gouvernement
Question de :
M. Jean-Jacques Urvoas
Finistère (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 22 décembre 2010
DÉMISSION DE MINISTRES MIS EN CAUSE
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Jean-Jacques Urvoas. Monsieur le Premier ministre, en 1992, Pierre Bérégovoy, alors chef de gouvernement, avait estimé qu'un de ses ministres simplement mis en cause devait démissionner. Ce principe simple fut repris par tous les gouvernements, de droite et de gauche. En 1993, Édouard Balladur en avait même fait une règle. En 1998, Lionel Jospin l'a prolongé. En 2002, puis en 2004, Jean Pierre Raffarin l'a confirmé. Ce principe était donc devenu une sorte de règle commune, une règle protectrice et non accusatrice ; une règle morale, car tous vos prédécesseurs considéraient que le Gouvernement de la France ne pouvait voir sa parole affaiblie. Ils y voyaient une règle juste, qui, selon les mots du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, était à la fois " respectueuse de la présomption d'innocence et soucieuse de la probité politique. " En effet, quelle autorité, quelle force aurait un ministre qui, en même temps qu'il appellerait au respect de la loi, aurait enfreint cette même loi ?
M. Michel Sapin. Eh oui !
M. Jean-Jacques Urvoas. Monsieur le Premier ministre, vous ne vous êtes jamais exprimé sur ce sujet. Pourtant, au-delà de ce qui nous sépare, nous ne doutons pas que nous partageons une certaine conception de la parole publique.
Je souhaite donc respectueusement vous interroger. Pourquoi avez-vous cessé d'appliquer ce principe selon lequel la voix de la République ne peut être sans tache ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le député Urvoas, je vais tout aussi respectueusement vous dire que je ne suis pas totalement sûr d'avoir compris votre question. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)
À la question : si vous aviez été à la place de Lionel Jospin en 1999, auriez-vous demandé à Dominique Strauss-Kahn de démissionner ? la réponse est non. Je l'avais d'ailleurs dit publiquement à l'époque. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Si la question est : faites-vous confiance au ministre de l'intérieur pour mener à bien la mission que nous lui avons confiée avec le Président de la République, la réponse est oui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Et si la question est : le parti socialiste est-il qualifié pour défendre la présomption d'innocence, alors, là vraiment, la réponse est non ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC. - Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez en effet foulé aux pieds la présomption d'innocence d'Éric Woerth pendant trois mois ! Alors, de grâce, ne nous donnez pas de leçon et faites preuve d'un peu plus de cohérence et de dignité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP dont de nombreux députés se lèvent, et sur quelques bancs du groupe NC. - Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Auteur : M. Jean-Jacques Urvoas
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 22 décembre 2010