magistrats du parquet
Question de :
Mme George Pau-Langevin
Paris (21e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 27 octobre 2010
AFFAIRE BETTENCOURT
M. le président. La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.Mme George Pau-Langevin. Madame la ministre d'État, garde des sceaux, sur tous les bancs de cette assemblée, chacun est attaché au respect dû à l'autorité judiciaire, dont le rôle est fondamental dans une démocratie. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.) Nous sommes donc atterrés de voir au fil des semaines se dérouler un mauvais feuilleton, où se mêlent passions familiales, abus de faiblesse, évasion fiscale, échanges de services et financement politique.
Un degré supérieur dans l'inacceptable a été franchi avec cette lutte entre deux magistrats, qui laisse planer le doute sur les motivations d'un procureur statutairement aux ordres du Gouvernement, nommé contre l'avis du Conseil supérieur de la magistrature, face à une juge d'instruction statutairement indépendante et désirant faire la lumière sur les aspects obscurs de cette affaire.
Le spectacle donné par le tribunal de Nanterre est affligeant ! À de nombreuses reprises, le groupe socialiste vous a alerté sur les dérives afférentes à cette affaire et a réclamé que soient garantis l'indépendance et le bon fonctionnement de la justice. Chaque fois, vous avez éludé la question et laissé pourrir la situation, alors que le code de procédure pénale vous donne les moyens d'intervenir.
Il convenait évidemment que le parquet, dont vous êtes le supérieur hiérarchique, saisisse un juge d'instruction sur la totalité de l'affaire et dépayse l'ensemble de l'enquête. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous ne pouvons en effet accepter un dépaysement partiel, qui renverrait l'image d'une justice aux ordres, écartant certains juges susceptibles de mener une enquête indépendante pour laisser les clefs à un procureur proche du pouvoir.
Le procureur général de Versailles semble s'être résolu depuis peu à demander l'ouverture d'une information sur tous les volets de cette affaire et à en solliciter la délocalisation.
Madame la ministre, avez-vous décidé de prendre vos responsabilités ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Confirmez-vous cette information ? Qu'allez-vous faire pour que la justice reprenne son cours normal. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Madame Pau-Langevin, il existe des règles de procédure. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Pour intervenir dans le fonctionnement de la justice, il faut des raisons objectives. Or, jusqu'à très récemment, aucune des parties au procès n'avait demandé le dépaysement de l'affaire et les enquêtes avançaient : nul ne peut dire le contraire ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Henri Emmanuelli. Grotesque !
M. Patrick Lemasle. Vous êtes le donneur d'ordres !
M. le président. Je vous en prie !
Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. Plus récemment, une plainte a été déposée par l'une des parties. Dès lors, évidemment, des soupçons ont pesé sur cette juge et, les données ayant changé, il n'était plus possible de laisser les choses en l'état. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Patrick Lemasle. Le vol de l'ordinateur, c'est qui ?
M. le président. Du calme, mes chers collègues.
Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. Le procureur général de Versailles a donc décidé de demander à la Cour de cassation son avis sur le dépaysement de l'affaire dans une autre juridiction.
M. Henri Emmanuelli. C'est une honte !
Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. Par ailleurs, et par souci de cohérence, le procureur général de Versailles a également demandé, pour l'ensemble des procédures ouvertes en lien avec le dossier, l'ouverture d'une information, qui permettra de demander à la Cour de cassation de se prononcer. Cela signifie que cette dernière se prononcera sur le dépaysement de la totalité de l'affaire. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la députée, la justice a besoin de sérénité. (Rires et vives exclamations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Elle n'a pas besoin de vos soupçons ou de vos tentatives d'ingérence ! (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. Je vous en prie !
Auteur : Mme George Pau-Langevin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice et libertés (garde des sceaux)
Ministère répondant : Justice et libertés (garde des sceaux)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 octobre 2010