traité de Lisbonne
Question de :
M. Nicolas Dupont-Aignan
Essonne (8e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
Question posée en séance, et publiée le 13 décembre 2007
TRAITÉ DE LISBONNE
M. le président. La parole est à Nicolas Dupont-Aignan.M. Nicolas Dupont-Aignan. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre ou à M. le ministre des affaires étrangères. Le 16 mai 2007, lorsqu'il est entré en fonctions, le Président de la République a déclaré : " Le peuple français ne veut plus que l'on décide à sa place, que l'on pense à sa place ". (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur divers bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Aussi, pourquoi aujourd'hui le chef de l'État, le Gouvernement, une partie des élus, de droite comme de gauche, veulent-ils penser à la place des Français en matière européenne ? Pourquoi veulent-ils, pour le traité de Lisbonne, décider à la place du peuple français ?
En un mot, pourquoi le Président de la République n'organise-t-il pas un référendum sur le traité de Lisbonne, qu'il signera demain ? (Applaudissements sur les mêmes bancs.) À cette question, vous répondez invariablement qu'il avait promis, au cours de sa campagne, un mini-traité ratifié par voie parlementaire. (" Oui ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais pas d'histoires entre nous ! Le traité de Lisbonne n'a rien du mini-traité promis : c'est la copie conforme de la Constitution européenne rejetée par la majorité du peuple français le 29 mai 2005 ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur divers bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) M. Giscard d'Estaing le reconnaît lui-même : c'est la même boîte à outils, rangée et décorée différemment !
Dans ces conditions, il appartient au seul peuple de confirmer ou de réviser sa position par référendum.
M. Maxime Gremetz. Voilà la démocratie !
M. Nicolas Dupont-Aignan. La voie parlementaire serait certes légale, mais illégitime. Pour la première fois depuis bien longtemps, au mépris total de l'esprit et de la pratique propres à la Ve République voulue par le général de Gaulle, la représentation nationale contredirait la voix du peuple à propos d'un texte qui met en cause la souveraineté nationale. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
Monsieur le ministre, sincèrement, comment pouvez-vous imaginer bâtir l'Europe, la faire aimer des Français, la faire respecter des peuples en organisant un tel coup de force ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur divers bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le député, vous repoussez l'essentiel d'un revers de main ou plutôt d'un joli revers de phrase : le Président de la République, avant son élection, avait promis un mini-traité ;...
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Ce n'est pas la question !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. ...une fois élu, il tient sa promesse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. - Vives protestations sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) C'est aussi simple que cela, mais pas suffisant pour répondre à votre question.
Il y a une très grande différence, dites-vous, entre le mini-traité et le traité de Lisbonne. La différence essentielle (Brouhaha sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)...
M. Jean-Paul Lecoq. Il n'a même plus besoin de signer : il a tout dit !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. Ce brouhaha derrière moi, me gêne pour vous répondre, monsieur Dupont-Aignan ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. Maxime Gremetz. Supprimez l'Assemblée, ce sera plus simple !
M. le président. Monsieur Chassaigne, monsieur Gremetz !
M. Maxime Gremetz. C'est scandaleux !
M. le président. Poursuivez, monsieur le ministre.
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. C'est que je suis très effrayé par ce bruit ! (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur Dupont-Aignan, je ne pense pas que la campagne référendaire ait été exemplaire. Elle a été l'occasion de parler de beaucoup de choses - des préoccupations des Français, de leur attitude envers le Gouvernement - mais très peu de l'Europe.
M. Maxime Gremetz. Arrêtez ! Vous avez été battus, acceptez-le !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. Le traité de Lisbonne - cela manque un peu d'éclat, c'est vrai -, n'est pas une Constitution. C'est un traité comme les autres, qui sera, comme les autres, ratifié par le Parlement. La seule exception a été le traité de Maastricht, qui a été ratifié par référendum, car il modifiait, sans lui porter atteinte, la souveraineté nationale en instaurant l'euro.
M. Jean-Paul Lecoq. Le traité de Lisbonne aussi ! Monsieur le président, le ministre ne connaît pas la Constitution !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. La " boîte à outils " dont parlait M. Giscard d'Estaing, j'en suis sûr, sera bientôt opérationnelle, grâce à ses caractéristiques, que vous connaissez.
Enfin, les dix-huit pays qui avaient approuvé la Constitution, certains - le Luxembourg, l'Espagne - par référendum, ont tous accepté la proposition française.
M. Maxime Gremetz. Et alors ?
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. Et ils vont ratifier le traité, non pas par référendum mais par la voie parlementaire. Pourquoi pas nous ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : M. Nicolas Dupont-Aignan
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 décembre 2007