loyers en 2008 au niveau du coût de la vie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Quatrième proposition : la transparence totale des marges de la grande distribution et la répercussion sur les consommateurs des avantages obtenus sur les producteurs.
M. le président. Posez votre question, monsieur Hollande !
M. François Hollande. Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : voilà notre plan pour le pouvoir d'achat. Quel est le vôtre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur de nombreux bancs de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur Hollande, oui, il y a un problème de pouvoir d'achat en France (" Ah ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), et je crois d'ailleurs me souvenir que le premier à l'avoir signalé est le Président de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Richard Mallié. Exactement !
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il n'a rien fait !
M. le Premier ministre. Toute l'énergie que le parti socialiste met à démontrer l'existence de ce problème ne suffira pas à le résoudre. Depuis dix ans,...
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cinq ans !
M. le Premier ministre. ...l'augmentation des salaires est à peine supérieure à celle de l'inflation. (" Cinq ans ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Pourquoi ? Parce que nous avons une croissance trop faible et le taux d'activité le plus bas des pays développés, faute d'avoir eu le courage de réformer le marché du travail. Parce que les 35 heures ont entraîné la rigueur salariale (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Enfin, parce que nous avons le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé des pays développés.
Première constatation : ce n'est pas avec les solutions que proposait le parti socialiste dans sa campagne que l'on résoudra les problèmes de pouvoir d'achat de nos concitoyens.
M. François Hollande. Et les vôtres ?
M. le Premier ministre. Ce n'est pas en généralisant les 35 heures dans les PME que l'on favorisera l'augmentation des salaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce n'est pas en prônant le statu quo sur la réforme des retraites que l'on résoudra le problème du pouvoir d'achat des retraités ! Du reste, quel serait le niveau de celui-ci si nous n'avions pas eu le courage de faire la réforme de 1993, celle de 2003 et celle des régimes spéciaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
M. Philippe Vuilque. Répondez à la question !
M. le Premier ministre. Enfin, ce n'est pas la réhabilitation de l'impôt qui apporterait une réponse au pouvoir d'achat. (" Répondez à la question ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Le Gouvernement a choisi de défiscaliser les heures supplémentaires. Cela ne fonctionne pas, avez-vous dit.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr, c'est inapplicable !
M. le Premier ministre. Eh bien, allez l'expliquer aux 6 millions de Français qui, au mois de novembre, verront sur leur fiche de paie l'augmentation de leur salaire grâce à cette mesure.
M. Roland Muzeau. Ce n'est pas vrai !
M. le Premier ministre. Nous avons également choisi de permettre la déduction des intérêts d'emprunt pour tous ceux qui acquièrent leur logement et de supprimer les droits de succession pour 95 % des Français. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Huit milliards d'euros seront ainsi réinjectés en 2008, au profit du pouvoir d'achat des Français.
Par ailleurs, nous doublons la prime à la cuve mise en place l'an passé. Nous augmentons de près de 3 % l'aide personnalisée au logement, pour faire face à l'augmentation des loyers. Nous accordons plus de 100 000 bourses supplémentaires aux étudiants et nous augmentons de plus de 7 % celles qui sont destinées aux étudiants les plus défavorisés.
Dans quelques heures, l'Assemblée nationale examinera un projet de loi sur la consommation qui vous permettra, monsieur Hollande, de mettre en application les propositions que vous faisiez à l'instant, puisqu'il prévoit notamment une transparence totale sur la négociation des prix.
Enfin, nous avons décidé de moduler les allégements de charges en fonction des politiques salariales conduites dans les entreprises. Contrairement à vous, monsieur Hollande, je me réjouis que celles-ci fassent de gros bénéfices, mais je voudrais qu'une partie d'entre eux soit reversée aux salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. Christian Bataille. C'est très mauvais !
M. Pierre Gosnat. C'est Pinocchio !
M. le Premier ministre. Mais surtout, le Gouvernement a choisi d'actionner tous les leviers de la croissance :...
M. François Hollande. Où est-elle, la croissance ?
M. le Premier ministre. ...la recherche, l'innovation, la fiscalité, la lutte contre l'excès de réglementation. Car la France ne distribuera plus de richesses aux Français que si elle est capable d'en produire plus.
M. François Hollande. Qu'avez-vous distribué avec le paquet fiscal ?
M. le Premier ministre. C'est parce que vous avez oublié cette évidence que vous êtes toujours dans l'opposition ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Auteur : M. François Hollande
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 novembre 2007