compétences
Question de :
M. Laurent Fabius
Seine-Maritime (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 26 mai 2010
RÉFORME DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
M. le président. La parole est à M. Laurent Fabius, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Laurent Fabius. Monsieur le Premier ministre, M. Alain Rousset, député et président de l'association des régions de France, a posé il y a quelques instants une question sur la réforme territoriale. Ce n'est pas faire injure au talent de M. le secrétaire d'État que de dire qu'il est passé largement à côté du problème.
M. Lucien Degauchy. Peut-être a-t-il un plan B, lui ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
M. Laurent Fabius. Le problème, quel est-il ? Nous avons en France à la fois un énorme surendettement et un énorme sous-investissement ; et dans les deux cas, c'est l'État qui en est le seul responsable. Les collectivités locales ne portent aucune responsabilité à cet égard (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC) : nous savons tous, s'agissant de l'endettement, que les collectivités locales ne peuvent pas être en déficit de fonctionnement, et qu'elles assurent 75 % de l'investissement public.
M. Patrick Roy. Eh oui !
M. Laurent Fabius. Or que décidez-vous ? Vous choisissez de rendre beaucoup plus difficile le financement des collectivités locales. C'était déjà vrai avec les mesures prises les années précédentes, c'est vrai avec les dispositions de la réforme territoriale. Autrement dit, il s'agit pour l'essentiel d'une opération électorale, d'une centralisation et d'un moyen de pallier une difficulté financière plus grande...
M. Guy Teissier. M. Fabius n'a rien compris !
M. Laurent Fabius. ...puisque vous avez décidé d'amputer, au cours des trois ans qui viennent, les dotations.
La conséquence, nous la connaissons tous : il y aura moins d'investissements, plus de faillites des entreprises de travaux publics (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), plus de difficultés pour les services publics locaux, plus de difficultés fiscales.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Très juste !
M. Laurent Fabius. Mesdames, messieurs, le pays a suffisamment de difficultés dues au surendettement et au sous-investissement pour que l'on n'y rajoute pas une erreur de politique en taxant durement les collectivités locales.
Mme Danièle Hoffman-Rispal. Très juste !
M. Laurent Fabius. C'est la raison pour laquelle, monsieur le Premier ministre, je vous demande de renoncer à cette erreur, à ce qui constitue même une faute contre l'avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Laurent Fabius, j'ai écouté votre question, attentif à l'expérience qui est la vôtre - vous êtes devenu Premier ministre voici vingt-six ans, succédant à Pierre Mauroy, qui avait fait voter les premières lois de décentralisation.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Eh oui !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Je vous le dis avec beaucoup de solennité : les principes de la décentralisation ne sont évidemment pas remis en cause par le Gouvernement et la majorité. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Michel Ménard. C'est la recentralisation !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Ils constituent désormais le socle de l'organisation territoriale, ce qui est d'ailleurs prévu par la Constitution. Personne ne songe à les remettre en cause en engageant je ne sais quel mouvement de recentralisation. Personne ne propose de rétablir la tutelle. Personne n'envisage de retirer aux élus locaux des pouvoirs d'action et d'intervention. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais qui peut sérieusement croire qu'en un quart de siècle, rien n'aurait changé ? Ne faites pas semblant de croire que l'enchevêtrement des compétences, la confusion des responsabilités, l'empilement des structures, sert l'intérêt national et l'intérêt des Français !
M. Daniel Vaillant. Baratin !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Vous évoquez les dépenses, mais vous ne pouvez occulter le fait que celles des collectivités locales dépassent très largement ce qui était nécessaire au regard de ce qu'imposait la décentralisation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Elles représentaient 7,3 % du PIB en 1980, elles s'élèvent à 11,9 % aujourd'hui.
Oui, je vous le dis : c'est l'honneur et le courage du Gouvernement que d'engager un mouvement de clarification et de simplification (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC) en traitant de l'allégement des structures et en encadrant les co-financements excessivement coûteux. En vérité, votre position est très simple : ne rien faire, ne rien changer, ne rien bouger, ne rien imaginer, ne rien adapter ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Au-delà des mots, vous êtes l'expression du conservatisme tandis que nous, nous sommes l'expression du mouvement et de la réforme ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et sur de nombreux bancs du groupe NC. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Auteur : M. Laurent Fabius
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère répondant : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2010