Question au Gouvernement n° 285 :
durée du travail

13e Législature

Question de : Mme Geneviève Fioraso
Isère (1re circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 9 janvier 2008

DURÉE LÉGALE DU TRAVAIL

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mme Geneviève Fioraso. Monsieur le Premier ministre, ma question fait suite à ce qui a constitué la seule vraie information de la conférence de presse tenue ce matin par le Président de la République. En effet, à la question : " Monsieur le Président de la République, souhaitez-vous que 2008 soit l'année de la suppression des 35 heures ? ", il a répondu par un " oui " abrupt. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Est-ce la fin annoncée de la durée légale du travail qui se profile à travers ce " oui " définitif ? (" Bien sûr ! " sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Ma question concerne la notion même de durée légale. S'il n'y a plus de durée légale du travail, quel sera l'avenir du fameux slogan auquel vous tenez tant : " travailler plus pour gagner plus ? "
M. François Hollande. Eh oui !
Mme Geneviève Fioraso. Comment mesurer et rétribuer les heures supplémentaires s'il n'y a plus de seuil de déclenchement des heures supplémentaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
C'en sera fini de la majoration de 25 % de ces heures et ce sera alors un manquement majeur aux promesses que vous avez faites et répétées sans relâche durant la campagne présidentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Si c'est tel est le cas, il faut le dire clairement aux Français : entendez-vous purement et simplement supprimer toute durée légale du travail ? (" Oui ! " sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Les conséquences sont connues : on aboutirait à aggraver les inégalités entre les salariés et à faire perdre tout repère aux salariés et aux entreprises.
Cette surenchère libérale risque d'accentuer les difficultés des entreprises les plus fragiles, donc les plus délocalisables. L'emploi, la croissance, et donc le pouvoir d'achat des Français, feront les frais de votre politique.
En aucun cas, vous ne permettrez aux Français d'augmenter librement leur temps de travail, contrairement au slogan que vous leur avez martelé, puisque c'est l'employeur qui décidera, sans protection sociale pour le salarié.
Monsieur le Premier ministre, en ce début d'année, est-ce réellement le seul voeu que vous formez pour améliorer le pouvoir d'achat des salariés et la compétitivité des entreprises françaises, gravement menacées, en berne dans les classements européens et internationaux ?
Compte tenu de la gravité du sujet, je vous remercie à l'avance, monsieur le Premier ministre, de répondre clairement à la question que se posent, en toute légitimité, l'ensemble des salariés : oui ou non, comptez-vous abolir la durée légale du travail ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. - " Oui ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Madame la députée, les choses sont claires : nous voulons tourner la page des trente-cinq heures imposées ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Et nous ne sommes pas les seuls : M. Strauss-Kahn (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), lors de son passage à Paris, disait, en décembre dernier, que les 35 heures étaient derrière nous ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Il y a quelques minutes, M. Gaëtan Gorce n'a pas dit autre chose, et, en tant que rapporteur de la loi Aubry 2, il sait de quoi il parle ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Voilà pourquoi vous n'êtes pas obligés de rester arc-boutés sur vos préjugés ! Vous n'êtes pas obligés en ce début d'année 2008 de vous figer dans l'archaïsme, pas plus que vous n'êtes obligés de laisser croire que nous ferions n'importe quoi, n'importe comment ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Notre priorité, contrairement à vous, c'est le dialogue social ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Voilà pourquoi le Premier ministre a, le 26 décembre dernier, transmis un document d'orientation complémentaire aux partenaires sociaux. Ils ont jusqu'au 31 mars pour nous dire comment ils voient les choses, et, quant à nous, nous prendrons nos responsabilités.
M. Daniel Vaillant. Répondez à la question !
M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Nous ne sommes pas sourds à ce que nous disent les Français dans les entreprises. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Hier encore, en Eure-et-Loir, avec Philippe Vigier, les délégués syndicaux et les salariés nous ont dit qu'ils veulent de la souplesse dans l'entreprise.
M. François Hollande. Répondez à la question !
M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Ils ne veulent plus qu'on leur impose les choses d'en haut, comme vous l'avez fait (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), mais qu'on rende les choses possibles comme nous l'avons fait avec les heures supplémentaires et les journées de RTT.
M. Michel Sapin. Il n'y aura plus d'heures supplémentaires !
M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Oui, il existe un cadre juridique pour la durée du travail en France et il en existera un. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous nous sommes opposés au projet de directive européenne, parce qu'il n'est pas question de faire n'importe quoi, n'importe comment. C'est nous, contrairement à vous, qui sommes attentifs aux conditions de travail, à la sécurité au travail, à la question de la pénibilité. Le statu quo n'est plus possible. (M. Facon brandit une ardoise avec la note de zéro sur vingt et la mention " hors sujet ".)
M. Guy Teissier. On n'est pas à l'école, monsieur Facon !
M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Et vous n'êtes pas obligés de continuer à regarder dans le rétroviseur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Données clés

Auteur : Mme Geneviève Fioraso

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail, relations sociales et solidarité

Ministère répondant : Travail, relations sociales et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 janvier 2008

partager