Question au Gouvernement n° 2400 :
évasion fiscale

13e Législature

Question de : M. Olivier Dussopt
Ardèche (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 30 juin 2010

AFFAIRE BETTENCOURT

M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Olivier Dussopt. Ma question s'adresse à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Monsieur le ministre, mardi dernier, nous vous avons interrogé sur les suites données aux fraudes fiscales avouées par Mme Bettencourt. Ce même jour, vous avez répondu de façon assez méprisante à Jean-Marc Ayrault, le taxant d'irresponsabilité, et vous avez opposé à notre demande d'engager des poursuites le secret fiscal, que vous avez présenté comme " l'une des plus grandes libertés individuelles ".
Dimanche, alors que votre collègue Éric Woerth avait dit et répété que " jamais un ministre ne déclenche un contrôle fiscal ", vous avez annoncé que le fisc allait " examiner la totalité des actifs de Mme Bettencourt sur la base des révélations " de ses avocats. Vous avez même dit : " On ira un peu partout dans le monde pour savoir précisément ce qu'il y a et où il y a ". Avec une semaine de décalage, vous nous donnez finalement raison : vous allez procéder au contrôle que nous demandions la semaine dernière et que vous nous aviez refusé. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Aujourd'hui, j'ai deux questions à vous poser.
La première porte sur les raisons qui ont motivé votre changement de position. Pourquoi ce qui était inenvisageable la semaine dernière est-il devenu possible aujourd'hui ? Les déclarations de M. Juppé et de Mme Lagarde ou d'autres, plus surprenantes encore, sur l'existence d'un conflit d'intérêt ont-elles pesé dans cette évolution ? Les déclarations du parquet de Nanterre, et notamment du Procureur Courroye qui a révélé que le ministère du budget connaissait depuis janvier 2009 les soupçons qui pesaient sur la première fortune de France (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), ont-elles eu plus d'effets que les demandes répétées de l'opposition que toute la lumière soit faite sur cette affaire ?
Ma seconde question, monsieur le ministre, appelle une réponse claire et, pour une fois, définitive. Pourquoi, sur la base d'informations similaires, ce contrôle fiscal que vous diligentez vous-même aujourd'hui, en juin 2010, n'était-il pas envisageable par Éric Woerth, ministre du budget, en janvier 2009 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Monsieur le député, si j'ai manqué d'élégance à l'égard de M. Ayrault, je le prie de m'en excuser. En sa qualité de responsable d'un parti de gouvernement, il savait très bien que le secret fiscal n'est ni le secret des vestiaires ni un secret de polichinelle ; c'est la défense d'une liberté individuelle, du lien singulier entre l'administration fiscale et tout particulier contribuable. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Je voulais le lui rappeler, il ne s'en est pas offusqué.
S'agissant du sujet qui vous préoccupe, j'ai demandé au directeur général des finances publiques de prendre la parole, ce qu'il a fait aujourd'hui, pour rappeler quelques idées simples.
D'abord, un contrôle fiscal n'est pas un acte politique mais un acte administratif conduit sous l'autorité de l'administration fiscale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ensuite, il est naturel que des liens s'établissent entre autorités fiscale et judiciaire dans le cadre précis d'une instruction et d'une enquête judiciaires.
M. Patrick Lemasle. Du coup, ça devient une affaire d'État !
M. François Baroin, ministre du budget. En l'occurrence, le procureur de la République de Nanterre a saisi le directeur des services fiscaux de Nanterre sur la base de la qualification juridique d'abus de faiblesse.
Enfin, la politique fiscale est conduite sous l'autorité de l'administration fiscale.
M. Patrick Lemasle. Et pas du trésorier de l'UMP !
M. François Baroin, ministre du budget. C'est cette dernière qui donne le rythme. Le directeur général des finances publiques et le ministère du budget, par ma voix en tant que chef de l'administration fiscale, ont exprimé des positions, mais les avocats de Mme Bettencourt ont eux-mêmes pris l'opinion publique à témoin en expliquant qu'il y avait en Suisse des comptes non déclarés. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ce ne sont pas les avocats fiscalistes qui dictent son rythme à l'administration fiscale ; c'est elle-même qui, dans le cadre de sa procédure globale, définit, à la lumière des révélations, ce qu'elle doit faire et donc ce qu'elle fera. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
M. Jean Glavany. Bien sûr, elle n'obéit à aucune directive !

Données clés

Auteur : M. Olivier Dussopt

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Budget, comptes publics et réforme de l'État

Ministère répondant : Budget, comptes publics et réforme de l'État

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 juin 2010

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