Question au Gouvernement n° 2533 :
réforme

13e Législature

Question de : M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 13 octobre 2010

RÉFORME DES RETRAITES

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, en ce moment même, plusieurs millions de nos concitoyens défilent dans les rues de France...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Des milliards !
M. Jean-Marc Ayrault. ...et ce pour la quatrième fois en un mois.
Les sondages font apparaître que 70 % de nos compatriotes sont opposés à cette réforme des retraites et que 61 % sont même prêts à endurer les conséquences d'une grève durable.
Les syndicats ont témoigné d'un véritable sens des responsabilités.
M. Lucien Degauchy. Avec les lycéens !
M. Jean-Marc Ayrault. L'opposition a formulé des propositions alternatives. Les voies d'un compromis sur lequel puisse se retrouver l'ensemble de la nation auraient dû être recherchées, d'autant que Nicolas Sarkozy s'était engagé, pendant sa campagne, à ne pas revenir sur l'âge légal à soixante ans.
Mais le choix qui a été opéré est celui d'un passage en force. Ces dernières heures, au Sénat, on accélère le rythme pour démobiliser le mouvement social. Mais c'est l'inverse qui se produit aujourd'hui : le mouvement est en train de s'amplifier. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez fait le pari de la résignation, mais c'est aujourd'hui la colère qui monte. Vous faites reposer 95 % de votre réforme sur les seuls salariés, sur les classes populaires, les classes moyennes, les jeunes, les femmes, les seniors au chômage, les métiers pénibles...
M. Philippe Gosselin. Démago !
M. Jean-Marc Ayrault. ...et dans le même temps, vous soumettez au Parlement une loi de finances qui n'est rien d'autre qu'un budget d'austérité où s'accumulent les taxes, par exemple sur les locataires HLM, les abonnements Internet ou sur les mutuelles. Enfin, cerise sur le gâteau, lorsque certains d'entre vous suggèrent la suppression du bouclier fiscal, c'est surtout pour abroger l'impôt de solidarité sur la fortune. Ce n'est pas acceptable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, tout est fait pour que la tension monte...
M. Lucien Degauchy. C'est vous qui faite tout pour !
M. Jean-Marc Ayrault. ...dans un moment où il serait nécessaire, au contraire, de rassembler notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je vous le dis solennellement : le courage, ce n'est pas l'obstination. Il est de votre responsabilité d'ouvrir une discussion sincère qui permette de tout mettre sur la table et de trouver une issue. C'est ce que le pays attend de vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, que proposez-vous ? De tout arrêter ?
M. Patrick Roy. Retirez le projet !
M. François Fillon, Premier ministre. C'est conforme à ce que le parti socialiste a toujours fait sur la question des retraites (Protestations sur les bancs du groupe SRC), mais ce n'est pas conforme à notre vision de l'intérêt général et du sauvetage de nos régimes sociaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Vous nous proposez de tout renégocier.
M. Patrick Roy et M. Christian Bataille. Oui !
M. Jean Glavany. Vous n'avez même pas négocié !
M. François Fillon, Premier ministre. Mais il ne vous a pas échappé que, dans les cortèges, on entend beaucoup de revendications, et souvent très contradictoires : certains réclament que l'on revienne sur l'âge légal, d'autres ne veulent pas que l'on allonge la durée de cotisation. Certains exigent que la pénibilité soit étendue à tous les métiers, d'autres enfin commencent à demander le retour des régimes spéciaux, réformés en 2007.
M. Patrick Roy. Caricature !
M. François Fillon, Premier ministre. Vous le voyez, monsieur Ayrault, tout cela ne fait pas un projet solide pour sauver nos retraites. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Pour sécuriser notre régime de retraite par répartition, il n'y a qu'une seule solution ...
M. Maxime Gremetz. La démission du Gouvernement !
M. François Fillon, Premier ministre. ...l'allongement de la durée de travail et l'allongement à soixante-deux ans de la date à laquelle on prend sa retraite.
C'est la solution qui a été choisie par tous les pays européens sans aucune exception, et c'est ce que préconise le directeur du FMI que vous refusez d'entendre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
M. Henri Jibrayel. Ce n'est pas vrai !
M. François Fillon, Premier ministre. Vous refusez de l'entendre parce que vous avez choisi la démagogie.
Vous prétendez que nous n'avons pas l'appui de l'opinion. Mais pensez-vous vraiment que vous allez obtenir son estime en la trompant, comme vous le faites, sur la réalité, et en lui cachant la vérité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur Ayrault, un jour les Français vous demanderont des comptes...
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Non, c'est à vous qu'ils en demanderont !
M. François Fillon, Premier ministre. ...parce que chacun sait que les engagements que vous êtes en train de prendre sont destinés à être trahis, comme vous les avez toujours trahis depuis que cette question de la réforme des retraites est sur la table du Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC - Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Personne ne reviendra sur le passage à soixante-deux ans de l'âge légal de la retraite parce que ce serait une folie économique et une catastrophe sociale.
La vérité, c'est que secrètement, beaucoup d'entre vous le savent...
M. Jean-François Copé. Exactement !
M. François Fillon, Premier ministre. ...et cela, mesdames, messieurs les députés socialistes, vous rend d'autant plus coupables devant l'histoire ! (Mmes et MM. les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Démission !

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Ayrault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 octobre 2010

partager