Question au Gouvernement n° 2366 :
évasion fiscale

13e Législature

Question de : M. Dominique Raimbourg
Loire-Atlantique (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 23 juin 2010

AFFAIRE BETTENCOURT

M. le président. La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Dominique Raimbourg. Ma question s'adressait initialement à Mme la garde des sceaux. Elle vise à progresser sur le chemin de moralisation de la vie politique, auquel vient de faire allusion M. le Premier ministre.
Les faits dont il est question concernent la même affaire et visent à l'appréhender sous un autre angle. Les faits ne semblent pas contestés, non plus que le contenu des écoutes.
Les faits sont les suivants : de mai 2009 à mai 2010, le maître d'hôtel de Mme Bettencourt a procédé à des enregistrements secrets des conversations qu'elle avait avec son conseiller financier. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Fin mai 2010, il a remis ces enregistrements à Mme Françoise Bettencourt, fille de Liliane Bettencourt, étant précisé que la mère et la fille s'opposent à propos d'un héritage.
M. Éric Raoult. Trou de serrure !
M. Dominique Raimbourg. Début juin 2010, Mme Françoise Bettencourt remet ces enregistrements à la police. Le 14 juin 2010, une enquête est ouverte pour atteinte à la vie privée, et en conséquence, le maître d'hôtel et l'informaticien qui a gravé les disques sont mis en garde à vue.
M. Éric Raoult. Voyeur !
M. Dominique Raimbourg. Or l'écoute des propos tenus, et notamment ceux de M. de Maistre, permet de penser qu'une fraude massive a été commise. Or, à ce jour, aucune poursuite n'a apparemment été engagée à ce titre.
Cela amène plusieurs questions. La fraude fiscale est punie beaucoup plus sévèrement que l'atteinte à la vie privée et il ne semble pas y avoir eu d'enquête. Ma première question est donc de savoir s'il est exact qu'il n'y a pas eu d'enquête, et que la réactivité dont il a été fait preuve à l'encontre du maître d'hôtel n'a pas été la même à l'encontre de ceux que l'on pourrait soupçonner de fraude fiscale ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Bernard Deflesselles. Son père nous a fait rire, pas lui !
M. Dominique Raimbourg. Deuxième question : va-t-il y avoir des poursuites ou des instructions en vue de l'ouverture d'une information ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Voulez-vous que je vous dise, monsieur le député, ce que je pense de tout cela ? C'est immonde, et c'est ignoble. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Jamais mon épouse n'a eu besoin de moi pour trouver un travail. Jamais je ne suis intervenu pour qu'elle en ait un. Jamais ni elle ni moi n'avons été informés d'une quelconque fraude ou évasion fiscale. (Mêmes mouvements.)
M. le président. Je vous en prie !
M. Éric Woerth, ministre du travail. Le rôle de ma femme était de placer les dividendes de la société L'Oréal versés chaque année à Mme Bettencourt, épouse d'André Bettencourt, ministre du général de Gaulle, en toute transparence et en toute légalité.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ce n'est pas la question !
M. Daniel Goldberg. Personne n'a parlé de cela ! Répondez à la question !
M. Éric Woerth, ministre du travail. Jamais, je dis bien jamais, je n'ai donné la moindre instruction aux services fiscaux concernant la situation de Mme Bettencourt ou celle de L'Oréal. Mon intégrité, comme celle de mon épouse Florence, est totale. Je suis le ministre du budget qui a doté le fisc d'une police fiscale. Je suis le ministre qui s'est le plus investi dans la lutte contre les paradis fiscaux.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Répondez à la question !
M. Éric Woerth, ministre du travail. Je suis le ministre qui a pris tous les coups pour lutter contre les paradis fiscaux, contre l'évasion fiscale, notamment en Suisse. Jamais mon épouse ou moi-même n'avons été mêlés de près ou de loin au procès qui oppose les membres de la famille Bettencourt. Oui, la femme d'un ministre peut exercer son métier. Il n'y a pas de conflit d'intérêt, parce que tout simplement ni mon épouse ni moi n'avons d'intérêt dans cette affaire, et je l'assume.
M. Bernard Roman. Mais enfin, répondez à la question !
M. Éric Woerth, ministre du travail. Comment pouvez-vous prendre sans aucune distance des informations relayées par un site Internet dans un but commercial, et peut-être même politique ? La vérité est que je n'ai rien à me reprocher, absolument rien, je suis la bonne cible au bon moment.
Monsieur le député, dans un discours important, le Président Mitterrand parlait des chiens : prenez garde à ne pas en devenir un. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC. - Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement.)

Données clés

Auteur : M. Dominique Raimbourg

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Travail, solidarité et fonction publique

Ministère répondant : Travail, solidarité et fonction publique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 juin 2010

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