Question au Gouvernement n° 264 :
baccalauréat professionnel

13e Législature

Question de : Mme Marie-Lou Marcel
Aveyron (2e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 19 décembre 2007

RÉFORME DU BAC PROFESSIONNEL

M. le président. La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, pour le groupe socialiste, républicain, citoyen et divers gauche.
Mme Marie-Lou Marcel. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous vous engagez dans une voie dangereuse concernant l'enseignement professionnel.
M. Guy Teissier. Oh !
Mme Marie-Lou Marcel. Vous souhaitez réduire la durée du baccalauréat professionnel de quatre ans à trois ans, et, pour cela, vous allez supprimer la majorité des brevets d'enseignement professionnel, qu'ils dépendent de l'éducation nationale ou de l'enseignement agricole. C'est le nivellement par le bas !
M. Guy Geoffroy. Au contraire !
Mme Marie-Lou Marcel. Votre attaque n'a qu'une fin : vous voulez regrouper les classes dans le but évident de supprimer des postes d'enseignants,...
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Eh oui !
M. Guy Teissier. Oh !
Mme Marie-Lou Marcel. ...quitte à négliger la qualité de l'enseignement et le nécessaire encadrement de nos lycéens.
Les inquiétudes des lycéens, celles des enseignants, des parents d'élèves, mais aussi celles des acteurs de la vie économique sont grandes. Sur ma seule circonscription, plusieurs établissements sont menacés : les lycées professionnels de Decazeville et de Villefranche-de-Rouergue, sans oublier le lycée agricole de Villefranche.
Car, avec ce système, de nombreux jeunes qui auraient réussi leur BEP vont être pénalisés, comme le seront, en cascade, ceux qui auraient pu prétendre à une formation CAP.
Vous faites un pari dangereux : que les jeunes concernés s'orientent vers les formations par apprentissage. Ce calcul est aussi cynique. Les régions, chargées de l'apprentissage, devront payer ce que vous ne voulez plus payer. C'est un transfert déguisé de plus. Elles investissent massivement dans les locaux. Si les formations auxquelles ceux-ci sont destinés sont supprimées, à quoi auront servi tous leurs efforts financiers ?
L'enseignement professionnel est au carrefour de toutes les tensions sociales. Espérez-vous, en cassant le thermomètre, faire disparaître la fièvre ?
M. le président. Merci de poser votre question, madame.
Mme Marie-Lou Marcel. J'y arrive, monsieur le président.
Au nom du groupe socialiste, radical et citoyen, je dénonce votre projet, car il est tout simplement destructeur.
M. le président. Merci.
Mme Marie-Lou Marcel. Ce dispositif a été expérimenté sur l'académie de Lille : plus de 29 % des lycéens concernés ont abandonné les études.
M. Jean Auclair. Ça suffit !
Mme Marie-Lou Marcel. Ma question, j'y arrive, monsieur le ministre, est donc extrêmement simple : pourquoi appliquer à toute la France une mesure qui ne fonctionne pas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.
M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Madame la députée, et si on regardait les choses comme elles se présentent aujourd'hui ? Depuis 1985, le baccalauréat professionnel se passe après un BEP, soit quatre ans après la sortie du collège. Que constatons-nous ? Que ce système est complexe, qu'il est long, et que seuls 39 % des élèves poursuivent leurs études après le BEP. Parmi eux, près de la moitié ne parviennent pas à obtenir ce baccalauréat.
Le système tel qu'il fonctionne aujourd'hui est à la fois dangereux et illisible. Voilà d'ailleurs pourquoi il produit chaque année 150 000 jeunes sans qualification. (" Très bien ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il était donc bien nécessaire de prendre des mesures.
J'ajoute qu'il n'y aucune raison pour que le baccalauréat professionnel soit considéré comme différent des autres baccalauréats. (" Très bien ! " sur les mêmes bancs.) Les baccalauréats général et technologique se passent trois ans après la sortie du collège. Et c'est une manière de valoriser le baccalauréat professionnel que de le conserver.
Ne dites pas, madame la députée, des contrevérités. Ne laissez pas croire que nous allons faire disparaître le BEP, puisque, bien au contraire, les élèves qui s'engageront dans la formation du baccalauréat professionnel en trois ans obtiendront le BEP avant leur dernière année, s'ils le souhaitent.
Enfin, je suis très surpris que vous présentiez ce sujet comme polémique.
M. Marcel Rogemont. Mme Marcel a posé une question. Où est la polémique ?
M. le ministre de l'éducation nationale. D'abord, je me permets de rappeler qu'en 1981, c'est M. Mélenchon, ministre socialiste, qui a proposé la montée en charge de ce dispositif. (" Non ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Bien sûr que si !
M. Jean-Pierre Balligand. 1981, vous êtes sûr ?
M. le ministre de l'éducation nationale. Ensuite, je suis plus surpris encore que vous me disiez que le personnel de l'éducation nationale manifeste violemment contre ce dispositif, puisque tout à l'heure, en sortant de cet hémicycle, je vais signer avec les syndicats majoritaires dans l'enseignement professionnel un accord qui permettra d'aller progressivement vers la généralisation du baccalauréat professionnel en trois ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il y a derrière tout cela une polémique bien inutile, madame. Ce que nous voulons, c'est valoriser l'enseignement professionnel. Nous voulons qu'il ait la même qualité que les autres. Nous nous soucions des jeunes, et seulement des jeunes. Il n'y a aucune autre logique dans notre décision. Voilà pourquoi, massivement, les personnels et les élèves la comprendront. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Données clés

Auteur : Mme Marie-Lou Marcel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement technique et professionnel

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 décembre 2007

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