euro
Question de :
M. Stéphane Demilly
Somme (5e circonscription) - Nouveau Centre
Question posée en séance, et publiée le 5 décembre 2007
DÉLOCALISATION D'ACTIVITÉS D'AIRBUS
DANS LA ZONE " DOLLAR "
M. Stéphane Demilly. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Interrogé hier matin sur Europe 1 à propos d'une possible délocalisation d'une partie de la production d'Airbus dans la zone dollar, le président d'EADS, Louis Gallois, a répondu en ces termes : " Je crois malheureusement qu'il ne faut plus employer le conditionnel. Il ne faut pas dire ''il faudrait'', mais ''il faudra'', parce que nous n'avons pas le choix. " Deux jours plus tôt, dans le journal Le Monde, le président de Dassault Aviation, lui aussi, déclarait que la démarche naturelle tendait à la délocalisation dans des zones dollar ou à bas coût, comme cela avait été fait par l'industrie de l'automobile.
Ces déclarations, émanant de deux des principaux patrons de l'aéronautique européenne, mettent en lumière les conséquences désastreuses de la parité actuelle entre l'euro et le dollar, et ce pour tout un pan de l'industrie européenne. Avec un euro à un dollar cinquante, Airbus comme Dassault sont très fortement pénalisés, car ils produisent leurs avions en euros forts et les vendent en dollars faibles. C'est évidemment une puissante incitation à délocaliser.
Cette nouvelle source d'inquiétude ne fait par ailleurs que renforcer l'angoisse bien compréhensible des salariés de certains sites d'Airbus, qui ne savent toujours pas à quelle sauce ils vont être mangés... Je fais allusion, vous l'avez compris, au processus d'externalisation prévu dans le plan Power 8, l'emploi du mot " externalisation " étant une manière pudique de dire " vente "...
C'est pourquoi ma question est double. Pouvez-vous nous dire quelles actions le Gouvernement compte entreprendre au plan européen pour apporter des réponses au problème, devenu crucial, de la parité euro-dollar ? Avez-vous des informations concernant le choix et le calendrier de désignation du repreneur des sites français d'Airbus - si toutefois cette triste orientation est maintenue ? L'attente est insupportable pour les milliers de salariés concernés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme.
M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Depuis le mois de juin, les évolutions du taux de change de l'euro et leurs implications industrielles ont été et demeurent un sujet de grande vigilance pour le Gouvernement.
Oui, monsieur le député, un euro trop fort peut être un problème, notamment pour celles de nos entreprises dont les coûts de revient sont formulés en euros et les ventes en dollars, tandis que leurs concurrents, eux, fabriquent et vendent en dollars. Comme vous, j'ai entendu les propos du président d'EADS sur le sujet et je comprends les interrogations qu'ils peuvent susciter chez les salariés et les sous-traitants d'Airbus.
M. André Gerin. C'est insupportable !
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Je les comprends d'autant mieux qu'elles s'ajoutent, pour les salariés des sites qu'Airbus compte céder en France, à l'attente du choix d'un repreneur. De par la loi, vous le savez, les premiers informés de ces évolutions par la direction seront les salariés, et nous espérons tous que cette annonce interviendra très prochainement.
Concernant la parité euro-dollar et l'évolution des taux de change, le premier à avoir dénoncé l'euro fort, c'est Nicolas Sarkozy (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) avant l'élection présidentielle. Avant l'été, nous étions bien isolés sur cette question et notre message d'alarme avait été accueilli, il faut le reconnaître, avec quelque scepticisme par la plupart de nos partenaires européens et sur l'ensemble de la scène internationale. Depuis, monsieur Demilly, les faits nous ont, hélas, donné raison. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
M. Maxime Gremetz. Quel culot !
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Je ne vois pas de raison de nous en réjouir, mais je constate que notre position a fait école au cours des dernières semaines. Nos grands partenaires européens, et je pense ici aux propos de la Chancelière allemande, Mme Merkel, ont indiqué qu'ils partageaient nos préoccupations sur les effets actuels de l'euro fort. Il en est de même pour les employeurs européens, qui ont saisi de cette question l'ensemble de leurs ministres.
Les choses sont en train de bouger. Le message que nous portons aujourd'hui avec nos partenaires européens tient en trois points. D'abord, les taux de change doivent refléter les fondamentaux économiques, notamment en Asie.
M. le président. Merci de conclure, monsieur le secrétaire d'État.
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. Ensuite, une volatilité excessive des marchés est défavorable à la croissance. Enfin, la zone euro ne peut porter seule le poids de l'ajustement des déséquilibres mondiaux. Il me semble que nous sommes de plus en plus entendus,...
M. Jacques Desallangre. Par Trichet ?
M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme. ...comme en témoignent les dernières réunions internationales qui se sont tenues à ce sujet. Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est totalement mobilisé, s'agissant tant de l'avenir de la filière aéronautique que de la parité entre l'euro et le dollar, laquelle est essentielle pour notre économie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : M. Stéphane Demilly
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Moyens de paiement
Ministère interrogé : Consommation et tourisme
Ministère répondant : Consommation et tourisme
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 5 décembre 2007