Question au Gouvernement n° 2 :
gouvernement

13e Législature

Question de : M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 3 octobre 2007

FAILLITE DE L'ÉTAT

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, il y a quelques jours, vous avez établi le constat d'une faillite de l'État. Stupéfiante déclaration pour une majorité qui gouverne depuis cinq ans ! Allez donc expliquer la faillite des finances publiques à MM. Sarkozy et Copé, qui ont battu à Bercy le record national d'endettement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Allez donc expliquer la faillite de la sécurité sociale à M. Bertrand ou celle du commerce extérieur à Mme Lagarde, qui ont perdu des dizaines de milliards en cinq ans. Allez donc expliquer la faillite de la croissance à vos députés, quand vous engloutissez 15 milliards d'euros dans l'économie improductive, celle des rentiers et des héritiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La faillite, c'est la vôtre. La faillite, vous voilà ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !
M. Jean-Marc Ayrault. Mais le plus grave, c'est de décréter la faillite pour déposer le bilan de l'État social. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est d'utiliser vos erreurs de gestion pour déconstruire le droit du travail, la protection sociale et le service public. C'est d'imposer la rigueur aux seuls salariés, agents publics ou malades. Votre grande faute est là : vous déformez la réforme, vous en faites une pénitence, un chemin de croix, un énième avatar de la sueur et des larmes, monsieur le Premier ministre. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La réforme de la France, nous le disons, est nécessaire et difficile. Mais pour entraîner le pays, elle a besoin d'équité, de justice, de persévérance, de négociation. C'est tout ce qui manque à la rupture que vous ne cessez de proclamer.
Vous avez écrit, monsieur Premier ministre, que la France peut supporter la vérité. Dites-nous si, avant les élections municipales, il existe encore un choix, dans votre politique, entre la faillite et l'austérité. Voilà, monsieur le Premier ministre, la question que, comme beaucoup de Français, je me pose et que je vous pose cet après-midi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - " C'est nul ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Jean-Marc Ayrault, au fond, vous nous reprochez en quelque sorte de mettre en oeuvre les engagements de notre campagne.
M. François Hollande. Il n'a pas dit ça !
M. Bernard Roman. Il parlait de votre bilan !
M. le Premier ministre. Je vous répondrai que le Président de la République fait et fera ce qu'il dit.
Vous nous reprochez aussi une politique économique que vous jugez injuste. (" Quinze milliards d'euros de cadeaux fiscaux ! " sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Cette politique économique, monsieur Ayrault, est fondée sur un diagnostic assez peu discutable : depuis 33 ans, aucun budget en équilibre n'a été présenté au Parlement. (" Eh oui ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Depuis 1980, la dette de l'État a été multipliée par dix. Nous pensons qu'il faut rompre avec cette logique et il me semble que nous pourrions au moins nous rassembler sur cet objectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pour rompre avec cette logique, nous avons défini une stratégie, dont la première étape consiste à aller à la recherche de la croissance en libérant le travail, comme je l'ai déjà dit, mais aussi en misant sur la recherche et l'innovation. La priorité principale, pour ne pas dire la seule priorité du budget que vous allez discuter dans quelques jours,...
M. Maxime Gremetz. Ce sont les riches !
M. le Premier ministre. ...c'est l'augmentation des dépenses de recherche, d'enseignement supérieur et d'innovation, parce que nous pensons que c'est en multipliant par trois le crédit d'impôt-recherche, en augmentant de 1,8 milliard le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche, en créant le statut de la jeune entreprise innovante dans l'université et en libérant l'université de ses contraintes, que nous pourrons, à terme, aller chercher la croissance.
La deuxième étape consistera à lancer, tout au long de l'année 2008, les réformes de structures qui n'ont pas encore été faites depuis vingt ans. Chacun sait, au fond, que ces réformes de structures sont la raison principale des retards que nous avons accumulés. Nous allons, je le répète, réformer le marché de l'emploi. Nous allons réformer nos règles économiques. Nous allons réformer notre système de santé. Nous allons réformer l'État.
Enfin, la troisième étape consistera à accélérer, année après année, la remise en ordre des finances publiques. Nous nous sommes engagés à revenir à l'équilibre budgétaire en 2012.
M. Christian Bataille. Mais pour l'instant c'est la faillite !
M. le Premier ministre. Cet objectif de retour à l'équilibre sera respecté. Le budget dont vous allez débattre dans quelques jours s'inscrit d'ailleurs dans cette perspective : pour la première fois, le critère " zéro volume " est strictement respecté, et le non-remplacement de 23 000 départs à la retraite constitue un choix que vous ne partagez pas, mais qui est un choix politique fort et sans précédent dans notre histoire récente. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Nouveau Centre.)
Cette politique, monsieur Ayrault, elle est juste ! Sur les neuf milliards que l'opposition conteste en permanence (" Quinze milliards ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), j'ai bien dit sur les neuf milliards (Mêmes mouvements), cinq sont destinés à l'augmentation de la rémunération des heures supplémentaires. Et à qui profitera cette augmentation, sinon aux salariés, aux ouvriers et aux employés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Qui ira dire à un salarié qui gagne le SMIC et qui, travaillant quatre heures supplémentaires par semaine,...
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Votre réforme, c'est pour les riches !
M. le Premier ministre. ...touchera 2 000 euros de plus par an, que ce n'est pas juste ? Qui ira dire à un jeune couple qui s'est endetté sur vingt ans pour acquérir sa maison que 8 900 euros de crédit d'impôt, ce n'est pas juste ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur Ayrault, une autre politique était effectivement possible. Elle consistait à généraliser les 35 heures, à augmenter les impôts et à créer de l'emploi public. Ce n'est pas la politique que les Français ont choisie. Et je pense honnêtement qu'ils ont eu raison. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
M. Henri Emmanuelli. Ça ne volait pas haut !

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Ayrault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : État

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 octobre 2007

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