réforme
Question de :
M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 14 octobre 2010
RÉFORME DES RETRAITES ET MANIFESTATIONS
M. le président. Je vais maintenant donner la parole à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, à la place de M. Bruno Le Roux.Vous me permettrez, monsieur Ayrault, de vous dire que lorsqu'un groupe souhaite changer d'intervenant, cela peut se faire sans interpeller violemment la présidence.
Vous avez la parole, monsieur Ayrault.
M. Jean-Marc Ayrault. Nous siégeons dans le cadre d'une séance de questions au Gouvernement. Or le président du groupe UMP, qui s'est sans doute trompé de lieu (" Non ! " sur les bancs du groupe UMP), n'adresse plus ses questions au Gouvernement, mais au président du groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Eh bien, moi, je vais interroger le Premier ministre ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, il faut éviter de jouer la provocation. On a assisté hier à un mouvement pacifique, massif, avec des salariés de plus en plus nombreux, et aussi des jeunes qui sont venus dire qu'ils étaient favorables à une réforme des retraites, mais pas à celle-ci, parce qu'elle est profondément injuste. Monsieur le Premier ministre, vous avez perdu la bataille de l'opinion ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Les jeunes sont en effet venus en nombre. Mais les plus nombreux étaient les salariés. Est-il interdit à la jeunesse d'exprimer un message de solidarité avec ses parents et ses grands-parents ? Je vous pose la question. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations et huées sur les bancs du groupe UMP.) Est-il interdit à la jeunesse d'exprimer son angoisse pour son propre avenir alors que, vous le savez, entrer aujourd'hui sur le marché du travail est une grande difficulté pour les jeunes ? Échec scolaire, échec universitaire, chômage et précarité au bout du chemin : voilà les questions que pose la jeunesse et auxquelles vous n'apportez aucune réponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Nous les posons à nouveau aujourd'hui. Vous devez faire preuve de responsabilité. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Le parti socialiste n'instrumentalise personne. Il respecte les organisations syndicales qui décident des manifestions. Mais le parti socialiste, qui est un parti de gouvernement, propose une alternative à cette réforme injuste des retraites. Il propose la justice fiscale, et d'abord, la suppression du bouclier fiscal. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, vous devez trouver une issue. Il ne faut pas rester droit dans vos bottes : proposez aux organisations syndicales qui vous le demandent d'ouvrir enfin des négociations. (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent. - Exclamations et huées sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le député Ayrault, le sens des responsabilités et du devoir, c'est celui qui conduit le Gouvernement à vous proposer, comme dans tous les autres pays européens, l'allongement de la durée de travail pour financer les régimes de retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Henri Emmanuelli. Et la CADES ?
M. François Fillon, Premier ministre. Bien sûr, tout le monde a le droit de manifester dans notre pays et j'ai toujours dit que les manifestants devaient être respectés et leur opinion entendue. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC.) Mais la responsabilité du Gouvernement et de la majorité, c'est de défendre l'intérêt général et de prendre les décisions qui permettront de sauver nos régimes de retraites.
M. Christian Hutin. Et les intérêts des riches !
M. François Fillon, Premier ministre. Comment le parti socialiste, qui a des relations suivies avec les autres partis socialistes en Europe, peut-il continuer à s'aveugler à ce point, en niant la nécessité d'allonger la durée de travail pour financer les retraites ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Quant à la responsabilité que certains d'entre vous - pas tous - prennent en incitant les collégiens et les lycéens à descendre dans la rue (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), j'ai noté que cette question faisait débat dans vos rangs, puisqu'il y a quelques jours, François Hollande, lui-même, disait que ce n'était pas la responsabilité d'un parti politique que d'organiser les manifestations dans la rue, et qu'il fallait faire des propositions constructives. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) C'est votre responsabilité. Vous êtes, je l'ai dit hier, face à l'histoire, et vous verrez que les Français, le moment venu, jugeront et feront la différence entre ceux qui ont assumé leurs responsabilités et ceux qui les ont fuies en faisant preuve de démagogie. (Mmes et MM. les députés du groupe UMP et du groupe NC se lèvent et applaudissent longuement.)
Auteur : M. Jean-Marc Ayrault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Retraites : généralités
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 octobre 2010